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sez-vous si exactement les opinions secrètes d'hommes qui n'ont jamais été eux-mêmes connus de personne? La belle invention que ces justes ignorés du monde entier, et que l'on crée d'un trait de plume, pour éluder un argument fâcheux! Mais, quand on admettroit votre absurde supposition, vous ne répondez à rien, vous ne remédiez à rien car des justes cachés ne forment pas une Eglise visible, et c'est une Eglise visible, une Eglise composée de fidèles et de pasteurs enseignans, que nous vous sommons de nous montrer. Vous ne l'avez pas fait, vous ne le ferez jamais : donc vous n'êtes pas la véritable Eglise.

La véritable Eglise est universelle, et vous n'ê tes que d'hier, et chacune de vos sectes, prise à part, est à peine connue dans un coin du globe : car, comptez, s'il se peut, en France, en Angleterre, en Allemagne, la multitude de doctrines diverses comprises sous le nom général de luthéranisme, de calvinisme, d'anglicanisme, etc.; chaque famille presque vous offrira une Religion différente. Vous aspirez si peu à l'universalité, que vous avez même abandonné à l'ancienne Eglise ce glorieux titre de catholique ou d'universelle, qui la distingue exclusivement, et la fait reconnoître par toute la terre. Ce qui vous appartient en propre, c'est l'esprit particulier, c'est l'esprit qui sépare et divise à l'infini; voilà votre ineffaçable caractère : donc vous n'êtes pas la véritable Eglise.

Enfin la véritable Eglise est apostolique, et loin de pouvoir remonter jusqu'aux apôtres par une succession non interrompue de pasteurs qui aient enseigné la même foi dans tous les temps; de votre aveu, vous ne succédez à personne, vous ne pouvez pas nommer, durant quinze siècles, nous ne disons pas un seul pasteur, mais un seul homme, quel qu'il fût, qui ait eu la même Religion que vous donc, encore une fois, vous n'êtes : véritable Eglise.

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L'ignorance et la sottise ne s'effraient d'aucune objection; elles parlent et croient répondre. Mais il y avoit parmi les théologiens réformés des hommes vraiment habiles et d'une grande pénétration. Ceux-ci comprirent bientôt qu'il falloit nécessairement, ou renoncer à défendre la Réforme, ou changer toutes les idées que les Chrétiens jusqu'alors avoient eues de l'Eglise.

Mestrezat (1) et Jacques Ier (2) ébauchèrent le nouveau système. Claude, après eux, essaya de le soutenir, en désespoir de cause, pour affermir ses frères chancelans. Il les entretint « d'un corps de >> Chrétiens divisé en plusieurs communions particulières, à qui l'on peut encore, en quelque » manière, donner le nom d'Eglise, parce que >> tous les Chrétiens sont encore, à quelque égard, » dans l'enceinte générale de la vocation de l'E

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(1) Traité de l'Eglise, pag. 186 et 371.

(2) Voy. Réplique du cardinal du Perron, c. LX.

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» Il semble vangile (1). la conscience du ministre retenoit sa plume à chaque mot. Il ne parle qu'en tremblant, en hésitant; à quelque égard, dit-il, et en quelque manière: comme s'il existoit un milieu, comme si JésusChrist ayant établi une Eglise seule véritable, toute autre société pouvoit être, en quelque manière, à quelque égard, cette Eglise établie par Jésus-Christ!

. Plus hardiment absurde, mais aussi plus conséquent, Jurieu, tour à tour sophiste et prophète, controversiste impétueux, et la terreur de son propre parti, où l'on redoutoit l'âpreté de son caractère et la violence de ses emportemens, Jurieu se chargea de développer sans détour le système qu'on n'avoit encore proposé qu'avec réserve.

Il maintint donc que la vraie Eglise, loin de former une société distincte et séparée de toutes les autres, se compose au contraire de la réunion de toutes les sectes chrétiennes faisant profession de croire certaines vérités qu'il appelle fondamentales. « Nous voulons, dit-il, que l'Eglise catho

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lique et universelle soit répandue dans toutes » les sectes, et qu'elle ait de vrais membres dans » toutes celles de ces sociétés qui n'ont pas ren» versé le fondement de la Religion chrétienne, fussent-elles en désunion les unes d'avec les au

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(1) Défense de la Réforme, pag. 200.

» tres, jusqu'à s'excommunier mutuellement (1). Ce n'étoit pas une légère nécessité qui forçoit la Réforme à se précipiter dans cette doctrine. Elle étoit réduite à ne pouvoir prétendre faire partie de la véritable Eglise, de l'Eglise établie par JésusChrist, qu'en y introduisant avec elle toutes les erreurs, et en anéantissant le Christianisme. Du reste, la vraie Religion ne consistant, selon cette étrange hypothèse, qu'en un petit nombre de dogmes communs à la plupart des sectes, et par une conséquence immédiate, ces sectes ne formant qu'un seul corps ou une seule Eglise, les objections des catholiques s'évanouissoient d'elles

mêmes.

Vous soutenez que la véritable Eglise est une; et nous aussi, disoient les réformés; mais cette unité résulte de la croyance des mêmes vérités fondamentales: Tout ce qu'on croit au delà étant matière d'opinion et non matière de foi (2), ne rompt pas l'unité nécessaire.

Vous soutenez que la véritable Eglise a toujours été visible; et nous aussi : « Il est vrai qu'il y a toujours dans le monde une Eglise visible; mais » il est faux que cette Eglise soit une certaine » communion distincte de toutes les autres com

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(1) Le vrai Système de l'Eglise, pag. 79.

(2) La Religion des protestans, une voie súre au salut, chap. vi, 56.

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» munions. L'Eglise est demeurée visible durant >> tous les siècles dans les communions qui, malgré leur séparation et les anathèmes qu'elles ont mutuellement prononcés les unes contre les » autres, ont toujours conservé les vérités principales (1). »

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Vous soutenez que la véritable Eglise est universelle; et nous aussi : ce caractère, nous nous plaisons à l'avouer, lui est essentiel (2). Mais quelle plus complète universalité que celle qui n'a d'autres bornes que l'étendue, non pas d'une seule communion, mais de toutes les communions qui, dans tous les temps, ont conservé les vérités principales?

Vous soutenez que la véritable Eglise est apostolique; et nous aussi; car (*) c'est une conséquence évidente de sa perpétuelle visibilité. Mais

(1) Le vrai Système de l'Eglise, pag. 226. (2) Accomplissement des Prophéties, par Jurieu, pag. 82. (*) « Il faut, dit-on, recevoir le ministère des mains » de cette Eglise, hors laquelle le Saint-Esprit ne se » donne pas. Je l'avoue. Mais cette Eglise, qui donne » le droit d'exercer le ministère, n'est ni l'Eglise ro» maine, ni la grecque, ni la protestante, c'est l'Eglise » universelle, qui ne donne pas ce droit par elle-même ; » elle le donne par les diverses sociétés chrétiennes qui » vivent sous diverses confédérations, et lesquelles ont >> chacune chez elle le pouvoir d'établir le ministère pour » l'édification de leurs peuples. » Le vrai Système de l'Eglise.

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