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NOTES.

SUR LA SATIRE IX.

(1) ARGUMENT. Cette satire est traitée en forme de dialogue. Juvénal semble d'abord compâtir à la misère trop méritée d'un certain Névolus, personnage infâme et perdu de débauche c'est pourquoi celui-ci lui dévoile naïvement les plus affreuses turpitudes; mais il lui recommande le secret. A ces mots, le satirique, reprenant la dignité de son caractère, lui représente que le vice et le crime percent bientôt les ténèbres, et paroissent au grand jour. Ces conseils honnêtes et pleins de gravité ne sont point du goût de Névolus. Juvénal change de ton, et le débauché finit par des plaintes, des Vœux extravagants.

Puisqu'il entroit dans le plan de Juvénal de combattre indistinctement tous les vices de ses contemporains, il paroît qu'il auroit dû s'en tenir, à l'égard du vice monstrueux dont il s'agit ici, à la première justice qu'il en avoit déja faite avec tant de pudeur et de dignité. Je pric, avant de passer outre, de relice l'article en question, Voy. satire II v. 117 et suiv., tom. 1, pag. 49.

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Qu'ajouter à la gravité de cette censure, d'ailleurs irréprochable? Mais, par une méprise bien pardonnable dans ce genre d'écrire Juvénal, trop indulgent pour une foule d'observations fines et profondes, a voulu particulariser et mettre en action ce qu'il n'avoit fait qu'indiquer et blamer en général. On voit encore qu'il a voulu concentrer dans son infâme Névolus tous les excès de la débauche, tous les déré glements du cœur et de l'esprit ; ce qu'il a exécuté de la ma nière la plus adroite. Malgré ce tour de force, et ce qu'il a d'ingénieux, j'avoue que je ne conçois pas ce qui peut, dans

le cours de son ouvrage, l'avoir si souvent ramené à de si dégoûtantes considérations; à moins que le grand écart de la nature sur lequel il a tant insisté, n'ait frappé so: imagination, au point de lui faire craindre que les progrès de cette peste renaissante n'entraînassent un jour la destruction d'une partie du genre humain; et il le fait assez sentir dans l'article ci-dessus indiqué, lorsqu'il dit que les Névolus et leurs semblables périssent tout entiers; steriles moriuntur.

Sans égard à ses intentions, Scaliger défend la lecture de toutes ses satires, et notamment de celle-ci, à cause de deux vers glissés, furtivement peut-être, dans quelque manuscrit; mais je doute qu'il eût persisté, s'il se fût agi de prononcer en dernier ressort. Non, ce judicieux critique n'auroit jamais pu se résoudre à priver les races futures d'un chef-d'œuvre de morale, de sentiment et de poésie pour une simple méprise, pour un manque de goût.

Laissant de côté ces deux vers trop fameux, et dont je suis bien éloigné de prendre la défense, je vas plus loin que Scaliger je regretterai toujours que Juvénal n'ait pas purgé ses satires de plusieurs sortes d'infamies qu'il falloit laisser mourir dans les ténèbres, comme les Germains plongeoient dans un bourbier ceux qui s'en étoient rendus coupables. On verra cependant qu'il sort de cette fange de grands traits de lumière, et des conseils dignes de la plus haute philosophie.

(2) Nous donnons un soufflet à l'esclave qui lèche seulement des friandises, vers 5.] Lambenti crustula est opposé àterit inguina du vers précédent : c'est comme si Juvénal avoit dit : Nous punissons les fautes des subalternes, mais nous faisons grace aux turpitudes des gens à la mode. Voici la même pensée que l'on retrouvera satire XI, vers 174:

Namque ibi fortunæ veniam damus. Alea turpis,
Turpe et adulterium mediocribus; hæc eadem illi
Omnia quum faciant, hilares nitidique vocantur.

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(3) Le plus facétieux, le plus mordant de tous les chevaliers de ta sorte, v. 9. ] Juvénal l'appelle vernam equitem, chevalier esclave, comme il a déja dit ironiquement ( satire VII, vers 14, ) Equites asiani, cappadoces, bithyni. Cela ne signifie pas néanmoins que Névolus fut en effet fils d'un esclave, mais qu'il en avoit les mœurs et la sorte de plaisanterie. Au reste, il y a cette différence entre servus et verna, c'est que l'on appeloit servus celui que l'on avoit pris à la guerre, ou que l'on avoit acheté ; et verna, celui qui étoit né dans la maison, d'une servante esclave. Marțial a dit, en parlant d'un homme qui avoit de semblables maîtresses:

Domumque et agros implet equitibus vernis.

(4) Par la véhémence et l'urbanité de tes saillies, v. II. Mot à mot: par des saillies nées dans le Pomorium, quasi post moenia, c'est-à-dire, des saillies d'un bon ton, du ton de la ville. On appeloit Pomarium un certain espace de terrain en dedans des murailles de la ville, où les augures prenoient les auspices, et où, selon Tite-Live, il n'étoit pas permis de bâtir. Le Pomarium, à mesure que Rome s'augmenta, reçut divers accroissements, depuis Servius Tullius jusqu'à Traja.

Cicéron faisoit grand cas de la plaisanterie, non pas seulement de celle qu'on nommoit attique, mais encore de l'ancienne plaisanterie romaine. Je vous avoue, écrit il à Pétus, que je prends un plaisir extrême à cet agréable badinage, mais dans l'ancien goût de notre nation, sur-tout lorsque je le vois presque hors d'usage dans le Latium, et que le ton étranger s'est tellement introduit dans Rome depuis qu'on y a reçu jusqu'aux Gaulois d'au-delà des monts qu'on n'y aperçoit plus aucune trace de l'agrément de nos pères. (Epist. lib. epist. 15.)

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(5) Les bandelettes enduites de gomme brutienne, v. 14.] Bochart (Georg. Sacr. pag. 660.) nous apprend que l'on

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trouvoit dans la forêt des Brutiens, aujourd'hui la Calabre, une gomme ou résine dont les médecins et les baigneurs fai. soient usage, et qui étoit connue des Grecs.

Au lieu de

Bruttia præstabat calidi tibi fascia visci,

on lit dans plusieurs éditions,

Præstabat calidi circumlita fascia visci.

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Saumaise a prouvé que ce dernier vers est de quelque Grammairien qui n'entendoit pas le premier mot vraisemblablement corrompu dans les manuscrits; car on y trouve tantôt Bruscia, tantôt Brustia, Bruccida ou Bruccia.

(6) Adultère plus fameux qu'Aufidius, etc. v. 25.] Martial (lib. v, epigr. 62.) nous apprend que cet Aufidius étoit de l'île de Chio, et il n'en parle pas plus favorablement que Juvénal :

ter,

Acrior hoc Chius non erat Aufidius.

(7) Tu souillois naguère les temples d'Isis, de Jupietc. v. 22.] Ceux qui écrivent de suite Ganymedem pacis supposent, sans preuves, qu'il y avoit une statue de Ganymède dans le temple de la Paix. Ceux qui écrivent Ganymedis, et mettent une virgule après, supposent gratuitement que Ganymède avoit un temple à Rome. Grangæus, dont j'ai suivi la leçon, écrit Ganymedem, c'est-à-dire, scelerare gaudebas Ganymedem. Gany mède doit s'entendre ici du temple même de Jupiter, sur l'autel duquel, dit Lactance, (lib. I, de Fals. Relig.) on voyoit l'aigle et l'échanson de ce dieu.

<< Tout le monde, suivant Platon, accuse les Crétois d'avoir inventé la fable de Ganymède. Comme ils sont persuadés que leurs lois viennent de Jupiter, on leur impute d'avoir mis Tom. 11.

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cette fable sur le compte de ce dieu, afin de pouvoir, à son exemple, se livrer impunément à la plus infàme des voluptés. Aristote prétend que Minos autorisa ces amours détestables, afin d'empêcher le trop grand nombre d enfants. » Note de M. Larcher sur le premier livre d'Hérodote.

(8) Et l'asyle secret de la mère des dieux transportée dans nos murs, v. 23.) On a déja vu (tome 1, satire III, note 26, page 109.) que Cybèle fut envoyée de Pessinunte à Rome, sous la forme d'une pierre brute, etc. Quant à ses mystères, on les célébroit dans le plus grand secret; c'est ce que signifie secreta palatia. Voy. tom. 1, satire 11, note 28, page 64.

(9) Le destin gouverne les hommes, v. 32.] Juvénal a déja dit, satire VII, vers 199:

Anne aliud quam

Sidus, et occulti miranda potentia fati ?

Servis regna dabunt, captivis fata triumphos.

(10) Quand Virron, etc. v. 35.] Il a déja été parlé fort au long de la gourmandise de Virron, satire v. Catulle (Epigr. 79) reproche à cet homme les mêmes infamies que Juvénal.

(11) Crois-tu qu'il soit facile et naturel, etc. v. 43.] Je ne suis pas moins révolté que Scaliger, comme je l'ai déja dit, de ce vers et de celui qui le suit immédiatement; mais je ne crois pas, comme lui, que tout honnête homme doive pour cela s'abstenir de la lecture du plus grand et du plus vertueux satirique qui ait jamais existé. Plusieurs savants doutent que ces vers soient de Juvénal ; s'il en est l'auteur, je le plains sans l'excuser; cependant je lui sais gré de les avoir faits de manière que le vice lui-même ne puisse les entendre sans dégoût et sans horreur. Voyez Scaliger le père, Poet, lib. III, cap. 9.

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