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de la philosophie. Nous ferons notre possible pour éviter ce défaut; mais, comme nous ne sommes pas infaillible, on voudra bien ne pas attribuer à la mauvaise foi les erreurs de ce genre qui pourront nous échapper. Nous tenons au contraire pour certain, que les systèmes même les plus erronés sont, dans la pensée de leur auteur, beaucoup plus près de la vérité qu'ils ne le paraissent dans l'expression, et que de plus, c'est toujours la vue d'une vérité qui, exagérée, engendre l'erreur. C'est ainsi que plus d'une fois nous avons déjà fait voir que la contradiction entre plusieurs théories classiques était plus apparente que réelle et qu'en se plaçant au vrai point de vue on peut les trouver toutes les deux vraies par exemple, la théorie des idées innées et celle de la table rase. Nous voudrions pouvoir ainsi faire voir ce qu'il y a de vrai dans chacune des doctrines que nous serons obligé de condamner, mais l'espace ne nous le permettra pas toujours.

Enfin un dernier embarras de l'historien de la philosophie, c'est le choix qu'il doit faire des auteurs dont il exposera les doctrines, et de ceux dont il ne dira rien. Il est vrai que les philosophes les plus connus s'imposent par leur renommée et par l'importancee de leurs théories. Mais où s'arrêter dans le grand nombre des autres? Sur ce point nous essayerons d'être aussi complet que possible sans tomber dans l'inutilité.

Le troisième objet de l'histoire de la philosophie, l'appréciation des doctrines, présente une difficulté insurmontable et comme une série d'erreurs nécessaires à celui qui n'a pas une doctrine toute faite et certainement vraie. Il est facile de voir en effet que l'historien de la philosophie ne peut juger les théories qu'il expose qu'en les comparant avec celles qu'il a adoptées pour lui-même. Si donc il n'a pas de théorie à lui, il ne pourra que se contredire à chaque pas; et si sa théorie n'est pas certaine, comment pourra-t-il être certain de la justesse de ses appréciations? Pour ce point, notre plus solide garantie est que nous suivons en tout la philosophie classique, et que par là nous sommes certains de ne pas errer, en exigeant, pour les déclarer vraies, que toutes les théories concordent avec les

nôtrés.

4. Importance de cette étude. Dans la lecture d'une doc

trine on est toujours exposé à ne voir qu'une partie de la vérité et à l'adopter avec exclusion. Le meilleur moyen de rectifier les erreurs de ce genre dans lesquelles on est presque nécessairement tombé en étudiant un traité de philosophie, c'est de considérer les mêmes doctrines à d'autres points de vue. Or c'est justement l'avantage qu'offre l'histoire de la philosophie.

De plus, tout homme qui s'occupe de philosophie peut etre appelé à apporter plus tard une nouvelle pierre à l'édifice de cette science. Il s'en rendra capable par la critique des théories qu'il a étudiées et admises jusque là, et rien n'est plus propre à lui faciliter cette critique que l'examen de cette critique perpétuelle qui se fait dans le genre humain par tous les philosophes. Souvent une théorie nouvelle, même erronée, lui sera un trait de lumière pour voir plus loin dans le domaine de la vérité.

L'histoire de la philosophie est donc pour chacun un correctif presque nécessaire et un principe de dévéloppement pour la science elle-même. Son but n'est donc pas de satisfaire une vaine curiosité, mais bien de corriger et de faire progresser la philosophie ellemême. Et pour nous, qui ne voulons suivre que la philosophie classique, l'histoire de la philosophie nous offre cet avantage que nous saurons par elle, d'une manière certaine, quelles sont les doctrines qu'il faut considérer comme classiques.

5. Ordre à suivre. On peut suivre dans l'histoire de la philosophie trois ordres différents. 1° Présenter successivement les différentes questions que traite la philosophie, et voir comment les ont traitées les différents auteurs qui se sont succédé dans le monde. C'est l'ordre systématique. 2o Classer les philosophes selon les différentes écoles auxquelles ils appartiennent, et présenter successivement chacune de ces écoles, en faisant connaître les hommes qui en ont fait partie et les doctrines qu'ils ont émises ou adoptées. C'est l'ordre d'écoles. 3° Classer les philosophes d'après le temps où ils ont vécu et les présenter chacun en leur temps, sauf à les rattacher indirectement à leurs écoles. C'est l'ordre chronologique.

Nous avons déjà exécuté en partie le premier plan dans le cours de l'ouvrage, en ce que dans les grandes questions nous avons

montré par ordre de dates les doctrines des principaux philosophes. Le troisième plan jetterait trop de confusion dans les idées, et ne laisserait pas assez voir l'enchaînement des théories d'une même école.

Le second plan est donc le seul que l'on puisse suivre, et de fait, c'est celui que l'on a toujours suivi. Cependant, comme il y a avantage à les avoir tous les trois, nons avons donné le premier en abrégé et nous donnerons le troisième à la fin, sous forme de tableau.

6. Division. Nous distinguerons donc l'histoire de la philosophie en trois périodes: 1o philosophie ancienne; 2o philosophie du moyen-age; 3o philosophie moderne. La première période comprend tous les temps qui ont précédé la venue de Jésus-Christ, et la philosophie païenne des siècles suivants jusqu'à la fin des écoles grecques. La deuxième période comprendra la philosophie chrétienne jusqu'au moyen-age proprement dit et toute la philosophie du moyen-âge. La troisième embrassera toutes les écoles qui ont paru depuis Bacon jusqu'à nos jours.

Dans chaque période nous distinguerons d'abord les différents peuples, et dans chaque peuple, s'il y a lieu, différentes époques. Enfin nous subdiviserons encore ces parties secondaires par les différentes écoles qui les remplissent, et dans chaque école, nous attribuerons autant que possible à chaque homme ce qui lui appartient, après avoir fait connaître l'homme lui-même.

1r. PÉRIODE

PHILOSOPHIE ANCIENNE

7. Cette période commence aux temps primitifs de la philosophie, autant que les documents que nous en avons nous permettent d'en parler, et va jusqu'à la fin des écoles grecques, au III siècle après J.-C.

Elle comprend la philosophie: des Hébreux, des Chaldéens, des Phéniciens, des Egyptiens, des Perses, des Indiens, des Chinois, des Celtes, des Grecs et des Romains.

PHILOSOPHIE DES HÉBREUX

8. Observation préliminaire. On s'accorde généralement à ne voir chez les Juifs aucune philosophie, si ce n'est dans les sectes qui parurent vers les temps de Jésus-Christ, et, considé rant avec raison la Bible comme un livre révélé, et plutôt religieux que rationnel, on croit que ce peuple n'eut pas de philosophie classique.

Mais, de même que nous chrétiens, nous ne nous sentons nullement gênés dans l'exercice de notre raison par les données de la Foi, et comme nous sommes convaincus que l'on peut être tout à la fois fervent chrétien et profond philosophe, nous n'hésitons pas à penser que les Juifs, tout en s'attachant par la foi aux doctrines révélées de la Bible, surent employer la raison et l'observation comme nous le faisons nous-mêmes; car la philosophie est dans la nature de l'homme, et elle va d'autant plus sûrement à son but qu'elle le connaît déjà d'ailleurs. Et nous trouvons dans la Bible même la preuve de cet esprit philosophique des Juifs.

Sans doute, la Bible présente surtout les vérités comme affirmées par Dieu; mais on y voit aussi les hommes présentant les raisons de leur foi, ou démontrant par la raison seule certaines vérités d'ailleurs affirmées par la foi, et Dieu, lui-même consentant à philosopher avec les hommes et leur montrant que leur propre raison s'accorde avec ses enseignements.

De plus les doctrines renfermées dans la Bible sont la base de toute la philosophie classique ; elles contiennent non seulement en germe, mais souvent d'une manière très explicite les doctrines de la philosophie classique.

Pour toutes ces raisons il nous semble convenable de consacrer à la philosophie des Juifs, autre chose que quelques lignes, pour montrer uniquement les aberrations de quelques-uns d'entre eux, qui se sont écartés des doctrines révélées écrites ou transmises par tradition.

Quelles raisons a-t-on d'en agir ainsi? Serait-ce que la philosophie est essentiellement opposée à la foi ? Nous pensons tout le contraire. La Foi est certaine : elle vient de Dieu : elle est donc vraie et aucune doctrine certaine ne peut lui être opposée. C'est

pour cela qu'en faisant de la philosophie, a l'aide de nos seules lumières naturelles, nons ne perdons jamais de vue les données de la foi. On a beaucoup vanté le prétendu affranchissement de la raison par la philosophie moderne. Pour nous, nous avouons n'avoir pas encore vu où était l'esclavage de la raison avant cette prétendue réforme, et l'histoire de la philosophie nous montre que, loin de nous avoir apporté de grandes découvertes philosophiques, ceux qui à dessein se sont tenus loin des lumières de la foi, ont fini par tomber dans l'absurde, c'est-à-dire par perdre le bon emploi de la raison.

Donc, nous allons exposer d'abord la philosophie de la Bible, qui est la philosophie classique des Hébreux. Toutefois nous n'en donnerons qu'un rapide aperçu.

9. Philosophie de la Bible. Ce dépôt de la révélation, le livre sacré des Juifs et des Chrétiens, renferme la plupart des données philosophiques, et plusieurs y sont présentées sous une forme raisonnée.

On y trouve très-nettement exprimée la distinction de l'âme et du corps, et comme chez tous les autres peuples le mot qui sert à désigner l'âme (NPHSCH) signifie matériellement souffle, comme en Grec, u, que lon dirait tiré du mot hébreu, et vεμa, et comme en latin les mots anima (de aveμos) et spiritus. On y voit encore très-nettement l'idée de l'intelligence, de la sensibilité et de la volonté libre. Tout cela est exprimé dès les premières pages. Dieu défend à Adam et à Eve de manger du fruit de l'arbre de la science du bien et du mal : c'est donc qu'il les déclare intelligents et libres. Mais Eve voit que le fruit est beau et agréable et elle se laisse entraîner par l'attrait du plaisir, comme aussi par le sentiment d'orgueil de devenir comme Dieu.

Plus loin Dieu dit à Caïn: Nonne si bene egeris, recipies: sin autem male, statim in foribus peccatum aderit? Sed sub te erit appetitus eius, et tu dominaberis illius. (Gen. c. 3.) Ici toutes les facultés de l'âme sont nettement exprimées: intelligence, sensibilité et liberté. On voit l'attrait du sentiment, appetitus ; mais la volonté est libre; elle peut le dominer. On y voit même la raison affirmée comme connaissant d'elle même le bien et le mal, et

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