Obrázky na stránke
PDF
ePub

PREFACE.

J

E comptois publier ces Mémoires en France, & mes Amis m'affuroient que j'y obtiendrois fans peine l'Approbation qui eft néceffaire pour cet effet. On me flattoit même d'avoir tenu un jufte milieu entre cette adulation baffe & fervile qui donne de beaux noms à tout, & cette licence effrénée, qui fe plaît à attacher des foupçons & à donner un mauvais tour aux actions les plus innocentes. A Dieu ne plai

[ocr errors]

fe que je cherche jamais à mettre dans mon parti la malignité d'une certaine efpece de gens, & à me procurer auprès d'eux la dangereufe gloire de réüffir dans les Satires. Cependant il a paru fans doute que j'a vois encore été trop libre, puifqu'on Tome I.

m'a réduit à chercher en Hollande des I ibraires qui pûffent ou qui osasfent imprimer mon Ouvrage. Le Public jugera fi on a tort ou raison d'en agir de la forte. Pour moi, fans arrêter d'avantage fon attention fur un objet, qui la merite auffi peu que ce qui me regarde, je vais rendre. compte de ce qui regarde les Mémoires même.

LES Minoritez ont prefque toûjours été des tems de conteftation entre la Régence & les Parlemens, de furcharge des Peuples, de diffipation des Finances, d'entretien de Milices fuperfluës, de Troupes domeftiques, de Guerres étrangeres, de ruïne pour l'Agriculture & pour le Commerce, Alors les Particuliers cherchent à s'élever par les moyens qui les ruïneroient fous le regne d'un Souverain Majeur, c'eft-à-dire en fe faifant craindre du Miniftre, & en marchandant ave lui pour les fervices qu'ils fui doivent. Les Corps s'animent les uns les autres à redemander les droits & les priviléges qu'on leur avoit enlevez, & profitent fouvent de la confufion pour s'en faire attribuer de nouveaux. Les

[ocr errors]

Grands cabalent, les Petits s'intri guent avec eux, chacun ne parle que du bien public, & perfonne n'a en vûë que fes intérêts particuliers. Le Parlement même avec des intentions droites & pures eft fouvent le prétexte dés divifions qu'il voudroit apai fer. Enfin le Régent eft obligé, ou d'acheter d'une partie de fon autorité la confervation du refte, ou de recourir à des moyens violens, que la néceffité autorile & qui n'en paroiffent pas moins odieux. D'un autre côté, avec une nouvelle Régence on voit commencer une administration nou◄ velle. Autres Miniftres, plans différens, vûës opofées à celles du Régne précédent, autres liaisons au dehors, Ceux qui ont occupé les premiers rangs chaffés & oubliés. Ceux aufquels on ne fongeoit pas alors, tirez de l'obscurité & élevez fur les ruïnes de leurs prédéceffeurs. On peut dire en un mot que l'inconftance des cho fes humaines ne paroît nulle part autant que dans une Régence.

DE LA vient qu'on lit toûjours avec plaifir les hiftoires de ces tems agitez & tumultueux. C'eft ce qui

1716

me fait espérer un accueil favorable pour les Mémoires que je publie. Du moins on y verra une fcéne auffi variée que dans aucun autre livre qui roule fur un femblable fujet. £715 LES premiers feize mois de la Régence offrent l'image d'un Gouvernement fage équitable & pacifique. Le droit d'Examen & de Remontrance fut rendu au Parlément. On parla de le rétablir dans fa premiere fplendeur, en réduifant la quantité prodigieufe de fes Membres à un nombre, qui fut fuffifant pour examiner les affaires de fon reffort, & pour les expédier promptement. Lui-même ne fe manqua pas. 11 fçut réprimer les entreprifes orgueilleufes de ceux qui le méprifoient malà-propos, & qui prétendoient le forcer à lui rendre des honneurs aufquels ils n'avoient pas droit. Le Duc Régent établit divers Confeils pour les matiéres différentes du Gouvernement. I fuprima je ne 1çai combien d'impôts fuperflus, & de charges onéreufes au Peuple. Il donna fes foins à établir un Revenu de la Couronne, & que les Peuples

puffent payer volontiers, & qui ene trât en fon entier dans le Tréfor Royal. Je parle de la Taille propor tionnelle. Les troupes furent réduites à un nombre proportionné aux befoins, Loin de former de ces projets de Guerre, dont les Régences des Minoritez précédentes avoient fait un principe capital de Politique, pour occuper les Sujets inquiets, Son Alteffe Royale conclut une Alliance avec la Grande Bretagne & les Provinces-Unies, & ainfi furent diffipez les foupçons, que les Anglois avoient conçus peut-être avec juftice contre la France au fujet du Prétendant. Le repeuplement des Provinces, la culture des Terres, &* le rétablissement du Commerce, furent encore une de fes principales attentions. Plufieurs Financiers porfitant de la néceffité où Louis XIV. avoit été de recourir à leur pernicieuse adresse, s'étoient engraissez des miferes du Peuple, & avoient ruiné la Nation, fans enrichir le fouverain. Une Chambre de Justice vengea ceux que ces malheureux avoient oprimez, reftitua au Roi les fruits im * 3 る

« PredošláPokračovať »