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pouvant par lui-même tout étudier, il demande aux autres hommes la communication de ce qu'ils savent.

Voilà la raison et le mobile de l'étude.

Mais si la connaissance des objets qui lui sont inférieurs intéresse l'homme à un si haut degré, doit-il rester indifférent à la connaissance de lui-même? S'il trouve tant de sujets d'admiration dans des phénomènes passagers, qui se produisent sous ses yeux, ou sans lui, ou par lui, combien doit lui paraître plus admirable celui qui a créé toutes ces choses, et qui l'a créé lui-même? Car qui, pourrait à la vue d'une œuvre aussi merveilleuse ne pas se dire: Si les œuvres sont si belles, quelle doit être l'intelligence, quelle doit être la puissance de l'ouvrier? Aussi, l'homme qui admire les harmonies ineffables des êtres de la nature, qui ne le connaissent pas, veut se connaître lui-même, qui les connaît; il veut surtout en connaître l'Auteur. Et ce désir entraîne l'homme vers la plus sublime de toutes les sciences, vers la philosophic.

Mais au seuil même de cette étude, un obstacle l'arrête.

Quand il a voulu connaître les corps, il n'a eu qu'à les observer attentivement, car ses sens les lui manifestaient ; mais comment fera-t-il pour étudier en lui-même ce quelque chose d'insaisissable qui dit : moi; son âme qui ne se voit ni ne se touche? Comment fera-t-il pour étudier le Créateur dont il voit bien les œuvres, mais qu'il ne voit pas lui-même.

C'est cette condition de l'homme, vis-à-vis des étades philosophiques, qui jeta dans l'errear les premiers philosophes, Thalès, Pythagore, et leurs disciples. Ne voyant pas la cause de l'Univers et ne sachant comment la découvrir, ils la supposèrent et s'égarérent pendant deux siècles dans des hypothèses contradictoires.

Leur insuccès rendit plus circonspects ceux qui vinrent après eux. Socrate se contenta de ramener la philosophie à l'étude de l'homme. Ses disciples, Platon, Aristote, Epicure et Zénon, quoique prenant des routes opposées, comprirent que la philosophie a besoin d'une méthode et ils essayèrent de tracer les lois de la connaissance en général. Aristote réussit mieux que les autres dans cette voie, et sa logique, quoique incomplète, est restée, non pas inattaquée, mais inattaquable.

Toutefois, dans l'application, on se trompa encore bien des fois,

dans les siècles suivants, et bien des fois encore l'instrument de la philosophie fut remis en cause.

Quant à nous, éclairés par les efforts et même par les erreurs de ceux qui nous ont précédés dans la voie que nous entreprenons de parcourir, nous distinguerons plus facilement les vrais sentiers.

Aussi, avant d'aborder la science des esprits, nous allons jeter un rapide coup d'œil sur la science en général; nous la prendrons à son germe; nous la verrons se développer et s'étendre à tous les objets qu'elle peut atteindre. Nous pourrons ainsi en examiner les bases et, quand nous en aurons reconnu la solidité, nous pourrons avancer avec une sécurité parfaite.

Ce travail nous permettra de nous faire une idée exacte de la philosophie, car nous verrons la place qu'elle occupe parmi les sciences.

De l'idée nette et précise de la philosophie, nous tirerons la division la plus naturelle de cette science et le plan de notre ouvrage.

1. DE LA SCIENCE EN GÉNÉRAL

1. Idée première de la science. La Science selon la première idée que ce mot offre à notre esprit, est le dernier développement de ce que nous appelons en général la connaissance.

2. Connaissance. Toutes les fois que nous sommes informés d'un objet quelconque, de ses qualités, ou simplement de son existence, nous disons que nous connaissons cet objet, ses qualités ou son existence.

3. Connaissance actuelle.

Tant que dure l'information

d'un objet, la connaissance est actuelle.

Mais quand cette information a cessé, il nous reste souvent le pouvoir de le faire revenir, et dans ce cas, lors même que nous ne

pensons pas à cet objet, on peut dire encore que nous le connaissons: c'est la connaissance habituelle.

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tuelle, même au moment où nous ne pensons pas à un objet, quand nous avons le pouvoir de nous en informer, sans le secours de l'objet.

C'est là le sens le plus ordinaire du mot connaissance.

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5. Connaissance proprement dite. On appelle proprement connaissance une disposition (ou habitude) par laquelle nous pouvons de nous-mêmes nous informer d'un objet sans qu'il soit présent.

Ex.: Paul connaît la géométrie. Je ne dis pas par là qu'il y pense, mais qu'il peut de lui même y penser.

6. Objets de la connaissance.

Tout ce qui est et tout ce

qui peut être est l'objet de la connaissance. Mais :

7. Objets divers. Nous ne connaissons directement que ce qui se manifeste à nous, et même que les manifestations elles

mêmes.

Nous voyons rouge, noir, blanc, etc.; grand, petit, long, carré, etc.; mobile, immobile, etc.; nous touchons: dur, mou, solide, liquide, chaud, froid, grand, petit, etc. Ce sont là des manifestations.

8. Phénomènes. On appelle phénomènes toutes les manifestations des êtres. Les phénomènes sont les seuls objets directs de notre connaissance.

9. Objets indirects. Tandis que nous ne percevons que des phénomènes, notre esprit se porte de lui-même et nécessairement sur les êtres que ces phénomènes nous manifestent.

Quand nous voyons rouge, noir ou blanc nous pensons aussitôt à quelque chose de rouge, quelque chose de noir, quelque chose de blanc.

Ce quelque chose c'est l'être manifesté par les phénomènes.

10. Substance. On donne le nom de substance à l'être qui nous est manifesté par les phénomènes.

Elle est l'objet indirect de notre connaissance, c'est à elle que nous attribuons tous les phénomènes.

Nous disons: c'est blanc, c'est dur, c'est mou, c'est chaud, ete.

Le pronom ce signifie cet étre ou cette substance.

11. Rapports.- En réfléchissant aux objets que nous connaissons nous comprenons bientôt, que si tel objet se montre à nous rouge, tandis qu'un autre se montre blanc, il y a là deux actions différentes de ces objets sur nous, et par suite deux rapports différents avec nous. Nous disons alors que les substances qui se montrent à nous avec des phénomènes différents sont avec nous dans des rapports différents.

12. Propriétés. Mais si les substances sont avec nous dans des rapports différents, tandis que nous ne changeons pas, c'est qu'elles different entre elles; si elles agissent différemment sur nous, c'est qu'elles peuvent agir ainsi, c'est qu'elles ont des propriétés différentes.

Dès lors nous concevons dans les substances ces propriétés qui diffèrent entre elles comme leurs phénomènes.

13. Résumé.- Ainsi les substances ont des propriétés diffé rentes qui les mettent avec nous dans des rapports différents, ce qui fait qu'elles agissent sur nous diversement, et ces actions diverses sur nous sont des phénomènes différents qui nous les font connaître et distinguer.

Donc le premier degré de la connaissance est la perception d'un phénomène.

Le second degré qui accompagne nécessairement pour nous le premier, c'est la conception de l'être ou substance que ce phénomè ne nous manifeste.

Le troisième degré est la conception des propriétés diverses des substances, comme cause de leurs différents rapports avec nous, et par suite la distinction des différents êtres.

Arrivés à ce point nous pouvons conclure que les phénomènes des substances sont différents, que leurs propriétés sont différentes. Mais rien ne nous dit si les substances diffèrent en elles-mêmes.

14. Connaissance certaine ou incertaine.- La connaissance d'un objet est certaine quand nous savons que l'objet ne peut être autrement que nous ne le connaissons. Quand cette condition manque, la connaissance est incertaine.

S'il s'agissait seulement de la connaissance actuelle, cette condition serait facile à réaliser, car l'objet qui est tel actuellement, ne peut pas en même temps être autrement.

Mais la connaissance étant surtout la connaissance habituelle, elle ne peut être certaine que lorsque l'objet en est invariable.

En effet, je ne puis pas dire que je connais comme rouge, un objet qui peut être rouge aujourd'hui et blanc demain.

15. Objets de la connaissance certaine. La connaissance certaine ne peut porter que sur des objets invariables.

Or, les phénomènes des êtres ne sont pas toujours les mêmes; leurs propriétés varient donc avec eux; leurs rapports avec nous et entre eux ne sont done pas toujours les mêmes.

Quel peut donc être l'objet de la connaissance certaine.

16. Lois.- Si les phénomènes des êtres varient avec leurs propriétés et leurs rapports mutuels, il y a quelque chose qui ne change pas.

Ce qui ne change pas c'est la règle de la production des phénomènes.

La règle des phénomènes consiste en ce que, les mêmes propriétés ne peuvent produire que le même phénomène, et réciproquement que le même phénomène est toujours produit par les mêmes propriétés.

Cette règle des phénomènes constitue une loi universelle, qui se subdivise en autant de lois particulières qu'il y a de combinaisons possibles entre toutes les différentes propriétés.

Et ces lois particulières sont aussi invariables que la loi universelle.

:

Ainsi, tandis que la loi universelle dit le même concours de propriétés ne peut produire que le même phénomène; une lvi particulière dit: tel concours de propriétés ne peut produire que tel phénomène.

Les lois sont donc l'objet de la connaissance certainė.

17. Science. Nous avons dit que la science est le dernier développement de la connaissance. La connaissance certaine est plus parfaite que la connaissance incertaine. D'ailleurs, les lois des êtres sont ce que nous pouvons connaître de plus profond dans les

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