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agissante, de sa vie souffrante, de sa vie glorieuse; et dans chacun de ces mystères elle trouve de quoi s'instruire, et sur quoi se former. De l'un elle apprend l'humilité, de l'autre la pauvreté, d'un autre l'obéissance, de celui-là le mépris et la fuite du monde, de celui-ci l'amour du prochain et la charité. Tellement que de vertu en vertu, comme de degré en degré, elle s'avance jusqu'à ce pur amour de Dieu par où elle finit, et qui est l'accomplissement de toute justice.

Voilà le plan de cette retraite, et la liaison des sujets qui la composent. C'est à saint Ignace, fondateur de la compagnie de Jésus, que nous sommes redevables de cette excellente méthode; ou plutôt, c'est à Dieu que nous la devons, puisque c'est de Dieu qu'il l'avoit reçue lui-même. Les personnes religieuses trouveront ici cet avantage, que chaque sujet y est traité d'une manière con forme à leur état. Ce n'est pas que les autres retraites qui ont paru jusqu'à présent et qui n'ont rien de particulier à l'état religieux, ne puissent d'ailleurs leur être utiles: mais après tout, comme la religion leur impose des devoirs propres, et les engage à des observances plus étroites et plus parfaites, on ne peut douter qu'une retraite et des méditations spécialement à leur usage, ne leur soient encore beaucoup plus convenables et plus profitables.

Ce n'est pas non plus que les personnes engagées dans le monde ne puissent tirer du fruit de ces méditations, ni que cette retraite ne leur convienne en aucune sorte. Les vérités du christianisme sont toujours les mêmes dans le fond, et pour tous les états. Il n'y a de différence que dans l'application, et chacun peut se la faire à soi-même selon la situation présente et la disposition de sa vie. A quoi l'on peut ajouter, qu'au milieu même du monde il y a un grand nombre d'âmes vertueuses, qui plus régulières et plus ferventes que le commun des chrétiens, pratiquent la plupart des exercices de la profession religicuse, et se proposent d'en acquérir, autant qu'il leur est possible, ou d'en imiter la perfection.

Mais malgré les avantages de la retraite, on est du reste obligé de reconnoître qu'elle devient quelquefois assez infructueuse, et qu'on n'en voit pas tous les bons effets qu'elle est capable de produire. La raison est que nous n'y apportons pas toute la préparation nécessaire, ou de l'esprit, ou du cœur. Car suivant les règles ordinaires, Dieu n'agit en nous qu'autant que le cœur et l'esprit sont bien disposés ; et c'est pour cela que l'Écriture nous avertit, avant que d'aller à l'oraison, de rentrer en nous-mêmes et de préparer notre âme.

Le point le plus essentiel de cette préparation,

et celui qui renferme tous les autres ou dont ils dépendent, est une intention droite et une vraie volonté d'apprendre à se bien connoître, et de travailler de bonne foi à se renouveler selon Dieu, et à se perfectionner. Sans cela il y a peu à compter sur une retraite; et hors quelques sentimens de piété qui passent et qui ne vont à rien, on en sort tel qu'on y est entré. Si vous cherchez le Seigneur, cherchez-le. Cette expression du prophète nous donne assez à entendre combien nous devons nous défier de nos prétendues bonnes volontés, et que rien n'est plus sujet à l'illusion. Souvent on cherche Dieu, ou l'on se flatte de le chercher, quoiqu'on ne le cherche pas véritablement; et souvent on pense vouloir être à lui, lorsqu'en effet on ne le veut pas.

Cet avis est général ; mais il ne faut pas craindre de dire que là-dessus on est encore plus exposé à se tromper soi-même dans les maisons religieuses, que parmi les gens du monde. Car quand un homme, une femme du monde se dérobent à leurs affaires temporelles, et viennent à certains temps se retirer dans la solitude, il n'y a guère lieu de croire qu'ils n'y soient pas conduits par l'esprit de Dieu et par la seule vue de leur salut, puisqu'ils n'ont ni règle, ni devoir indispensable, ni aucune considération humaine qui les y gent. Mais il n'en est pas de même à l'égard d'une

obli

communauté religieuse, où l'usage de la retraite est établi. C'est une observance dont on n'est pas maître de s'exempter; ou c'est au moins une coutume, à laquelle on ne sauroit manquer sans une espèce de scandale. D'où il arrive plus aisément, que le motif des retraites qu'on fait, soit autánt la nécessité, la bienséance, l'exemple, qu'un désir sincère de changer et de se réformer.

On ne peut donc trop s'éprouver avant la retraite, ni trop s'exciter à ce désir solide d'un saint renouvellement de soi-même. Assez de réflexions se présentent, dont chacune est capable de l'allumer. Le peu de bien qu'on a fait, celui qu'il y a dans la suite à faire, l'excellence de sa vocation, le danger d'une vie toujours lâche et imparfaite, un âge peut-être avancé et où il faut songer à mourir toutes ces pensées et d'autres : que Dieu inspire, sont de puissantes raisons pour se réveiller de l'assoupissement où l'on est, et pour entreprendre les exercices spirituels dans un ferme dessein de se les rendre aussi salutaires qu'ils le peuvent être.

C'est de cette première disposition que suivront toutes les autres. Touché de ce sentiment, on n'omettra aucune des pratiques, ni aucun des règlemens qui sont marqués. On gardera un silence exact. On éloignera de son esprit tous les objets qui le pourroient dissiper, et l'on en dé

tournera ses sens. On donnera à chaque exercice, son heure, sa place, tout le soin et toute l'application qu'il requiert. On s'abandonnera à la grâce, et l'on ne refusera rien à Dieu, quoi que ce puisse être, et quelque effort qu'il en doive coûter.

Ce ne sera pas en vain. Dieu recherche même ceux qui le fuient : que fera-t-il pour une âme qui le désire et qui vient à lui? Il pourra peut-être la faire passer d'abord par quelque épreuve, et la laisser pour quelque temps dans une sécheresse de cœur, où elle demeurera sans goût et sans onction. Rien ne l'attachera ni ne l'affectionnera. Au contraire, elle tombera dans l'abattement et dans un ennui qui la rebutera. C'est sans doute un état pénible, et l'on a besoin alors de courage pour se soutenir. Mais quand on sait persévérer, et que sans se relâcher un seul moment, on attend en patience la rosée du ciel, Dieu souvent la fait descendre avec une telle abondance, qu'on en est tout pénétré. Les nuages peu à peu se dissipent, et les plus pures clartés succèdent aux plus épaisses ténèbres. On en peut croire une infinité de personnes qui l'ont expérimenté, et qui en portent témoignage. Combien ont commencé la retraite avec une froideur et une indifférence qui les affligeoit et les désoloit, mais l'ont finie dans des transports de dévotion qui les ravissoient, et y ont goûté les plus sensibles consolations!

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