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lu: que c'eft nôtre amour propre qui nous fait trouver injufte la douleur que nous fouffrons: que c'eft nôtre orgueil qui s'offence que l'efprit foit fofimis au corps: que Dieu ayant voulu ces defordres prétendus, c'eft une impieté que d'en appeller à la Raifon, puis que la volonté de Dieu ne la reconnoît point pour la regle de fa conduite. Selon ce principe, l'Univers eft parfait, parce que Dieu l'a voulu. Les monftres font des ouvrages auffi achevez que les autres felon les deffeins de Dieu. N eft bon d'avoir les yeux au haut de la tefte, mais ils euffent été auffi fagement placez par tout ailleurs, fi Dieu les y avoit mis. Qu'on renverfe donc le monde, qu'on en faffe un cahos, il fera toûjours également admirable, puis que toute fa beauté confifte dans fa conformité avec la volonté divine, qui n'eft point obligée de fe conformer à l'Ordre. Mais quoy! cette volonté nous eft inconnue. Il faut donc que toute la beauté de l'Univers difparoiffe à la vue de ce grand principe, que Dieu eft fuperieur à la Raifon qui éclaire tous les efprits, & que fa volonté toute pure eft l'unique regle de fes actions.

ARISTE. Ah, Theodore, que tous vos principes font bien liez! Je.comprens

encore

encore par ce que vous me dites là, que c'eft en Dieu & dans une nature immuable que nous voyons la beauté, la verité, la juftice, puis que nous ne craignons point. de critiquer fon ouvrage, d'y remarquer des defauts, & de conclure mêmes de là qu'il eft corrompu. Il faut bien que l'Ordre immuable, que nous voyons en partie, foit la Loy de Dicu même, écrite dans fa fubftance en caracteres éternels & divins; puis que nous ne craignons point de juger de fa conduite par la connoiffance que nous avons de cette Loy. Nous affûrons hardiment, que l'homme n'eft point tel que Dieu l'a fait; que fa nature eft corrompuë; que Dieu n'a pû en le creant affujettir l'efprit au corps. Sommes-nous des impies ou des temeraires, de juger ainfi de ce que Dieu doit faire ou ne faire pas? Nullement. Nous ferions plûtôt ou des impies ou des aveugles, fi nous fulpendions fur cela nôtre jugement. C'eft, Theodore, que nous ne jugeons point de Dieu par nôtre autorité, mais par l'autorité fouveraine de la Loy divine.

THEODORE.. Voilà, mon cher Arifte, une réflexion digne de vous. N'oubliez donc pas d'étudier cette Loy, puis c'eft dans ce Code Sacré de l'Ordre im

que

muable

muable qu'on trouve de fi importantes dé cifions.au

X. ENTRETIEN.

De la magnificence de Dieu dans la grandeur & le nombre indefiny de fes differens ouvrages. De la fimplicité & de la fecondité des voyes par tefquelles il les conferve & les développe. De la Providence de Dieu dans la premiere impresfion du mouvement popqu'il communique à la matiere. Que ce anopremier pas de fa conduite, qui n'eft point Les déterminé par des loix generales, eft reoglé par une fagesse infinie.

TA

HEOTIME. Que penfez-vous, Arifte, de ces principes generaux qu'hier Theodore nous propofa? Les avez-vous toûjours fuivis? Leur generalité, leur fublimité ne vous a-t-elle ni rebutté ni fatigué? Pour moy, je vous l'avoue à ma confufion, j'ay voulu les fuivre : mais ils m'échappoient comme des phantômes, deforte que je me fuis donné bien de la peine affez inutilement.720cosu T

ARISTE. Quand un principe n'a rien qui touche les fens, il eft bien difficile de le suivre, & de le faifir: ce qu'on embraf

fe

fe n'a point de corps, quel moyen de le -retenir ?

C

THEOTIME, On prend cela tout naturellement pour un phantôme. Car l'efprit venant à fe diftraire, le principe s'éclipfe, & on eft tout furpris qu'on ne tient rien. On le reprend ce principe; mais il s'échappe de nouveau. Et quoy squ'il ne s'échappe que lors qu'on ferme les yeux, comme on les ferme fouvent fans s'en appercevoir, on croit que c'eft le principe qui s'évanouit. Voilà pourquoy on le regarde comme un phantôme qui nous fait illufion.

ARISTE. Il eft vray, Theotime: c'eft je croy pour cela que les principes generaux ont quelque reffemblance avec les chimeres , & que le commun des hommes, qui n'eft pas fait au travail de l'attention, les traite de chimeriques.

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THEOTIME. Il y a neanmoins une extrême difference entre ces deux chofes. Car les principes generaux plaifent à l'efprit, qu'ils éclairent par leur évidence; & les phantômes à l'imagination, qui leur donne l'être. Et quoy qu'il femble que c'est l'efprit qui forme ces principes, & generalement toutes les veritez, à cause qu'elles fe prefentent à luy en confequence

de

de fon attention; je pense que vous fçavez bien qu'elles font avant nous, & qu'el les ne tirent point leur realité de l'efficace de nôtre action: car toutes ces veritez im

muables ne font que les rapports qui fe trouvent entre les idées, dont l'existence eft neceffaire & éternelle. Mais les phantômes que produit Pimagination, ou qui fe produifent dans l'imagination par une fuite naturelle des loix generales de l'union de l'ame & du corps, ils n'exiftent que pour un temps.

ARISTE. Je conviens, Theotime, que rien n'eft plus folide que la verite,&c que plus fes veritez font generales, plus ont-elles de realité & de lumiere.Theodore m'en a convaincu. Mais je fuis fi fenfible & fi groffier, que fouvent je n'y trouve point de gouft, & que je fuis quelquefois tenté de laiffer tout fatal,

THEOTIME. Voilà Theodore. I THEODORE. Vous n'en ferez rien, Arifte. La verité vaut mieux que les oignons & les choux : c'eft une excellente

manne. - from

ARIST.E. Fort excellente, jel'avoue. Mais elle paroît quelquefois bien vuide & bien peu folide. Je n'y trouve pas grand gouft: & vous voulez chaque

jour

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