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que peu vôtre corde. La mienne fait encore en fort peu de temps quantité de femblables vibrations, dont chacune ébranle l'air, & pouffe vôtre corde comme a fait la premiere fecouffe. Voilà ce qui la fait trembler.Car plufieurs petites fecouffes données 3 propos peuvent produire un ébranlement fenfible. Mais lors que ces petites fecouffes viennent à contre-temps, elles fe nuifent les unes aux autres. Ainfi, lors que deux cordes font diffonantes, ou ne peuvent faire leurs vibrations en temps égal. ou multiple, à caufe qu'elles font inégalement bandées, ou de longueur ou groffeur inégale & incommenfurable, elles ne peuvent s'ébranler l'une l'autre. Car fi la premiere fe meut, & pouffe l'air vers vous, la feconde ayant un mouvement contraire & revenant vers moy, fon mouvement fera empêché, au lieu d'être augmenté. Il faut donc que les vibrations des cordes fe faffent en temps égal ou multiple, afin qu'elles fe communiquent mutuellement un mouvement affez grand pour être fenfible; & leur mouvement est d'autant plus fenfible, que la confonance qu'elles rendent approche plus de l'uniffon. C'est pourquoy dans l'octave elles s'ébranlent davantage que dans la quinte, & dans la quinte

Ei

plus

plus que dans la quarte: parce que les deux cordes recommencent plus fouvent leurs vibrations dans le même inftant. Eftesvous fatisfait de cette raifon?

THEODORE. Tout-à-fait, Arifte. Car vous avez fuivy le principe des idées claires. Je comprens fort bien que les cordes de même fon s'ébranlent mutuellement, non par la fympathie de leur fon, car le fon ne peut être la caufe du mouvement; mais par l'accord de leurs vibrations, qui ébranlent ou fecoüent l'air dans lequel elles font tendues. Tant que vous raifonnerez des proprietez des corps fur les idées des figures & des mouvemens, je feray content de vous. Car vous avez l'efprit fi jufte, qu'il eft difficile que vous faffiez un méchant raifonnement en fuivant un principe clair. En effet, fi nous tombons fi fouvent dans l'erreur, cela vient plûtoft de la fauffeté ou de l'obfcurité de nos idées, de la foibleffe de nôtre efprit. Les Geometres fe trompent rarement, & lep Phyficiens prefque toûjours. Pourquoy te la? C'eft que ceux-cy raifonnent ordinairement fur des idées confufes, & ceux-là fur les plus claires que nous ayons.db

que

ARISTE. Je voy mieux que jamais la neceffité de votre principe. Vous avez bien

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fait de me le répeter fouvent, & de me le rendre fenfible. Je tâcheray de m'en fouvepir, ne faut point juger des objets fenfibles fur les fentimens dont ils nous frapr pent, mais fur les idées qui les reprefen tent. Nos fentimens font confus. Ce ne font que, des modalitez de nôtre ame qui nous ne peuvent nous éclairer. Mais les idées. que la Raifon nous découvre font lumineu Les Révidence les accompagne. 11 fuffit de les confiderer avec attention pour en découvrir les rapports & s'inftruire folidement de la verité. N'eft-ce pas là, Theodore, ce que vous voulez que je me mette bien dans l'esprit ?e for THEODORE Ouy Arifte vous le faites, vous voyagerez fans crainte dans le pays des intelligences. Vous en éviterez. prudemment les lieux inaqcethblés ou trop dangereux, & vous n'appre henderez plus ces phantomes cateffans qui engagent infenfiblement, dans l'erreur les nouyeaux voyageurs de ces contrées, Majs ne vous imaginez pas de bien fçavoir ce que je viens de vous dire, & ce que vous avez répété vous-même. Vous ne le fçaurez exactement que lors que vous y aurez meshité fouvent. Cat on n'apprend ja mais bien ce qu'on entend dire aux hom E 4

&

mes,

mes, fi la verité interieure ne nous le répete dans le filence de toutes les creatures. Adieu donc, Arifte. Je vous laiffe feul avee la Raifon. Confultez la ferieufement, & oubliez tout le refte.

IV. ENTRETIEN.

En general de la nature & des proprietez des fens. De la fageffe des loix de l'union de Tame & du corps. Cette anion changée en dépendance par le peché du premier bom

me.

RISTE. D'où venez-vous, Theo

Adore j'étois dans l'impatience de

ne point vous rencontrer.

I. THEODORE. Quoy done! Eft-ce que la Raifon ne vous fuffit pas; & que Vous ne pouvez paffer agreablement le temps avec elle, fi Theodore n'eft de la partie? La Raifon fuffit pour une éternité aux bienheureuses intelligences; & quoy que je ne vous aye laiffé avec elle que quel ques heures, l'impatience vous prend de ne me point voir. A quoy penfez-vous ? Prétendez-vous que je fouffre que vous ayez pour moy un attachement aveugle & déreglé? Aimez la Raifon, confultez-la,

fuivez la. Car je vous déclare que je renonce à l'amitié de ceux qui la negligent & qui refufent de fe foûmettre à fes loix. ARISTE. Doucement, Theodore, Ecoutez un peu.

II. THEODORE. Il ne peut y avoir d'amitié durable & fincere, fi elle n'eft appuyée fur la Raifon, fur un bien immuable, fur un bien que tous puiffent poffeder fans le divifer. Car les amitiez fondées fur les biens qui fe partagent, & qui fe dif fipent par l'ufage, ont toujours de fâcheuses fuites, & ne durent que peu de temps: fauffes & dangereuses amitiez !

ARISTE. D'accord. Tout cela eft vray, rien n'eft plus certain. Ah, Theodore!

THEODORE. Que voulez-vous dire? III. ARISTE. Qu'il y a de difference entre voir & voir; entre fçavoir ce que nous difent les hommes, dans le temps qu'ils nous le difent, & fçavoir ce que nous dit la Raifon, dans le temps qu'elle nous répond! Qu'il y a de difference entre connoître & fentir; entre les idées qui nous éclairent, & les fentimens confus qui nous agitent & qui nous troublent! Que ce principe eft fecond, qu'il répand de lumieres! Que d'erreurs, que de préjuES

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