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corrompue une fermentation salutaire; tout change, tout se renouvelle; des apôtres enflammés d'un zèle divin font couler les larmes de la pénitence; l'ordre renaît avec la sainte discipline; partout se relèvent et fleurissent les vertus languissantes; des prodiges de charité, des miracles d'amour étonnent de nouveau la terre consolée: l'esprit a triomphé de la chair une seconde fois, et l'Eglise retrouve ses enfans.

Qu'on ne se flatte pas néanmoins que cette paix soit durable: à peine quelques trèves de lassitude interrompent le combat de l'erreur contre la vérité, dont le pouvoir, quoique irrésistible sur l'entendement, ne s'étend pas jusqu'à détruire par son propre effet l'opposition d'une volonté pervertie. Sous l'empire même de l'évidence, l'homme demeure libre, non pas de se méprendre, mais de se révolter; non pas de ne point voir, mais de nier ce qu'il voit : liberté terrible qui, trop souvent réduite en usage, devient, pour quiconque sait penser, la preuve la moins équivoque du vice originel de notre nature, et tout ensemble l'explication des épreuves auxquelles la Religion a été perpétuellement soumise depuis son origine. Sans cesse agitée par quelque orage, il entre dans sa destinée, comme dans celle de l'homme, de ne jamais jouir ici-bas d'un

repos parfait. L'orgueil, la licence, l'avarice, toutes les passions liguées contre elle, lui suscitent incessamment de nouvelles guerres, mais aussi lui préparent de nouveaux triomphes. Force étonnante de la société chrétienne! L'hérésie, tantôt souple, tantôt audacieuse, prend tout es les formes, se couvre de tous les masques, se plie et replie en tous sens pour ébranler ses dogmes; et constamment invariable dans sa doctrine, l'Église voit les sectes rebelles expirer l'une après l'autre à ses pieds: l'esprit d'indépendance, ou l'ambition de dominer, excite dans son propre sein des divisions suivies souvent de schismes déplorables; aussitôt de ses entrailles déchirées, mais toujours fécondes, sortent en foule de nouveaux enfans qui la consolent de ceux qu'elle a perdus : des princes jaloux attentent à ses droits, et s'efforcent de troubler sa divine hiérarchie; malgré leurs violences et leurs ruses, son gouvernement,

affermi par les coups qu'on lui porte, subsiste inaltérable, et se perpétue de siècle en siècle au milieu des déplacemens et des ruines des gouvernemens humains : semblable à ces antiques monumens de l'Egypte, dont l'Arabe vagabond, qui plante le soir à l'abri de leur masse immobile la tente qu'il enlevera le matin, essaie

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de détacher en passant quelques pierres, et bientôt, fatigué d'un travail sans fruit, s'enfonce et disparoît dans des solitudes inconnues.

Mais c'est maintenant par leur base que le Christianisme et le monde moral vont être attaqués. On a reconnu que l'Église et tous ses dogmes reposent sur l'autorité, comme sur un roc inébranlable. Aussitôt la multitude des sectaires, divisés sur tout le reste, s'unissent pour sa per ce fondement de toutes les vérités. La réforme, à ce premier moment, est leur cri de guerre; plus tard, ce sera la philosophie. Écoutez-les : ils viennent affranchir la terre des abus introduits par le temps ou par les passions, et guérir l'esprit humain des préjugés qui l'obscurcissent. Armés de ce prétexte séduisant, ils multiplient sans fin les destructions: la suprématie du chef de l'Église, l'épiscopat, l'ordre pastoral, les sacremens, le culte et ses saintes pompes, rien n'échappe à la hardiesse de leur zèle réformateur. Mutilant à l'envi la foi, et se hâtant, en quelque sorte, de se délivrer du tourment de croire comme du tourment d'obéir, ils proclament rapidement, dans leurs symboles éphémères, l'abolition de tous les dogmes religieux et sociaux. Luthériens sociniens, déistes, athées, sous ces divers noms qui indiquent les phases successives

d'une même doctrine, ils poursuivent avec une infatigable persévérance leur plan d'attaque contre l'autorité. Ils nient les mystères du Christianisine; ils nient sa morale; ils nient son Auteur; «< ils nient Dieu, ils se >> nient eux-mêmes. Là finit la raison hu» maine (1). »

Jusqu'ici je n'ai peint que le délire de leurs opinions; mais leur rage forcenée, qui la peindra? qui racontera leurs efforts impies et leurs noirs complots? Insensés ! en vain ils attaquent une Religion contre laquelle il n'est pas donné à l'homme de prévaloir: elle élève sa tête couronnée de lumière, tandis que, roulant d'abîme en abîme, parcourant dans leur chute tous les degrés de l'erreur, sans pouvoir s'arrêter dans aucun, affaissés sous le poids vengeur des vérités qu'ils blasphèment, ils tombent et s'enfoncent dans le gouffre ténébreux de l'indifférence, où le crime, stupidement tranquille, s'endort entre les bras de la volupté, aux pieds de l'affreuse idole du

néant.

Tel est le lamentable terme où aboutit nécessairement toute philosophie sans règle, qui, au lieu de se laisser conduire par un

(1) Essai analytique sur les lois de l'ordre social, par M. de Bonald.

guide supérieur, par la raison divine ellemême, s'efforce de lui substituer la raison humaine, en fait la base de la foi, et finit par tout nier, parce qu'elle ne peut rien comprendre et ne veut rien pratiquer.

Un de ces hommes qui découvrent de loin, parce qu'ils savent se placer à une grande hauteur, Bossuet, observant que déjà tous les dogmes avoient été tour à tour attaqués sans succès, prédisoit, il y a plus d'un siècle, ce que nous voyons s'accomplir sous nos yeux. Foibles esprits qui, témoins de l'effet, tàchez encore d'en méconnoître la cause, écoutez les paroles prophétiques de l'orateur chrétien: « Je prévois que les li>>bertins et les esprits forts pourront être

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décrédités, non par aucune horreur de >> leurs sentimens, mais parce qu'on tien» dra tout dans l'indifférence, excepté les plaisirs et les affaires (1). » Vous l'avez entendu; regardez maintenant autour de vous, et répondez. Qu'apercevez-vous de toutes parts qu'une indifférence profonde sur les devoirs et sur les croyances, avec un amour effréné des plaisirs et de l'or, au moyen duquel il n'est rien qu'on ne puisse obtenir? Tout s'achète, parce que tout se vend, conscience, honneur, Religion, opi

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(1) Sermon pour le deuxième dimanche de l'Avent.

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