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sa langue, comme quelques monstres lui empruntèrent ses fureurs.

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« Si le monde, avoit dit Voltaire, étoit gou» verné par des athées, il vaudroit autant être sous l'empire immédiat de ces êtres infernaux qu'on >> nous peint acharnés contre leurs victimes (1). » Des athées gouvernèrent la France, et, dans l'espace de quelques mois, ils y accumulèrent plus de ruines qu'une armée de Tartares n'en auroit pu laisser en Europe pendant dix années d'invasion. Jamais, depuis l'origine du monde, une telle puissance de destruction n'avoit été donnée à l'homme. Dans les révolutions ordinaires, le pouvoir se déplace, mais descend peu. Il n'en fut pas ainsi quand l'athéisme triompha. Comme s'il eût fallu que, sous l'empire exclusif de l'homme, tout portât un caractère particulier d'abjection, la force, fuyant les nobles et hautes parties du corps social, se précipita entre les mains de ses plus vils membres, et leur orgueil, que tout offensoit, n'épargna rien. Ils ne pardonnèrent ni à la naissance, parce qu'ils étoient sortis de la boue; ni aux richesses, parce qu'ils les avoient long-temps enviées; ni aux talens, parce que la nature les leur avoit tous refusés; à la science, parce qu'ils se sentoient profondément ignorans; ni à la vertu, parce qu'ils étoient couverts de crimes; ni enfin au crime même, lorsqu'il annonça quelque espèce de supériorité. En

(1) Homél, sur l'athéisme.

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treprendre de tout ramener à leur niveau, c'étoit s'engager à tout anéantir. Aussi, dès lors, gouverner, ce fut proscrire, confisquer, et proscrire encore. On organisa la mort dans chaque bourgade; et, achevant avec des décrets ce qu'on avoit commencé avec des poignards, on voua des classes entières de citoyens à l'extermination; on ébranla par le divorce le fondement de la famille; on attaqua le principe même de la population, en accordant des encouragemens publics au libertinage (*).

Cependant la haine de l'ordre, trop à l'étroit sur ce vaste théâtre de destruction, franchit les frontières, et alla menacer sur leur trône tous les souverains de l'Europe. L'athéisme eut ses apôtres, et l'anarchie ses Séides. La guerre redevenant ce qu'elle est chez les sauvages, on arrêta de ne faire aucun prisonnier. L'honneur du soldat frémit, et repoussa cet ordre barbare. Mais, hors des camps, l'enfance même ne put désarmer la rage, ni attendrir les bourreaux. Je me lasse de rappeler tant d'inexpiables horreurs. La France, couverte de débris, offroit l'image d'un immense cimetière, quand, chose étonnante! voilà qu'au milieu de ces ruines, les princes mêmes du désordre, saisis

(*) La sagesse des législateurs de 1793 jugea les filles publiques, ou, comme on les appeloit, les filles-mères, si utiles à l'Etat, qu'on proposa de leur assigner des pensions sur le trésor public. On voyoit sans doute en elles les prétresses de la raison; et, pour conserver la divinité, on s'occupoit de doter son culte.

d'une terreur soudaine, reculent épouvantés, comme si le spectre du néant leur eût apparu. Sentant qu'une force irrésistible les entraîne eux-mêmes au tombeau, leur orgueil fléchit tout à coup. Vaincus d'effroi, ils proclament en hâte l'existence de l'Etre suprême et l'immortalité de l'âme; et, debout sur le cadavre palpitant de la société, ils appellent à grands cris le Dieu qui seul peut la

ranimer.

Je m'arrête; qu'ajouterois-je à cet exemple éternellement mémorable? Le raisonnement, l'autorité, l'expérience s'accordent donc pour démontrer que la Divinité est le premier besoin des nations, la raison de leur existence, et que toute philosophie irréligieuse tend à détruire l'ordre social, le bonheur des peuples, et les peuples mêmes. Je prouverai maintenant que la Religion seule les conserve et les conduit au bonheur, en les établissant dans un état conforme à la nature de la société.

CHAPITRE XI.

Suite du même sujet.

ÉCOUTONS d'abord la sagesse antique : « L'igno» rance du vrai Dieu est pour les Etats la plus grande des calamités ; et qui renverse la Religion,

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>> renverse le fondement de toute société hu» maine (1). C'est la vérité même, que si Dieu n'a » pas présidé à l'établissement d'une cité, et qu'elle

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n'ait eu qu'un commencement humain, elle ne » peut échapper aux plus grands maux. Il faut donc » tâcher, par tous les moyens imaginables, d'imiter le régime primitif; et, nous confiant en ce qu'il » y a d'immortel dans l'homme, nous devons fon» der les maisons, ainsi que les Etats, en consacrant >> comme des lois les volontés de l'Intelligence suprême. Que si un Etat est fondé sur le vice, et gouverné par des gens qui foulent aux pieds la justice, il ne lui reste aucun moyen de salut (2). » «Les villes et les nations les plus attachées >> au culte divin ont toujours été les plus durables

>>

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(1) Plat., De Leg., lib. x.

(2) Ibid., tom. VIII, édit. bip., pag. 180, 181,

» et les plus sages; comme les siècles les plus religieux ont toujours été les plus distingués par le génie (1). »

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Ces maximes d'une haute raison appartiennent spécialement à l'école de Socrate, la moins corrompue des anciennes écoles de philosophie, parce qu'on y avoit mieux conservé, et en plus grand nombre, les traditions primitives.

Les philosophes mêmes, qui, de nos jours, se sont fait une triste gloire de combattre la Religion, n'en ont pas moins, pour la plupart, reconnu la nécessité, au risque de passer, avec trop de justice, pour de mauvais citoyens et des hommes pervers, en s'efforçant de détruire une institution éminemment utile et même indispensable, de leur aveu. Cherchez, dit Hume, un peuple sans Religion; » si vous le trouvez, soyez sûr qu'il ne diffère pas beaucoup des bêtes brutes (2). » J'ai déjà cité ce mot de Rousseau : « Jamais Etat ne fut fondé que

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la Religion ne lui servît de base (3). » La raison de cet homme et son cœur l'entraînoient vers le Christianisme, que son seul orgueil repoussoit, et il s'irritoit contre la Religion, par les mêmes motifs qui lui inspiroient pour la société civile cette profonde haine qu'on remarque dans ses écrits. Mais, sitôt que ses passions se calment, la vérité

(1) Xénophon, Memor. Socrat., I, 4, 16.
(2) Hist. nat. de la Rel., pag. 133.
(3) Contrat social, liv. IV, chap. VIII.

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