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chalouppe affez grande pour les porter, avec des fommes d'argent confiderables qui leur ref tolent. Ils devoient mettre le lendemain à la voile, quand le Roy du païs, qui eut quelque foupçon de ce qui fe paffoit,leur envoya demander leur chalouppe, qu'il trouvoit, difoit-il, fort à fon gré. Ce n'eftoit vifiblement qu'un prétexte pour les arrefter, & pour fe rendre maiftre de leur argent. Les Eu ropéans, qui se trouverent alors › affemblez dans une cabane, fur le bord de la mer, tinrent confeil, & furent tous d'avis de refufer le Roy de Mayote le plus honneftement qu'ils pourroient. Ils virent bien qu'aprés cette? Che on ne chercheroit qu'à les perdre, & qu'ainfi il falloit qu'ils fe tinffent fur leurs ; gardes plus que jamais. Mais les

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Barbares qui s'eftoient aperçus
que la poudre leur manquoit,
parce qu'ils n'alloient plus à la
chaffe, les environnerent en fou-.
le, & les attaquerent avec furie
dans leur cabane, où ils fe dé-
fendirent long-temps. Comme
elle n'eftoit environnée
que de-
groffes nattes, & qu'elle n'ef-
toit couverte que de paille &.
d'écorces d'arbres, les Barbares
Y mirent aisément le feu, & y
brulerent la plufpart de ces mi-
ferables. Ceux qui échapérent
à demi grillez, ne furent pas.
plus heureux, car on les mit
brutalement à mort. Ainfi de
toute cette troupe il ne refta
que trois Anglois, qui fe tin-
rent cachez jufqu'à ce que
fureur du combat & du carna-
ge fuft paffée. On eut pitié
d'eux, & on leur donna un pe-
tit canot avec quatre hommes,

·la

&

les

qui les menerent à Angafie. Ces pauvres gens y furent bien receus par le Roy de la partie Occidentale de l'Ifle où on les débarqua. Il les entretint d'abord à fes dépens; mais s'eftant bien-toft laflé de cette holpitalité, il les laiffa chercher de quoy vivre comme ils pour-roient. Pendant une année & demie ils fe nourrirent de fruit de coco, & du lait qu'ils tiroient des Vaches,quand ils pouvoient les trouver à l'écart; aprés quoi un des trois ne pouvant pas fouftenir plus long-temps une fi grande difette, tomba malade & mourut. Ses deux Compagnons fe mirent en devoir de l'enterrer; mais comme fi la terre euft dû eftre profanée par la fépulture d'un European, les habitans d'Angafie ne vou-lurent pas le leur permettre, &

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les obligerent de le jetter dans la mer. Voilà ce que nous ap-. prifmes de ces deux Anglois, qui raconterent leurs difgraces aux Officiers de noftre vaiffeau. Ils eftoient fur le rivage de BI le d'Angafie, quand noftre chalouppe y aborda; ils ne dirent rien, jufqu'à ce que la voyant fe remettre en mer, ils fe jetterent à la nage, & firent tant d'efforts, toujours crians qu'on: les attendift qu'enfin ils l'at Iteignirent. On les receut, & on les mena à bord, où ayant compaffion de ce qu'ils avoient fouf. fert & de l'état pitoyable où ils. eftoient encore; chacun se fit un devoir de les foulager & de leur donner des vivres & des habits. Quand nous fufmes arrivez à Surate, le plus âgé fe reti rachez les Anglois; l'autre ayant déclaré que fon pere eftoit Hol

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landois, quoyqu'il fuft établi à: Bafton, alla loger chez les Hol landois.

Depuis Angafie jufqu'à Surate nous eufmes beaucoup de mala des, qui ne manquerent pas de fecours. Le Pere Petit mon com >pagnon demeurant affidument auprés d'eux à les fervir, & à leur infpirer des fentimens pro-. pres de l'eftat où chacun fe trouvoit, il ne fut pas long-temps fans eftre attaqué lui mefme d'une fiévre tres - maligne. It m'édifia par fa refignation & par fa patience dans la maladie, autant qu'il avoit fait auprés des malades par fon courage & par fa charité. A ces dernieres maladies prés, qui nous emporterent fept ou huit perfonnes, nous fifmes la plus heureuse navigation & la plus tranquille en tout fens 5 dont j'aye jamais.

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