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philofophions ensemble. Car quand Arifte eft quelque part, on le fçait bientoft, C'eft que tout le monde veut l'avoir. Voilà ce que c'est que d'être bel efprit, & d'avoir tant de qualitez brillantes. Il faut fe trouver par tout pour ne chagriner perfonne. On n'eft plus à foy.

ARISTE. Quelle fervitude!

THEODORE. En voulez-vous être délivré? Devenez meditatif, & tout le monde vous laiffera bientoft là. Le grand fecret de fe délivrer de l'importunité de bien des gens, c'eft de leur parler raison. Ce langage qu'ils n'entendent pas les congedie pour toûjours, fans qu'ils ayent fujet de s'en plaindre.

ARISTE. Cela eft vray. Mais Theotime, quand l'aurons-nous?

IX. THEODOR E. Quand il vous plaira.

ARISTE. Hé je vous prie de l'avertir inceffamment que nous l'attendons, & de l'affûrer fur tout que je ne fuis plus ce que j'étois autrefois. Mais que cela ne rompe point, s'il vous plaift, la fuite de nos entretiens. Je renonce à mon doute, Theodore. Mais je ne fuis pas fâché de vous l'avoir propofé. Car par les chofes que vous m'avez dites, j'entrevois le de

noue

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nouement de quantité de contradictions apparentes, que je ne pouvois accorder avec la notion que nous avons de la Divinité. Lors que nous dormons, Dieu nous fait voir mille objets qui ne font point. C'eft qu'il fuit & doit fuivre les loix generales de l'union de l'ame & du corps. Ce n'eft point qu'il veuille nous tromper. S'il agiffoit en nous par des volontez particulieres, nous ne verrions point dans le fommeil tous ces phantômes. Je ne m'étonne plus de voir des monftres, & tous les déreglemens de la nature, J'en vois la caufe dans la fimplicité des voyes de Dieu. L'innocence opprimée ne me furprend plus: fi les plus forts l'emportent ordinairement, c'eft que Dieu gouverne le monpar des loix generales, & qu'il remet à un autre temps la vengeance des crimes. Il eft jufte, nonobftant les heureux fuccès des impies, nonobftant la profperité des armes des Conquerans les plus injuftes. Il eft fage, quoy que l'Univers foit remply d'ouvrages où il fe rencontre mille defauts. Il eft immuable, quoy qu'il femble fe contredire à tous momens, quoy qu'il ravage par la grefle les terres qu'il avoit couvertes de fruits par l'abondance des pluyes. Tous ces effets qui fe contredifent ne marquent

de

point de contradiction ni de changement dans la caufe qui les produit. C'eft au contraire que Dieu fuit inviolablement les mêmes loix, & que fa conduite n'a nul rapport à la nôtre. Si tel fouffre de la douleur dans un bras qu'il n'a plus, ce n'est point que Dieu ait deffein de le tromper : c'eft uniquement que Dieu ne change point de deffein, & qu'il obeït exactement à fes propres loix: c'eft qu'il les approuve, & qu'il ne les condamnera jamais: c'eft que rien ne peut troubler l'uniformité de fa conduite, rien ne peut l'obliger à déroger à ce qu'il a fait. Il me femble, Theodore, que j'entrevois que ce principe des loix generales a une infinité de confequences d'une très-grande utilité.

THEODORE. Bon cela, mon cher Arifte. Vous me donnez bien de la joye. Je ne penfois pas que vous euffiez été affez attentif pour bien prendre les principes dont dépendent les réponfes que je vous ay faites. Cela va fort bien. Mais il faudra examiner à fonds ces principes, afin que vous en connoiffiez plus clairement la folidité, & leur merveilleufe fécondité. Car ne vous imaginez pas qu'il vous fuffife de les entrevoir, & mêmes de les avoir compris, pour être en état de les appliquer à

toutes

toutes les difficultez qui en dépendent. Il faut par l'ufage s'en rendre comme le maître, & acquerir la facilité d'y rapporter tout ce qu'ils peuvent éclaircir. Mais je fuis d'avis que nous remettions l'examen de ces grands principes jufqu'à ce que Theotime foit arrivé. Tâchez cependant de découvrir par vous-même quelles font les chofes qui ont avec nous quelque liaifon, quelles font les caufes de ces liaisons, & quels en font les effets. Car il eft bon que vôtre efprit foit préparé fur ce qui doit être le fujet de nos entretiens, afin que vous puiffiez plus facilement ou me reprendre, fi je m'égare; ou me fuivre, fi je vous conduis directement où nous devons tendre de toutes nos forces.

VII. EN TRETIEN.

De l'inefficace des caufes naturelles, ou de l'impuiffance des creatures. Que nous ne fommes unis immediatement & directement qu'à Dieu feul.

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Près bien des complimens de part & d'autre entre Arifte & Theotime, Arifte ayant remarqué que Theodore n'étoit pas tout-à-fait content de ce que cela ne finiffoit

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point, & voulant ceder au nouveau venu la gloire de ce petit combat d'efprit, il se tût. Et Theodore prenant la parole, crut devoir dire à Theotime en faveur d'Arifte.

THEODORE. En verité, Theotime, je ne penfois pas que vous fuffiez fi galant homme. Vous avez obligé Arifte à fe rendre, luy qui ne fe rendit jamais à perfonne. Voilà une victoire qui vous feroit bien de l'honneur, fi vous l'aviez remportée chez Philandre. Mais apparemment elle vous auroit coûté plus cher. Car ne vous y trompez pas, c'eft qu'Arifte veut faire chez luy les honneurs. Il vous le cede icy par complaifance, & par une efpece de devoir.

THEOTIME. Je n'en doute pas, Theodore. Je voy fort bien qu'il veut m'épargner.

ARISTE. Ah! ceffez l'un & l'autre de me pouffer: ou du moins, Theodore, laiffez moy la liberté de me défendre. THEODORE. Non, Arifte. Ne voilà que trop de difcours inutiles. Nous nous taifons, Theotime & moy. Parlons de quelque chofe de meilleur. Dites nous, je vous prie, ce qui vous eft venu dans l'efprit fur le fujet que je vous propofay dans nôtre dernier entretien. Quelles font les chofes

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