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questions sur l'esprit: il paroîtra tout étonné qu'on lui demande de quelle couleur est un esprit; s'il est rond ou quarré. Alors vous pourrez lui faire remarquer qu'il connoît donc des choses très véritables qu'on ne peut ni voir, ni toucher, ni entendre, et que ces choses sont spirituelles. Mais il faut entrer fort sobrement dans ces sortes de discours pour les filles. Je ne les propose ici que pour celles dont la curiosité et le raisonnement vous meneroient malgré vous jusqu'à ces questions. Il faut se régler selon l'ouverture de leur esprit et selon leur besoin.

Retenez leur esprit le plus que vous pourrez dans les bornes communes; et apprenez-leur qu'il doit y avoir pour leur sexe une pudeur sur la science presque aussi délicate que celle qui inspire l'horreur du

vice.

En même temps il faut faire venir l'imagination au secours de l'esprit, pour leur donner des images charmantes des vérités de la religion, que le corps ne peut voir. Il faut leur peindre la gloire céleste telle que saint Jean nous la représente : les larmes de tout œil essuyées; plus de mort, plus de douleurs ni de cris; les gémissements s'enfuiront, les maux seront passés; une joie éternelle sera sur la tête des bienheureux, comme les eaux sont sur la tête d'un homme abymé au fond de la mer. Montrez cette glorieuse

TOME III.

Jérusalem dont Dieu sera lui-même le soleil pour y former des jours sans fin; un fleuve de paix, un torrent de délices, une fontaine de vie l'arrosera; tout y sera or, perles et pierreries. Je sais bien que toutes cès images attachent aux choses sensibles; mais après avoir frappé les enfants par un si beau spectacle pour les rendre attentifs, on se sert des moyens que nous avons touchés pour les ramener aux choses spirituelles.

Concluez que nous ne sommes ici bas que comme des voyageurs dans une hôtellerie, ou sous une tente; qué le corps va périr; qu'on ne peut retarder que de peu d'années sa corruption; mais que l'ame s'envolera dans cette céleste patrie, où elle doit vivre à jamais de la vie de Dieu. Si on peut donner aux enfants l'habitude d'envisager avec plaisir ces grands objets, et de juger des choses communes par rapport à de si hautes espérances, on applanit des difficultés infinies.

Je voudrois encore tâcher de leur donner de fortes impressions sur la résurrection des corps. Apprenez-leur que la nature n'est qu'un ordre commun que Dieu a établi dans ses ouvrages, et que les miracles ne sont que des exceptions à ces regles générales ; qu'ainsi il ne coûte pas plus à Dieu de faire cent miracles, qu'à moi de sortir de ma chambre un quart d'heure avant le temps où j'avois accoutumé d'en

sortir. Ensuite rappellez l'histoire de la résurrection de Lazare, puis celle de la résurrection de Jésus ¦ Christ, et de ses apparitions familieres pendant quarante jours devant tant de personnes. Enfin montrez qu'il ne peut être difficile à celui qui a fait les hommes de les refaire. N'oubliez pas la comparaison du grain de bled qu'on seme dans la terre et qu'on fait pourrir, afin qu'il ressuscite et se multiplie.

Au reste, il ne s'agit point d'enseigner par mémoire cette morale aux enfants, comme on leur enseigne le catéchisme; cette méthode n'aboutiroit qu'à tourner la religion en un langage affecté, du moins en des formalités ennuyeuses: aidez seulement leur esprit, et mettez-les en chemin de trouver ces vérités dans leur propre fonds; elles leur en seront plus propres et plus agréables, elles s'imprimeront plus vivement: profitez des ouvertures pour leur faire développer ce qu'ils ne voient encore que confusément. Mais prenez garde qu'il n'est rien de si dangereux

que

de leur parler du mépris de cette vie, sans leur faire voir, par tout le détail de votre conduite, que vous parlez sérieusement. Dans tous les âges, l'exemple a un pouvoir étonnant sur nous; dans l'enfance il peut tout. Les enfants se plaisent fort à imiter; ils n'ont point encore d'habitude qui leur rende l'imitation d'autrui difficile: de plus, n'étant pas capables

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de juger par eux-mêmes du fond des choses, ils en ju gent bien plus par ce qu'ils voient dans ceux qui les proposent, que par les raisons dont ils les appuient; les actions mêmes sont bien plus sensibles que les paroles: si donc ils voient faire le contraire de ce qu'on leur enseigne, ils s'accoutument à regarder la religion comme une belle cérémonie, et la vertu comme une idée impraticable.

Ne prenez jamais la liberté de faire devant les enfants certaines railleries sur des choses qui ont rapport à la religion. On se moquera de la dévotion de quelque esprit simple; on rira sur ce qu'il consulte son confesseur, ou sur les pénitences qui lui sont imposées. Vous croyez que tout cela est innocent: mais vous vous trompez, tout tire à conséquence en cette matiere. Il ne faut jamais parler de Dieu, ni des choses qui concernent son culte, qu'avec un sérieux et un respect bien éloigné de ces libertés. Ne vous relâchez jamais sur aucune bienséance, mais principalement sur celles-là. Souvent les gens qui sont les plus délicats sur celles du monde sont les plus grossiers sur celles de la religion.

Quand l'enfant aura fait les réflexions nécessaires pour se connoître soi-même et pour connoître Dieu, joignez-y les faits d'histoire dont il sera déja instruit: ce mélange lui fera trouver toute la religion rassemblée

dans sa tête; il remarquera avec plaisir le rapport qu'il y a entre ses réflexions et l'histoire du genre humain. Il aura reconnu que l'homme ne s'est point fait luimême, que son ame est l'image de Dieu, que son corps a été formé avec tant de ressorts admirables par une industrie et une puissance divine: aussitôt il se souviendra de l'histoire de la création. Ensuite il songera qu'il est né avec des inclinations contraires à la raison, qu'il est trompé par le plaisir, emporté par la colere, et que son corps entraîne son ame contre la raison, comme un cheval fougueux emporte un cavalier, au lieu que son ame devroit gouverner son corps : il appercevra la cause de ce désordre dans l'histoire du péché d'Adam; cette histoire lui fera attendre le Sauveur, qui doit réconcilier les hommes avec Dieu. Voilà tout le fond de la religion.

Pour faire mieux entendre les mysteres, les actions, et les maximes de Jésus-Christ, il faut disposer les jeunes personnes à lire l'évangile. Il faudroit donc les préparer de bonne heure à lire la parole de Dieu, comme on les prépare à recevoir par la communion la chair de Jésus-Christ; il faudroit poser comme le principal fondement, l'autorité de l'église, épouse du fils de Dieu et mere de tous les fideles: C'est elle, direz-vous, qu'il faut écouter, parceque le saint Esprit l'éclaire pour nous expliquer les écritures; on ne

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