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d'après sa conscience sans s'inquiéter de la vérité de ses décisions; mais les conséquences physiques fâcheuses qui résultent nécessai rement d'un acte mauvais exigent que nous prenions les moyens de rectifier notre conscience quand elle est mal éclairée.

24. Conséquences de l'action de la loi morale. Droits et devoirs. L'obligation de la loi morale se présente sous une double forme. En réglant la forme d'un acte elle ne le donne pas toujours comme nécessaire; quelquefois aussi elle le présente comme moralement possible. Tantôt elle dit : « Il faut faire cela »: c'est le devoir; tantôt elle dit: « On peut faire cela »; alors l'acte est licite. Et si elle ajoute: « Il ne faut pas aller au delà », elle limite le droit. Ainsi la loi morale trace tout à la fois le droit et le devoir. 25. Le droit. Le droit c'est la légitimité d'un acte. On peut user ou ne pas user de son droit; mais on ne peut pas l'outre

passer.

26. Le devoir. - Le devoir c'est l'obligation de faire un acte. 11 arrive souvent que l'on peut le dépasser, mais on ne peut jamais l'omettre.

27. Nature du droit et du devoir. Le devoir est une connexion morale entre un acte et son sujet, dans telles circonstances. Etant donné tel homme dans telles circonstances, il en résulte nécessairement qu'il doit faire tel acte. Il y a donc connexion morale entre le sujet et l'acte. Tel est le devoir.

Le droit est aussi une connexion morale, non plus entre le sujet et l'acte, mais entre le sujet et le pouvoir physique de faire cet acte. Etant donné tel homme dans telles circonstances, il s'ensuit nécessairement qu'il doit pouvoir faire tel acte. Il y a donc connexion morale, entre le sujet et le pouvoir de faire l'acte. C'est ainsi que tout le monde entend le droit,

28. Origine du droit. Pour qu'il y ait connexion morale entre le sujet d'un acte et le pouvoir de faire cet acte, en d'autres termes, pour qu'il soit moralement necessaire que tel homme ait le pouvoir de faire tel acte, il faut que tous les éléments de cet acte lui appartiennent. L'essence même des choses indique cette condition. En effet quelle connexion morale peut-on trouver entre un

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homme et le pouvoir d'agir sur ce qui appartient à un autre homme? Et de plus, quand tous les éléments d'un acte appartiennent à un homme, où pourrait-on voir qu'il n'est pas juste qu'il puisse faire cet acte? Done un homme a le droit de faire un acte, parceque les éléments de cet acte lui appartiennent et par cette seule raison.

Donc la propriété de tous les éléments d'un acte suffit pour engendrer le droit à faire cet acte, et seule cette propriété peut engendrer ce droit. Donc, en prenant le mot propriété dans le sens le plus général possible : l'origine du droit, la source du droit, c'est la propriété et uniquement la propriété.

Le droit se mesure donc à l'étendue de la propriété il ne doit ni être moindre, ni s'étendre au dela. Aussi le droit se trouve limité par les limites mêmes de la propriété; il est partagé dès que la propriété se partage; il périt dès que la propriété cesse.

Ce principe métaphysique et parfaitement déterminé nous servira, dans la seconde partie de la morale, à déterminer aussi les limites des droits, dans leurs différentes classes.

29. Origine du devoir. Pour qu'il y ait connexion morale entre le sujet et son acte, pour qu'un homme soit obligé de faire tel acte sous peine de pécher contre la loi morale, il faut que cet acte appartienne à un autre, il faut qu'un autre ait le droit d'exiger de lui cet acte. En sorte que tout devoir suppose un droit corrélatif.

Cette corrélation du devoir et du droit se voit très bien dans les devoirs de justice commutative, où celui qui est l'objet ou le terme du devoir a toujours le droit d'en réclamer l'accomplissement. Et si on voit moins cette corrélation dans les devoirs de justice distributive et dans les devoirs de charité, ce n'est pas que le droit n'existe pas, mais c'est que le sujet de ce droit n'est pas déterminé. Dans ce cas, c'est le genre humain ou la société, ou plutôt quelques membres indéterminés du genre humain ou de la société qui sont propriétaires de l'acte de l'autre. En sorte que celui-ci a bien le devoir d'aider ses semblables, mais aucun d'eux en particulier ne peut exiger de lui l'accomplissement de ce devoir; car il pourrépondre à chacun d'eux: Ce n'est pas à vous que je le dois; je puis donner à d'autres.

Donc encore l'origine du devoir c'est la propriété, mais ici elle est dans un ordre contraire. La propriété engendre le droit en faveur du propriétaire, et le devoir dans le sujet de l'acte qui est la propriété d'un autre. Ainsi tout acte qui est la propriété d'un autre engendre dans son sujet le devoir de l'accomplir.

30. Fausse idée de l'origine du droit. Quelques philosophes modernes ont cru trouver dans le devoir l'origine du droit, et ont avancé que l'homme n'a des droits que parcequ'il a des devoirs. C'est-à-dire qu'ayant des devoirs, il doit avoir le droit de les accomplir, et qu'il n'a pas d'autres droits.

Sans doute le devoir suppose le droit de l'accomplir, mais aller jusqu'à dire qu'il n'y a et ne peut y avoir d'autres droits que celui d'accomplir ses devoirs, c'est fausser la notion même des choses, c'est choquer le sens commun et se mettre en contradiction avec la conscience morale du genre humain. Car tous les hommes sont persuadés qu'ils ont le droit d'user de tout ce qui leur appartient, sans qu'ils aient pourtant le devoir d'user de tout. C'est encore une trés-fausse idée du droit que de dire, avec certains philosophes modernes : « Le droit, c'est la liberté de chacun prise pour fin par la liberté des autres ». (*) Car, comme rien ne détermine, ni ne limite la liberté de chacun, on ne peut pas savoir jusqu'où on la prendra pour fin. Et si c'est la liberté qui détermine le droit, qu'estce qui déterminera la liberté ?

Nous nous sommes cru obligé de relever cette définition et de la condamner d'autant plus qu'elle vient d'être enseignée récemment par un homme qui occupe en France une charge importante dans l'enseignement et dont le nom et le titre pourraient imposer au lecteur.

Pour la même raison nous Treléverons aussi en leur lieu les erreurs commises par le mème auteur, dans l'interprétation des paroles de la plupart des philosophes dont la doctrine est classique.

31. Du pouvoir comme conséquence du droit. Il suit de tout ce qui précède, comme d'ailleurs le sens commun le proclame, que le droit appelle, exige le pouvoir d'accomplir l'acte objet du droit. Dès qu'un homme a un droit, la loi de justice pro

(*) Alfred Fouillée, Histoire de la philosophie, p. 101.

clame qu'il doit avoir le pouvoir de l'exercer. En sorte que toute loi qui empêche ou même gêne l'exercice d'un droit est une loi tyrannique, injuste et par conséquent opposée à la loi morale, fondement de toutes les lois.

Mais d'un autre côté, si le droit réclame justement le pouvoir de faire l'acte auquel on a droit, il ne saurait réclamer rien de plus. Et comme les droits de chaque homme, engendrés par sa propriété, sont limités par les droits de ses semblables, comme leurs propriétés limitent la sienne, il s'ensuit que tout pouvoir qui s'étend au delà des droits de celui qui le possède, est une menace pour les droits des autres. En sorte que toute loi qui donne à un homme des pouvoirs plus étendus que ses droits est à son tour une loi tyrannique et injuste, qui lèse les droits des autres hommes.

Ce sont là deux principes incontestables et profondément lumineux qui peuvent servir à juger la moralité de toutes les lois particulières.

ARTICLE 4

EXISTENCE DE LA LOI MORALE.

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32. Comment se prouve l'existence de la loi morale. De même que la nature de la loi morale ne peut être connue par l'examen des actes humains, qui peuvent ne pas s'y conformer, de même, ce n'est pas par l'examen de ces actes, que nous pouvons savoir si cette loi, telle que nous l'avons conçue, existe réellement, comme règle des actes humains. C'est donc à la conscience et à la raison qu'il faut demander si la loi morale existe.

33. Preuves. L'existence de la loi morale est attestée par la conscience individuelle, par la conscience universelle et par la raison.

1o. Tout homme sait distinguer le bien du mal; il sait qu'il doit faire le bien et éviter le mal; il sait qu'en toute circonstance il doit agir selon une règle propre à cette circonstance; il se blâme lui-même quand il a mal agi, et il se réjouit quand il a agi conformément à cette loi. Il sait de plus que la loi du bien est audessus de tous les autres motifs de détermination. Tout homme sait distinguer le juste et l'injuste. Il approuve la justice, et les actions

injustes le révoltent. Donc tout homme a conscience de l'existence de la loi morale et se croit tenu de s'y conformer.

2o. Chez tous les peuples on distingue le juste et l'injuste, le bien et le mal; on loue les bonnes actions, on blâme et on punit les mauvaises; on se croit tenu de respecter les droits des autres, mais on tient à faire respecter les siens propres. Ce jugement est universel; il est de tous les temps et de tous les lieux. Done la conscience universelle atteste l'existence de la loi morale.

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3. La raison, d'accord avec la conscience, déclare que la loi morale existe nécessairement, dès qu'il y a des actes libres. Elle déclare que tout acte libre a une fin en rapport avec ses autres éléments, et que le détourner de sa fin, c'est engendrer un monstre moral, mille fois plus hideux que les monstres physiques. Elle va plus loin dans la plupart des cas, elle détermine elle-même la loi d'un acte, et déclare que cette loi est essentielle à cet acte, et que l'homme est obligé de la suivre. Par exemple, la raison ne comprend pas qu'il puisse jamais être permis à une créature de mépriser son Créateur. Elle déclare que les rapports naturels qui existent entre un père et ses enfants sont tels, que le fils ne saurait sans crime manquer de respect à son père. Elle déclare enfin que Dieu, qui est parfait, ne peut vouloir que l'homme transgresse la loi morale. C'est ainsi que la raison en atteste l'existence.

34. Connaissance de la loi morale. Ainsi la loi morale existe; les hommes le savent ; ils connaissent cette loi et même avec assez de détails pour se diriger dans leurs actes. Sans cette connaissance la loi ne saurait obliger, et dès lors ce serait comme si elle n'existait pas. Aussi Dieu en créant l'homme intelligent et libre, ne l'a pas laissé dans l'incertitude à ce sujet. Il a gravé au fond de notre âme l'idée du bien, et par là l'idée du droit et du devoir; en un mot: l'idée de la loi et de son obligation.

ARTICLE 5

ORIGINE DE LA LOI MORALE

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35. Double origine. Les lois morales qui régissent les actes libres des hommes ont une double origine. Les unes prennent

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