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jeux se mêlent au carnage; de toutes parts on s'empresse pour jouir de l'agonie et de la mort des innocens qu'on égorge; et ce cri barbare : Les chrétiens aux lions! fait tressaillir de joie une multitude ivre de sang. Mais, dans ces épouvantables holocaustes que l'on se hâte d'offrir à des divinités expirantes, il faut que chacune ait ses victimes choisies; et une cruauté ingénieuse invente de nouveaux supplices pour la pudeur. Enfin, les bourreaux fatigués s'arrêtent, la hache échappe de leurs mains: je ne sais quelle vertu céleste, émanée de la croix, com mence à les toucher eux-mêmes; à l'exemple de nations entières subjuguées avant eux, ils tombent aux pieds du Christianisme, qui, en échange du repentir, leur promet l'immortalité, et déjà leur prodigue l'espérance. Signe sacré de paix et de salut, son radieux étendard flotte au loin sur les débris du paganisme écroulé. Les Césars jaloux avoient conjuré sa ruine, et le voilà assis sur le trône des Césars. Comment a-t-il vaincu tant de puissance? en présentant son sein au glaive, et aux chaînes ses

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mains désarmées. Comment a-t-il triomphé de tant de rage? en se livrant sans résistance à ses persécuteurs.

Ainsi, les premiers assauts qu'il eut à soutenir, furent ceux d'une violence aveugle. Dieu, sans doute, l'ordonnoit de la sorte, parce qu'il savoit que le courage et la constance des martyrs étoient plus propres qu'aucun autre spectacle à étonner et à convaincre des hommes dominés par les sens.

D'ailleurs le Christianisme, à peine, naissant, n'avoit pu encore dissiper les nuages accumulés sur l'esprit humain et le familiariser avec les hautes considérations d'une métaphysique sévère et d'une théologie toute spirituelle. Sa doctrine, trop élevée au-dessus des idées habituelles des peuples païens, pour qu'il leur fût possible d'en saisir l'ensemble et d'en pénétrer la profondeur, ne poupour eux le sujet d'un examen éclairé et d'une discussion rigoureuse. Il falloit que le Christianisme, peu à peu, rectifiât, agrandit la raison de l'homme. pour que cette même raison fût en état

voit être

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de le combattre, sans trop se déshonorer par l'ineptie de ses sophismes. Celse, il est vrai, remua des questions d'une grande importance. On trouve, dans les fragmens qui nous restent de ses écrits, au milieu d'une foule d'opinions absurdes et de pensées extravagantes, le germe des objections sur le fondement de la foi, reproduites avec plus d'art par Rousseau. Mais l'extrême supériorité de celui-ci, les hautes idées sur Dieu, sur sa providence et sur sa justice, sur notre nature, nos devoirs, nos destinées, que l'auteur d'Emile mêle à ses erreurs, idées inconnues aux anciens et purement chrétiennes, montrent quel espace immense le Christianisme avoit fait parcourir à l'esprit humain, pendant les siècles qui séparent les premiers adversaires de notre doctrine du sophiste Génévois. Ainsi, difficultés et so lutions, lumières et obscurités, tout est prévu, ménagé de loin avec une sagesse profonde; tout se développe progressivement à l'époque précise où ce développement devient nécessaire, et toujours pour le triomphe de la vérité, triomphe

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d'autant plus glorieux qu'il est moins paisible.

A mesure que l'intelligence se perfectionne et s'étend, par la méditation des vérités intellectuelles que la Religion enseigne aux petits enfans comme aux hommes du génie le plus vaste, elle embrasse la cause des passions, se déclare leur alliée, et, essayant ses forces contre les vérités à qui elle les doit, se dispute à elle-même le pain qui lui donne la vie. Alors de nouvelles vérités, attaquées bientôt également, accourent à la défense de celles qu'une raison hostile met en péril. Chaque dogme est l'occasion d'une hérésie particulière, parce qu'il faut qu'ils soient tous éprouvés et affermis. Les preuves se multiplient avec les objections, et le Christianisme se développe tout entier (1).

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Mais, à la persécution des sophismes succède la persécution des sens : la foi demeure intacte, et cependant les mœurs

(i) Improbatio quippè hæreticorum facit eminere quid. Ecclesia sentiat, et quid habeat sana doctrina. S. Aug. Conf. Lib. VII, chap. xix,-n° ·

2.

se dépravent. Ces chrétiens si austères, séduits par la volupté, se livrent à des désordres dont le nom même devoit leur être à jamais inconnu. La licence pénètre jusque dans le sanctuaire; l'autel, le sacrifice est souillé par des mains indignes. Que deviendra le Christianisme ainsi profané? Tout à coup un principe vivifiant excite en cette masse corrompue une fermentation salutaire; tout change, tout se renouvelle; des apôtres enflammés d'un zèle divin font couler les larmes de la pénitence; l'ordre renaît avec la sainte discipline; partout se relèvent et fleurissent les vertus languissantes; des prodiges de charité, des miracles d'amour, étonnent de nouveau la terre consolée; l'esprit a triomphe de la chair une seconde fois, et l'Eglise retrouve ses enfans.

Qu'on ne se flatte flatte pas néanmoins que cette paix soit durable: à peine quelques trèves de lassitude interrompent le combat de l'erreur contre la vérité, dont le pouvoir ne s'étend pas jusqu'à détruire, par son propre effet, l'opposition d'une volonté pervertie. Dans le sein même de

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