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« faire cela, s'il eût eu des vierges aux yeux, et non « pas des prunelles impudiques? » Mais que dironsnous de Platon, quoique divin d'ailleurs, qui, voulant parler de ces tablettes de bois de cyprès où l'on devoit écrire les actes publics, use de cette pensée :

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Ayant écrit toutes ces choses, ils poseront dans « les temples ces monuments de cyprès [a]? » Et ailleurs, à propos des murs: « Pour ce qui est des «< murs, dit-il, Mégillus, je suis de l'avis de Sparte(1), « de les laisser dormir à terre, et de ne les point « faire lever [b]. » Il y a quelque chose d'aussi ridicule dans Hérodote, quand il appelle les belles femmes le mal des yeux. Ceci néanmoins semble en quelque façon pardonnable à l'endroit où il est, parceque ce sont des barbares qui le disent dans le vin et dans la débauche [c]; mais ces personnes n'excusent pas la bassesse de la chose, et il ne falloit pas, pour rapporter un méchant mot [d],

[a] Ces expressions de Platon se trouvent dans le V liv. de ses Lois.

(1) Il n'y avoit point de murailles à Sparte. ( Desp., 1674.) [b] « De les laisser dormir, et de ne les point faire lever « tandis qu'ils sont couchés par terre. » (éditions de 1674, 1675.)

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[c] « Dans le vin et la débauché; » (édit. de 1674 et 1675.) [d] « Mais comme ces personnes ne sont pas de fort « grande considération, il ne falloit pas, pour en rapporter « un méchant mot, etc. » (édit. de 1683.) Le texte de la

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se mettre au hasard de déplaire à toute la posté

rité [a].

CHAPITRE IV.

De l'origine du style froid.

Toutes ces affectations cependant, si basses et si puériles, ne viennent que d'une seule cause, c'est à savoir de ce qu'on cherche trop la nouveauté dans les pensées, qui est la manie sur-tout des écrivains d'aujourd'hui. Car du même endroit que vient le bien, assez souvent vient aussi le mal. Ainsi voyons-nous que ce qui contribue le plus en de certaines occasions à embellir nos ouvrages; ce qui fait, dis-je, la beauté, la grandeur, les graces de l'élocution, cela même, en d'autres rencontres, est quelquefois cause du contraire, comme on le peut aisément reconnoître dans les hyperboles et

phrase entière se lit, tel que nous l'offrons, dans l'édition de 1694, et non dans celle de 1683, comme le disent Brossette et Saint-Marc.

[a] Larcher pense que dans le cas où l'expression que l'historien met dans la bouche des ambassadeurs persans les caractériseroit, elle « deviendroit par là même nécessaire. » (Histoire d'Hérodote, liv. V, tome IV, page 197.) Longin ne méconnoissoit pas ce principe; mais il le trouvoit susceptible d'exceptions.

dans ces autres figures qu'on appelle pluriels [a]. En effet, nous montrerons dans la suite combien il est dangereux de s'en servir. Il faut donc voir maintenant comment nous pourrons éviter ces vices qui se glissent quelquefois dans le sublime. Or, nous en viendrons à bout sans doute, si nous acquérons d'abord une connoissance nette et distincte du véritable sublime, et si nous apprenons à en bien juger; ce [b] qui n'est pas une chose peu difficile, puisqu'enfin de savoir bien juger du fort et du foible d'un discours, ce ne peut être que l'effet d'un long usage, et le dernier fruit, pour ainsi

[a] Voici la traduction donnée par Saint-Marc: «< comme <on le peut aisément reconnoître dans les changements, « dans les hyperboles et dans les nombres mis les uns pour << les autres. » Il la motive de la manière suivante; « Il fal«<loit ajouter ici ces mots dans les changements. Tollius avoit « averti de l'omission de M. Despréaux. Il est parlé de cette espèce de figure dans le chapitre XIX.... Longin se con« tente d'indiquer la troisième chose dont il parle par ce « seul terme les pluriels. C'est ce qui ne s'entend pas en fran"çois; et l'alongement de M. Despréaux n'est pas plus intelligible. Puisqu'il étoit nécessaire de suppléer, le mieux « étoit de dire la chose même, et c'est ce que j'ai fait. Il est

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parlé de ces nombres mis les uns pour les autres dans le chap. XX, et des hyperboles dans le XXI. »

[b] Le mot ce ne se trouve dans aucune des éditions antérieures à celle de 1713. Il y a simplement: « qui n'est pas « une chose peu difficile.

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dire, d'une étude consommée (1). Mais, par avance, voici peut-être un chemin pour y parvenir [a].

CHAPITRE V.

Des moyens en général pour connoître le sublimé.

Il faut savoir, mon cher Térentianus, que, dans la vie ordinaire, on ne peut point dire qu'une chose ait rien de grand, quand le mépris qu'on fait de cette chose tient lui-même du grand. Telles sont les richesses, les dignités, les honneurs, les empires et tous ces autres biens en apparence qui n'ont

(1) Il eût été plus tôt fait et plus conforme à l'original de dire « puisque bien juger des discours est le dernier fruit « d'une longue expérience. » (Saint-Marc.)

[a] « Dès le commencement de son traité, Longin parle « des vices de style les plus opposés au sublime, et j'ai cru, << dans cette analyse, dit La Harpe, devoir suivre une "marche toute contraire, parcequ'il me semble qu'en tout << genre il faut d'abord établir ce qu'on doit faire, avant « de dire ce qu'il faut éviter. Il en marque trois principaux : << l'enflure, les ornements recherchés, qu'il appelle le style « froid et puéril, et la fausse chaleur. Ce sont précisément « les trois vices dominants de ce siècle. Et combien d'écrivains, qui ont la prétention d'être grands, d'être chauds, « se trouveroient froids au tribunal de Longin, c'est-à-dire, « à celui du bon sens, qui n'a pas changé depuis lui! » (Cours de littérature, tome I.)

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qu'un certain faste au-dehors, et qui ne passeront jamais pour de véritables biens dans l'esprit d'un sage, puisqu'au contraire ce n'est pas un petit avantage que de les pouvoir mépriser. D'où vient aussi qu'on admire beaucoup moins ceux qui les possèdent, que ceux qui, les pouvant posséder, les rejettent par une pure grandeur d'ame.

Nous devons faire le même jugement à l'égard des ouvrages des poëtes et des orateurs. Je veux dire qu'il faut bien se donner de garde d'y prendre pour sublime une certaine apparence de grandeur, bâtie ordinairement sur de grands mots assemblés au hasard, et qui n'est, à la bien examiner, qu'une vaine enflure de paroles, plus digne en effet de mépris que d'admiration; car tout ce qui est véritablement sublime a cela de propre quand on l'écoute, qu'il élève l'ame, et lui fait concevoir une plus haute opinion d'elle-même, la remplissant de joie et de je ne sais quel noble orgueil, comme si c'étoit elle qui eût produit les choses qu'elle vient simplement d'entendre [a].

Quand donc un homme de bon sens et habile en ces matières nous récitera quelque endroit d'un ouvrage, si, après avoir ouï cet endroit plusieurs.

[a] On ne sauroit mieux décrire les effets du sublime. A la lecture de ce passage, le grand Condé s'écria: « Voilà le sublime, voilà son véritable caractère. »

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