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XIV. ENTRETIEN. Continuation du même fujet. L'incomprebenfibilité de nos myfteres eft une preuve démonftrative de leur verité. Maniere d'éclaircir les dogmes de la foy. De l'Incarnation de Jesus-Chrift. Preuve de fa Divinité contre les Sociniens. Nulle creature, les Anges mêmes ne peuvent adorer Dieu que par luy. Comment la foy en Jefus-Chrift nous rend agreables à Dieu.

I.

AR

RISTE. Ab, Theodore! Comment pourray-je vous ouvrir mon cœur ? Comment vous exprimer ma joye? Comment vous faire fentir l'état heureux où vous m'avez mis? Je reffemble maintenant à un homme échappé du naufrage, ou qui trouve tout calme après la tempefte. Je me fuis fenty fouvent agité par des mouvemens dangereux à la vue de nos incomprehenfibles myfteres. Leur profondeur m'effrayoit, leur obfcurité me faififfoit ; & quoy que mon cœur fe rendift à la force de l'autorité, ce n'étoit pas fans peine de la part de l'efprit. Car comme vous fçavez, l'efprit apprehende naturellement dans les tenebres. Mais mainteA á 5

nant

nant je trouve qu'en moy tout eft d'accord: l'efprit fuit le coeur. Que dis-je ! l'efprit conduit, l'efprit tranfporte le cœur. Car plus nos myfteres font obfcurs, quel paradoxe ils me paroiffent aujourd'huy d'autant plus croyables. Ouy, Theodore, je trouve dans l'obfcurité mêmes de nos mysteres, receus comme ils font aujourd'huy de tant de nations differentes, une preuve invincible de leur verité.

Comment, par exemple, accorder l'unité avec la Trinité, une focieté de trois perfonnes differentes dans la fimplicité parfaite de la nature divine? Cela eft incomprehenfible affûrément. Mais cela n'eft pas incroyable. Cela nous paffe: il eft vray. Mais un peu de bon fens, & nous શી le croirons, du moins fi nous voulons être de la Religion des Apôtres. Car enfin fuppofé qu'ils n'ayent point connu cet ineffable myftere, ou qu'ils ne l'ayent point enfeigné à leurs fucceffeurs, je foûtiens qu'il n'eft pas poffible qu'un fentiment fi extraordinaire ait pû trouver dans les efprits cette creance univerfelle qu'on luy donne dans toute l'Eglife, & parmy tant de diverfes nations. Plus cet adorable myfrere paroît monftrueux, fouffrez cette expreffion des ennemis de la foy, plus il choque

choque la raifon humaine, plus il foûleve l'imagination, plus il eft obfcur, incomprehenfible, impenetrable; moins est-il croyable qu'il fe foit infinué naturellement dans l'efprit & dans le cœur de tous les Catholiques de tant de pays fi éloignez. Je le comprens, Theodore: jamais les mêmes erreurs ne fe répandent univerfellement par tout, principalement ces fortes d'erreurs, qui révoltent étrangement l'imagination, qui n'ont rien de fenfible, & qui femblent contredire les notions les plus fimples & les plus communes.

Si Jefus-Chrift ne veilloit point fur fors Eglife, le nombre des Unitaires furpaffe roit bientoft celuy des vrais Catholiques. Je comprens cela. Car il n'y a rien dans les fentimens de ces Heretiques qui n'entre naturellement dans l'efprit. Je conçois bien que des opinions proportionnées à nôtre intelligence peuvent s'établir avec le temps. Je conçois mêmes que les fentimens les plus bizarres peuvent dominer parmy certains peuples d'un tour d'imagi nation tout fingulier. Mais qu'une verité auffi fublime, auffi éloignée des fens, auffi oppofée à la raifon humaine, auffi contraire en un mot à toute la nature qu'eft ce grand myftere de nôtre foy, qu'une A a 6 verité,

verité, dis-je, de ce caractere fe puiffe répandre univerfellement, & triompher dans toutes les nations où les Apôtres ont prêché l'Evangile, fur tout dans la fuppofition que ces premiers Prédicateurs dé nôtre foy n'euffent rien fçû & rien dit de ce myftere, c'est affûrément ce qui ne fe peut concevoir, pour peù de connoiffance qu'on ait de l'efprit humain.

Qu'il y ait eu des Heretiques qui fe foient oppofez à un dogme fi relevé, je n'en fuis nullement furpris. Je le ferois étrangement, fi jamais perfonne ne l'euft combattu. Peu s'en eft fallu que cette verité n'ait été opprimée. Cela peut être. On fe fera toûjours un merite d'attaquer ce qui femble bleffer la Raifon. Mais qu'enfin le myftere de la Trinité ait prévalu, qu'il fe foit étably par tout où la Religion de Jefus-Chrift eft receuë, fans qu'il ait été connu & enfeigné par les Apôtres, fant une autorité & une force divine, il ne fauc, ce me femble, qu'un peu de bon fens pour reconnoître que rien n'eft moins vraisemblable. Car il n'eft pas même vraifemblable, qu'un dogme fi divin,fi au deffus de la raison, si éloigné de tout ce qui peut frapper l'imagination & les fens, puiffe venir naturellement dans l'efprit de qui que ce foit. IL

IL THEODORE. Affûrément, Arifte, vous devez avoir l'efprit fort en repos, puis que vous fçavez maintenant tirer la lumiere des tenebres mêmes, & tourner en preuve évidente de nos mysteres l'obscurité impenetrable qui les environne. Que les Sociniens blafphement contre nôtre fainte Religion; qu'ils la tournent en ridicule: leurs blafphêmes & ce ridicule, dont ils prétendent la couvrir, vous en infpire du refpect. Ce qui ébranle les autres ne peut que vous affermir. Comment ne jouïriez-vous pas d'une paix profonde? Car enfin ce qui peut faire naître en nous quelque frayeur & quelque trouble, ce ne font pas ces veritez plaufibles que tout le monde croit fans peine; c'est la profondeur & l'impenetrabilité de nos myfteres. Je comprens donc que vous voilà dans un grand calme. Jouiffez en, mon cher Arifte. Mais je vous prie, ne jugeons pas de l'Eglife de Jefus-Chrift comme des focietez purement humaines. Elle a un Chef qui ne permettra jamais qu'elle devienne la maîtreffe de l'erreur. Son infaillibilité eft appuyée fur la Divinité de celuy qui la conduit. Il ne faut pas juger uniquement par les regles du bon fens, que tels & tels de nos myfteres ne Да 7 рец

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