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l'on croiroit qu'il fait ici vo

avant vous,

tre hiftoire.

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» La queftion, continue-t-il, n'eft pas » de fçavoir, s'il vaudroit mieux qu'un » certain homme ou qu'un certain peuple » n'eût point de Religion, que d'abufer » de celle qu'il a, mais de fçavoir quel eft » le moindre mal, que l'on abufe quelquefois de la Religion, ou qu'il n'y en ait point du tout parmi les hommes (a) «. Comme ces réflexions ne fçauroient yous être inconnues, avant que de détailler vos griefs, vous auriez bien fait de montrer, fi c'eft l'Auteur de l'Efprit des Loix qui fe trompe, comme cela lui arrive quelquefois, ou fi c'est vous qui raiSonnez mal.

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Je conviens que vous avez rapporté quelques-uns des biens dont la Religion eft la fource, & j'ai été charmé de faire remarquer ce trait de votre bonne foi; mais pour traiter exactement la queftion, il falloit encore examiner fi les maux que vous lui imputez, peuvent l'emporter fur le bien là-deflus on ne peut manquer d'appercevoir d'abord que, quand les hommes font le bien par Religion, elle fi la véritable caufe, parce qu'alors

(a) Efprit des Loix, liv. 24, chap. 2.

ils agiffent par fon efprit, & conformément à fes principes quand ils font le mal par le même motif, ce n'eft pas à elle que l'on doit s'en prendre, parce que, loin de porter au mal, elle le défend,

Vous me direz que ces maux viennent de l'intolérance, que nous prétendons être un devoir de Religion ; mais je vous ai montré que la Religion même naturelle eft intolérante dans certains cas, que ce n'eft donc point un défaut attaché à la révélation, & que la tolérance universelle feroit le plus grand de tous les maux.

Il ne vous en a pas coûté beaucoup de raffembler des faits, pour montrer que l'abus de la Religion a fouvent caufe de grands maux: Bayle s'étoit chargé avant vous de cette tâche odieufe ; quand même vous auriez fait un choix plus heureux, vous fentez déja combien votre travail eft ridicule, mais il s'en faut beaucoup que ces faits prouvent ce que vous pré÷ tendez.

Les Juifs étoient les ennemis nés de tous les autres peuples, & ils commencerent leur établiffement par détruire fept Nations, felon l'ordre exprès qu'ils en avoient reçu (a). Quand vous parlez de fept Nations, il

(a) Lettre, p. 72. .

femble d'abord que les Juifs aient dépeuplé fept Royaumes auffi vaftes que la France. Mais vous fçavez que la Palestine n'eft pas un pays fort étendu, que les Chananéens qui l'habitoient, n'étoient, à proprement parler, qu'une feule Nation, diftribuée en fept départemens; jamais. on ne s'eft avisé de regarder les treize Cantons Suiffes comme treize Nations diffé

rentes.

Vous fçavez auffi quelle étoit la caufe de l'inimitié des Juifs contre les autres peuples; c'eft l'idolâtrie à laquelle ceuxci étoient livrés pour lors. Vous fçavez enfin quelle étoit la raifon de l'ordre févere qu'avoient reçu les Juifs, d'exterminer les Chananéens; c'étoit le danger que les Juifs, mêlés avec les Idolâtres, ne quit taffent bientôt le culte du vrai Dieu, pour embraffer les fuperftitions de leurs voifins, danger trop bien prouvé par les égaremens réitérés auxquels les Juifs fe. livrerent dans la fuite. Le culte du vrai Dieu étoit-il un objet affez peu important, pour lui préférer la confervation d'un peuple abominable, dont les crimes avoient irrité le Ciel, & dont la malice étoit incorrigible? Cette confervation étoit. elle plus effentielle au bonheur de l'Uni

vers que la vraie Religion? Dieu, qui vouloit détruire les Chananéens, étoit le maître de le faire par tel moyen qu'il jugeoit à propos; les Juifs ne furent que les inftrumens de fa vengeance. Prétendrez-vous, contre le texte de l'Ecriture, que les Chananéens méritoient un traitement plus doux.

Envisageons, fi vous voulez leur deftruction comme un mal phyfique, il fut bientôt réparé avec avantage. Les Juifs, qui ne pouvoient peupler dans le défert, finon par miracle, furent bientôt multipliés dans la Palestine, & rendirent ce pays plus fertile & plus floriffant, qu'il n'avoit jamais été fous les Chananéens : donc, à n'envifager que le bien physique de l'Univers, l'établissement des Juifs ne fut pas un mal.

Tous les Chrétiens ont eu des guerres de Religion, & la guerre eft nuifible aux hommes. Vous avez pris la peine de nous apprendre la véritable caufe des guerres de Religion permi nous, & on la fçavoit déja. Examinez toutes vos précédentes guerres, appellées guerres de Religion, vous trouverez qu'il n'y en a pas une qui n'ait eu fa caufe à la Cour & dans les intérêts des Grands. Des intrigues de cabinet brouil

loient les affaires, & puis les Chefs ameutoient les peuples au nom de Dieu ( a ). La Religion n'étoit donc que le prétexte, & au défaut de celui-là, on auroit bien fçu en trouver d'autre. Pourquoi rejetter fur la Religion les malheurs de ces guerres, dont vous convenez qu'elle n'étoit pas la caufe? ce qui eft arrivé chez nous, eft probablement arrivé de même chez les autres peuples; & l'abus que l'on a fait de la Religion, ne prouve autre chofe, finon que la malice humaine abuse de

tout.

Plufieurs fectes vantent le célibat, & le célibat eft fi nuifible à l'espéce humaine, que s'il étoit fuivi par-tout, elle périroit (b). Si cette objection avoit acquís un dégré de force à chaque fois qu'elle a été répétée, il y a long-temps qu'elle feroit de-. venue infoluble: pas une brochure, pas un miférable écrit contre la Religion où elle ne foit refaffée ; mais vous, Monfieur, qui êtes original en tout, qui n'êtes point fait pour copier perfonne, comment avezvous pu vous réfoudre à la réchauffer encore ?

Il n'y a plus rien de nouveau à vous

(a) Lettre, p. 88. (b) Ibid. page 73.

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