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MEMOIRES

DE LA

REGENCE

DE S. A. R. MGR.

LE DUC D'ORLEANS,'

DURANT LA MINORITÉ

DE LOUIS XV.

ROI DE FRANCE.

CODOL eft bien difficile de fatis- 1715. I faire le Public, quand on

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écrit l'Hiftoire d'un Prin

ce, qui ne vient que de mourir, & dont la conduite intereffe une infinité de Perfonnes. Ceux qui font affectionnez à fa mémoire croient qu'on en pouvoit dire plus de bien, & fes Ennemis fe perfuadent qu'on Tome I.

A

en

1715. en a trop dit. Ce n'eft pas encore tout. Si vous paroiffez modéré, une autre forte de gens fe mettent dans l'efprit que la flatterie conduit votre plume, ou que la crainte l'arrête, sur le point d'écrire des veritez fâcheuses. Ils voudroient qu'une hiftoire ne s'empreffât point d'éclore, & qu'on attendît que le tems eût tiré le voile fur les motifs & fur les circonstances des actions qu'on décrit. Selon eux, on feroit plus en état de donner quelque chofe de fidelle & de véritable, parceque bien des anecdotes auroient percé l'obscurité des cabinets qui les recelent, & que l'Hiftorien feroit exemt. d'amour, de haine, de crainte, enfin de tout ce qui peut le folliciter à la diffimulation, ou au menfonge.

CEPENDANT j'ole bien affronter ces cenfures. Comme je n'avance rien que de vrai, & dont je n'aie toute l'Europe pour témoin, je fuis affuré ou qu'on rendra juftice à ma fidelité dès à préfent, ou du moins que je l'obtiendrai un jour, fi mes Mémoires ont le bonheur de me furvivre.

PHILIPPE Duc d'Orleans étoit un Prince d'un génie auffi élevé que le rang. Aufi ce qu'il a fait de plus

grand

grand n'a furpris que ceux qui ne le connoiffoient pas bien, & l'éclat de fes talens a forcé fes Ennemis mêmes à lui donner des louanges.

LE Regne de Louis XIV. lui avoit fourni diverses occafions de fignaler fa valeur. La mort de ce Prince lui four. nit celles de faire briller fon habileté.

"

DES qu'il fut affûré que le Roi ne releveroit point de fa maladie, réfolu d'obtenir la Régence qu'il croioit dûë à fa Naissance, il n'oublia rien pour se rendre favorables les personnes dont il avoit befoin, & il n'abandonnoit prefque plus le Roi. Mais il n'en arracha que des difcours 0bligeans, & des promeffes équivoques. Sa Majefté fe contenta de lui dire qu'Elle n'avoit jamais eu intention de préjudicier à fes droits, ni manqué d'amitié pour fa perfonne, & qu'il le verroit par fon Teftament. Enfuite s'abandonnant à fa tendreffe pour le jeune Dauphin, fon Arriere-Petitfils, il le recommanda à Son Altesse Roiale, & la pria de contribuer à tout ce qui feroit néceffaire pour la confervation de fes Etats. Il avoit déja fait la même priere aux autres Princes de la Famille Roiale, après les avoir

A 2

1715.

Mort de
XIV.

Louïs

1715.

Embarras du Duc

avoir exhortez à vivre ensemble dans une parfaite union, qui feule fuffifoit pour faire refpecter la France de fes Voifins. Il finit fon difcours en avertiffant le Dauphin de ne le pas imiter en trois chofes, dans la paffion d'aggrandir fes Etats, dans l'amour des plaifirs, & dans les dépenfes inutiles & exceffives qui accablent les Peuples. Telles furent les dernieres actions de Louis XIV. qui mourut peu de tems après, avec une conftance & une fermeté d'ame dignes d'une vie auffi glorieuse.

SUR le champ, le Duc d'Orleans, Orleans. certain que le Roi ne l'avoit pas nommé Régent, chercha les moiens d'obtenir la Régence par d'autres voies, & s'adreffa d'abord au Parlement, dont il craignoit que les Membres pacifiques ne vouluffent laiffer les affaires fur le pied que le feu Roi les Particula- avoit reglées. Son Alteffe Roiale n'éritez du toit déclarée dans le Teftament que Chef de la Régence, & il devoit avoir un Confeil compofé des Princes du Sang qui étoient en âge, des Miniftres d'Etat, des Maréchaux de Villeroy, de Villars, d'Harcourt, d'Uxelles & de Tallard, dont le nombre

Teftament

du Roi.

ne

ne pouvoit jamais être augmenté, mê- 1715. me en cas de mort d'aucun d'eux. Sa Maj. avoit déclaré par le même Article que les affaires feroient décidées dans ce Confeil à la pluralité des voix. On voit bien que par là Son Alteffe Roiale étoit fruftrée du droit attaché à fa naiffance,& néanmoins il étoit probable que le Parlement feroit en cette rencontre ce que ces fortes de Compagnies ont coutume de faire, c'est-àdire que, par un refpect fcrupuleux pour des difpofitions teftamentaires, il ne voudroit rien changer à celles de Louis XIV. Il falloit donc trouver quelque fecret de lever ces fcrupules, & c'étoit une chose assez difficile.

du Duc

Ce n'étoit pas là l'unique obftacle Refolution que le Duc d'Orleans prévoioit. La d'Orléans. jaloufie des Princes du Sang ne l'embarraffoit pas moins ; & c'étoit alors le fujet de fes conférences avec le Cardinal du Bois, qui n'étoit encore qu'Abbé. Ce Confident Homme auffi fidelle à son Maitre, & auffi fensé, que peu fcrupuleux, devoit fa fortune au Duc, & pouvoit prétendre à tout, fi S. A. Royale parvenoit à ce qu'Elle prétendoit. Cette pensée échauffoit fon ambition, & donnoit de la vivaA 3 cité

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