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PRÉFACE.

Je me suis souvent demandé pourquoi les traducteurs d'Horace s'étaient crus obligés à adopter la forme des strophes; c'était, ce me semble, se créer une difficulté de plus dans une entreprise qui en présente déjà tant, et cette difficulté n'était rachetée ni par plus d'exactitude, ni par plus d'harmonie. Au contraire, l'exactitude y perdait, parce que, se renfermant dans un nombre de vers donné, ces traduc

teurs étaient souvent forcés de négliger certains traits, certains passages qu'ils ne parvenaient pas à faire entrer dans un cadre fait d'avance. L'harmonie n'y gagnait pas davantage, parce qu'une mesure uniforme, en même temps qu'elle engendre un peu de monotonie, ôte à la traduction la liberté, la cadence, la musique, si je puis m'exprimer ainsi, que l'on sent si bien en lisant Horace, que l'on doit chercher à reproduire, autant que le permet notre versification, et qui ne peut, je crois, se retrouver que dans des vers libres, dont la mesure, quand elle est bien entendue, constitue précisément la musique dont je parle. Le retour successif de la strophe finit par fatiguer l'oreille sans contenter l'esprit, qui voit trop la gêne que s'est imposée le traducteur, et qui voudrait desserrer l'étau dans lequel il s'est volontairement enfermé.

Quel rapport y a-t-il d'ailleurs entre la strophe latine et la strophe française? Celle-ci, devant toujours présenter un sens terminé ou au moins suspendu ; celle-là, ne s'assujétissant pas à cette nécessité, et

ne complétant au contraire le plus souvent que dans la strophe suivante le sens commencé dans la strophe précédente.

Il y a encore une raison qui fortifierait, au besoin, celles que je viens d'indiquer ce qu'on est convenu d'appeler les Odes d'Horace ne ressemble pas toujours aux Odes françaises, qui ne traitent que des sujets élevés, et dont le style ne descend jamais aux familiarités, aux railleries fines ou piquantes. La plupart des Odes d'Horace sont au contraire ce que nous nommons des poésies fugitives; plusieurs ne sont même que des billets, des chansons. Eh bien! à ces poésies fugitives, à ces billets, à ces chansons, rien, je crois, ne convenait mieux qu'une traduction en vers libres, et à rimes mêlées; mode heureux et facile, qui est loin d'exclure l'enthousiasme lyrique, mais qui s'adapte également bien à des morceaux d'une hauteur moins soutenue, et assure à la traduction plus de fidélité et d'harmonie.

Tous ces motifs et mon goût particulier m'ont

donc éloigné de cette forme régulière qu'affectent les strophes, et que ne commande point le texte.

Il me reste à désirer qu'aux yeux des hommes lettrés ma traduction puisse justifier ces principes.

Troyes, Juin 1853.

NOTICE SUR HORACE.

Horace naquit à Venouse, dans l'Apulie, l'an de Rome 688, suivant la chronologie de Varron, 66 ans avant JésusChrist. Il semble que son père ait pressenti ce que son fils serait un jour; car, simple affranchi, il n'hésita pas à le conduire à Rome, et à lui faire donner l'éducation la plus solide et la plus complète. De là, Horace se rendit à Athènes pour y étudier la philosophie, comme le faisaient alors les fils et les descendants des plus illustres maisons.

C'est donc aux soins et aux sacrifices paternels, dont au surplus il profita si bien, qu'Horace a dû tous les succès

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