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vous avez raifon de finir nôtre entretien :

car nous nous perdrions bientoft dans un fi vafte fujet.

du

THEODORE. Pensez y, Arifte; car dès demain il faut nous y engager. ARISTE. Si nous nous embarquons fur cet Ocean, nous y perirons. THEODORE. Non: nous n'y perirons point, pourvû que nous ne fortions pas vaiffeau qui nous doit porter. Demeurans dans l'Eglife, toûjours foûmis à fon autorité, fi nous heurtons legerement contre les écueils, nous n'y ferons pas naufrage. L'homme eft fait pour adorer Dieu dans la fageffe de fa conduite. Tâchons de nous perdre heureufement dans fes profondeurs. Jamais l'efprit humain n'eft mieux difpofé, que lors qu'il adore par un filence forcé les perfections divines. Mais ce filence de l'ame ne peut fucceder qu'à la contemplation de ce qui nous paffe. Courage donc, Arifte, contemplez, admirez la Providence generale du Createur. Je vous ay placé au point de vue d'où vous devez découvrir une fageffe incomprehenfible.

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XI. EN

XI. ENTRETIEN.

Continuation du même fujet. De la Providence generale dans l'arrangement des corps, & dans les combinaisons infiniment infinies du phyfic avec le moral, du naturel avec le furnaturel.

T

HEODORE. Avez-vous, Arifte, fait quelques efforts d'efprit pour comparer la premiere impreffion du mouvement que Dieu a communiqué à la matiere, la premiere de fes démarches dans l'Univers, avec les loix generales de fa Providence ordinaire, & avec les divers Ouvrages qui devoient fe conferver & fe développer par l'efficace de ces loix? Car c'eft de cette premiere impreffion de mouvement dont il faut jetter les yeux fur la conduite de Dieu. C'est le point de vue de la Providence generale: car Dieu ne fe repent & ne fe dément jamais. Avez-vous donc regardé de là le bel ordre des creatures, & la conduite fimple & uniforme du Createur?

ARISTE. Ouy, Theodore: mais j'ay la vue trop courte. J'ay découvert bien du pays; mais cela fi confufément, que

je

je ne fçay que vous dire. Vous m'avez placé trop haut. On découvre de fort loin, mais on ne fçait ce qu'on voit. Vous m'avez,pour ainfi dire, guindé au deffus des nuës, & la tefte me tourne quand je regarde fous moy..

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THEODORE. Hé bien Arifte, defcendons un peu.

THEOTIME. Mais plus bas nous ne

verrons rien.

ARISTE. Ah, je vous prie, Theodore, un peu plus de détail.

THEODORE. Defcendons, Theotime, puis qu'Arifte le fouhaite. Mais n'oublions pas tous trois nôtre point de vue car il y faudra monter bientost, dès que nôtre imagination fera un peu raffûrée, & fortifiée par un détail plus fenfible & plus à nôtre portée.

I. Souvenez-vous, Arifte, de nos abeilles d'hier. C'eft un ouvrage admirable que ce petit animal. Combien d'organes differens, que d'ordre, que de liaifons, que de rapports dans toutes fes parties! Ne vous imaginez pas qu'il en ait moins que les élephans: apparemment il en a davantage. Comprenez donc, fi vous le pouvez, le nombre & le jeu merveilleux de tous les refforts de cette petite

ma

machine. C'eft l'action foible de la lumiere qui les débande tous ces refforts. C'est la prefence feule des objets qui en détermine & qui en regle tous les mouvemens. Jugez donc par l'ouvrage fi exactement formé,fi diligemment achevé de ces petits animaux, non de leur fageffe & de leur prévoyance, car elles n'en ont point; mais de la fageffe & de la prévoyance de celuy qui a affemblé tant de refforts, & qui les a ordonnez fi fagement par rapport à tant de divers objets & de fins differentes. Affûrément, Arifte, vous feriez plus fçavant que tout ce qu'il y a jamais eu de Philofophes, fi vous fçavicz exactement les raifons de la conftruction des parties de ce petit animal.

3.

ARISTE. Je le croy, Theodore. Cela nous paffe déjà. Mais s'il faut une fi grande adreffe & une fi profonde intelligence pour former une fimple mouche comment en produire une infinité toutes renfermées les unes dans les autres, & par confequent toutes plus petites toûjours dans la proportion fous-millecuple, puis qu'une feule en produit mille, & que ce qui contient eft plus grand que ce qui eft contenu ? Cela effraye l'imagination mais que l'efprit reconnoît de fagefle dans

S

:

dans l'Auteur de tant de merveilles !

tres.

THEODORE. Pourquoy cela, Arifte? Si les petites abeilles font organifées comme les plus grandes, qui en conçoit une grande, en peut concevoir une infinité de petites renfermées les unes dans les auCe n'eft donc point la multitude & la petiteffe de çes animaux tous femblables qui doit augmenter vôtre admiration pour la fageffe du Createur. Mais vôtre imagination effrayée admire en petit ce qu'on a coûtume de ne voir qu'en grand.

ARISTE. Je croyois, Theodore, que je ne pouvois trop admirer. THEODORE. Ouy: mais il ne faut admirer que par raifon. raifon. Ne craignez point: fi l'admiration vous plaift, vous trouverez bien dequoy vous fatisfaire dans la multitude & la petiteffe de ces abeilles renfermées les unes dans les autres.

ARISTE. Comment cela donc ? THEODORE. C'est qu'elles ne font pas toutes femblables.

ARISTE. Je me l'imaginois bien ainfi. Car quelle apparence que les vers de ces mouches, & les œufs de ces vers", ayent autant d'organes que les mouches

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