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terre au ciel, et l'homme à son Auteur, la haute politique de nos jours va chercher au fond du sanctuaire l'Etre souverain qu'on y adore; elle le revêt de lambeaux de pourpre, lui met un sceptre de roseau à la main, sur la tête une couronne d'épines, et le montre au peuple, en disant : Voilà Dieu!

Doit-on s'étonner que la Religion ainsi humiliée, déshonorée, ne recueille que l'indifférence? Après dix-huit cents ans de combats et de triomphe, le Christianisme éprouve enfin le même sort que son fondateur. Cité, pour ainsi dire, à comparoître, non pas devant un proconsul, mais devant le genre humain tout entier, on l'interroge: Es-tu roi? Est-il vrai, comme on t'en accuse, que tu prétendes régner sur nous? C'est vous-même qui l'avez dit, répondil; oui, je suis roi: je règne sur les intelligences en les éclairant, sur les cœurs en réglant leurs mouvemens et jusqu'à leurs désirs; je règne sur la société par mes bien→ faits. Le monde étoit enseveli dans les ténèbres de l'erreur; je suis venu lui apporter la vérité; voilà mon titre : quiconque aime la vérité m'écoute. Mais déjà ce mot n'a plus aucun sens pour une raison pervertie; il est nécessaire qu'on le lui explique. Qu'est-ce que la vérité? demande le juge

distrait et stupide; et, sans attendre la réponse, il sort, déclare qu'il ne trouve rien de condamnable dans l'accusé, et le livre avec indifférence à la multitude pour en faire son jouet, et bientôt sa victime (1).

Ce drame, profond dans sa simplicité, comme tout ce que renferme l'Évangile, peint mieux que de longs discours cette défaillance morale, cette espèce de mort intellectuelle où tombent les hommes et les peuples, lorsque, cessant d'être trompés par les illusions de l'erreur, ils refusent obstinément de céder à la conviction de la vérité. « Telle est, s'écrioit, il y a peu d'an»> nées, un orateur éloquent, telle est au»jourd'hui la grande plaie de l'Église, ou, » pour nous servir d'une expression des >> Livres saints, sa plaie désespérée, des» perata est plaga ejus (2). Car, que pouvons-nous opposer à cet état de choses? » Il est possible de résister à la violence et » à la force ouverte; mais qu'opposer à >>ces armes invisibles qui échappent à toute espèce de lutte, l'insouciance et le dédain; >> et comment chasser l'impiété de ce der»> nier poste, où, fatiguée de combats, elle

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(1) Vid. Joan., c. xviii, 37, 38.

(2) Mich., 1, 9.

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a fini par se retrancher? Nous connois}) sons bien le remède aux maladies du >> corps; mais le remède à cette maladie épidémique des esprits, qui le trouvera? » On peut savoir comment guérir un ma>> lade qui désire sa guérison; mais celui qui ne veut pas guérir et ne sait pas » même s'il est malade; mais celui qui, >> aux portes de la mort même, a toute >> la confiance et la sécurité de la santé, par » où le prendre, et qui le sauvera? Nous >> savons comment on peut réfuter une er>> reur ou défendre un dogme; mais quelle » réfutation reste-t-il donc à faire, ou » quelle instruction reste-t-il à donner » quand le doute prend la place de tout, >> et que le premier dogme est le mépris de >> tous les dogmes? Nous connoissons le >> frein que l'on peut mettre au fanatisme » religieux, puisqu'on le trouve dans la

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Religion même; mais comment arrêter >> le fanatisme philosophique? Où sera son,

contre-poids? et comment faire entendre >> raison à des hommes qui n'ont pour règle » de toute vérité que leur propre raison, » et qui, comme ces pharisiens follement >> présomptueux dont il est parlé dans saint Jean, nous disent froidement et dogmatiquement: Nous sommes sages, parce que nous sommes sages, et nous voyons parce

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>> que nous voyons quia videmus (1)? En>> fin nous pouvons arrêter un torrent dans »sa course impétueuse; mais ces eaux bour>> beuses et stagnantes, d'une corruption rai>> sonnée qui se complaît dans son repos, et »> nelaisse del'énergie que pour l'intrigue et » la cupidité, qui les remuera? et quel > autre que Dieu, par un miracle singulier » de sa miséricorde, peut nous tirer de cette torpeur indéfinissable qui décon» certe à la fois, et les observations des »sages, et la sollicitude des pasteurs; et » de ce marasme moral contre lequel ne » peuvent rien, ni la force de la raison, ni >> la force du zèle, ni la force des lois, ni la >> force des armes (1)? »

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Incompréhensible stupeur des hommes de notre temps! Plus ils sont frappés, plus ils s'endurcissent; plus la vérité fait d'efforts pour les ramener à elle, plus ils sont indifférens à la vérité. Qu'ils meurent donc, puisqu'ils veulent mourir ! Mais ôtons-leur du moins toute excuse; mettons à découvert leur inconséquence et leur déraison; forçons-les de rougir de l'idole à laquelle

(1) Joan., ix, 41.

(2) Lettre pastorale de Mer l'Evêque de Troyes, à l'occasion de son entrée dans son diocèse, p. 11.

ils sacrifièrent tout, vérité, vertu, et la vie même.

Nous aurons atteint ce but, si nous démontrons que l'indifférence en matière de religion, qu'on préconise comme le dernier effort de la raison et le plus précieux bienfait de la philosophie, est aussi absurde dans ses principes que funeste dans ses effets. Or, nous espérons environner de tant d'évidence ces deux propositions, que ceux même qui conserveroient le triste courage de les nier, ne tenteront même pas de les combattre avec l'arme du raisonnement.

Et d'abord, rien n'est plus absurde que l'indifférence, parce qu'elle ne peut raisonnablement reposer que sur ces deux principes Que nous n'avons aucun intérêt à nous assurer de la vérité de la Religion, ou qu'il est impossible de découvrir la vérité qu'il nous importe de connoître. Or, ces deux principes sont également faux, également absurdes nous le prouverons, et nous montrerons de plus qu'il existe pour tous les hommesen général, et pour chaque homme en particulier, un moyen sûr, aisé, infaillible, de se convaincre de la nécessité de la Religion, et de discerner la véritable.

Rien, en second lieu, n'est plus funeste

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