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que l'indifférence, parce qu'elle conduit directement à toutes les calamités comme à tous les crimes, parce qu'elle énerve et détruit insensiblement toutes les facultés morales, parce qu'enfin elle est incompatible avec l'ordre de la société.

Et afin d'ôter à la paresse, aussi-bien qu'à l'ignorance, jusqu'au plus léger prétexte de se tranquilliser dans ce lamentable état, nous écarterons soigneusement toute discussion qui suppose des connoissances étrangères au commun des hommes; en sorte que le bon sens le plus ordinaire, suffira pour qu'on lise ce livre avec fruit.

Peut-être quelques âmes foibles, quelques esprits légers, mais non pervertis entièrement, après avoir été entraînés par ce qu'on appelle le mouvement du siècle, pénétrés d'un juste effroi à la vue de l'abîme où ils courent, se décideront-ils à examiner sérieusement ce qu'ils ont jusqu'ici méprisé sans le connoître. C'est là tout ce que nous demandons d'eux; nous ne leur disons point: Croyez ; mais, Éxaminez.

Quoique notre sujet n'exige pas que nous démontrions la vérité du Christianisme, nous en offrirons cependant assez de preuves pour convaincre les incrédules de bonne foi. Peut-être même y puiseront-ils une instruction plus utile que celle qu'ils

auroient pu tirer d'une réfutation directe de leurs erreurs; mais toujours certainement ils y trouveront assez de motifs qui justifient, et même commandent impérieusement l'examen que nous les engageons à entreprendre. Puissent-ils s'y déterminer pour la gloire de la vérité, et pour leur propre bonheur! Quoi qu'on essaie de se persuader, ces deux choses sont inséparables: il n'y a de bonheur qu'au sein de la vérité, parce qu'il n'y a de repos que là. L'erreur enivre, l'indifférence assoupit ; mais ni l'une ni l'autre ne comblent le vide du cœur. Nous le répétons, notre unique désir, c'est qu'on examine de bonne foi: nous ne nous sommes proposé d'obtenir que cela; et si nous l'obtenons d'un seul homme, notre travail sera trop payé.

Il n'y a guère plus d'un an que l'Essai sur l'indifférence en matière de Religion a paru, et déjà il est traduit dans les principales langues de l'Europe. Devenus propriétaires de cet Ouvrage, nous nous applaudissons de le voir ainsi se répandre; mais nous croyons devoir mettre le public en garde contre les entreprises d'un genre tout different. Avertis qu'on projette, dans les PaysBas, une contrefaçon de l'Essai sur l'indifférence en matière de Religion, nous prévenons les étrangers qu'elle sera nécessairement très-défectueuse, puisqu'elle n'aura pu être faite que sur une édition corrigée depuis par l'Auteur. On sait d'ail leurs de combien de fautes sont toujours remplies ces éditions subreptices, spéculations hasardeuses d'une basse cupidité.

Nous avions l'espoir de publier le second volume de l'Essai sur l'indifférence en matière de Religion, en même temps que cette cinquième édition. Détourné par d'autres travaux, l'Auteur pu réaliser nos espérances. Nous nous flattons cependant que cette seconde partie ne se fera pas désormais attendre long-temps.

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ESSAI

SUR L'INDIFFÉRENCE

EN MATIÈRE

DE RELIGION.

CHAPITRE PREMIER.

Considérations générales sur l'indifférence religieuse. Exposition des trois systèmes auxquels se réduit l'indifférence dogmatique.

L'ESPRIT humain a ses époques de sagesse et dé vertige, de grandeur et de décadence, comme la société ; et la société elle-même n'est assujettie à ces révolutions diverses que parce qu'elles sont naturelles à l'esprit humain, dont elle partage invariablement les destinées. Cette vérité qui, en liant la morale à la législation, donne aux théories politiques une base fixe, n'avoit point échappé au génie perçant de Pascal. Personne n'à mieux connu le pouvoir de l'opinion, qu'il appelle la reine du

monde; et l'on concevra qu'il ne dit rien de trop, si l'on entre un peu avant dans sa pensée, et qu'on entende par opinion les doctrines dominantes. Leur empire sur les hommes est absolu, quoiqu'il ne devienne quelquefois apparent qu'à la longue ; et c'est ce qui trompe tant d'observateurs superficiels, incapables d'embrasser, d'une seule vue de l'esprit, un vaste ensemble de rapports, et de lier, à de grandes distances, le présent au passé. Ils aperçoivent des faits, ils en cherchent la cause, mais trop près d'eux; spectateurs des tempêtes qui agitent la société, du flux et reflux des événemens dont se compose son histoire, ils expliquent chaque vague par la vague qui la presse immédiatement, au lieu de remonter d'abord à l'impulsion qui les produit toutes. C'est ainsi qu'on a sérieusement attribué la Réforme du seizième siècle à la jalousie d'un moine, et la révolution française à un déficit de quelques millions dans les finances.

Il faut le dire, car on ne le saura jamais assez, toutsort des doctrines; les mœurs, la littérature, les constitutions, les lois, la félicité des États et leurs désastres, la civilisation, la barbarie, et ces crises effrayantes qui emportent les peuples ou qui les renouvellent, selon qu'il reste en eux plus ou moins de vie.

L'homme n'agit que parce qu'il croit, et les hommes en masse agissent toujours conformément à ce qu'ils croient, parce que les passions de la multitude sont elles-mêmes déterminées par ses

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