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fait l'éloge, tant que vous avez efpéré leur fuffrage. Vous l'ont-ils refufé? Tout leur mérite s'eft éclipfé. Cela décrédite un peu vos jugemens; on voit que vous diftri buez l'encens ou le blâme, felon la mesure de votre intérêt, Vos fentimens font comme la foi des Miniftres, ils varient felon les circonstances.

Le tableau des Patriarches de la ré forme n'eft pas moins brillant fous votre pinceau (a). Ils fe difent d'abord envoyés pour réformer l'Eglife; on leur demande des preuves de leur miffion, ils répondent qu'il n'en faut point d'autre que l'évidence de leur Doctrine. Réponse dont vous faites fentir le ridicule, en ce que toutes les fectes prétendoient également leur doctrine évidente (b). Mais vous omettez une cir→ conftance effentielle. Quand Muncer, avec fes Anabaptiftes, commença de prêcher une Doctrine. contraire à celle de Luther, ce fier Réformateur lui demanda hautement des preuves de fa miffion, des miracles manifeftes (c). Ainfi il foumettoit les autres à une épreuve dont il trouvoit bon de fe difpenfer lui-même.

Calvin n'agiffoit pas moins conféquem

(a) Troifiéme Lettre, p. 63 & fuiv, (b) Ibid. page 65.

(c) Sleidan, L. 11, édit. de 1635, page 69.

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ment; après avoir bien déclamé contre F'autorité de l'Eglife, & contre la tyrannie Papale, il s'arrogea lui-même à Genève un defpotisme cent fois plus abfolu & plus tyrannique. Quel homme, dites» vous (a), fut jamais plus tranchant, plus impérieux, plus décifif, plus divi» nement infaillible à fon gré, que Calvin; pour qui la moindre oppofition la moindre objection qu'on ofoit lui » faire, étoit toujours une œuvre de Satan, un crime digne du feu? Ce n'eft pas au »feul Servet qu'il en a coûté la vie pour avoir ofé penfer autrement que lui « Et voilà l'Apôtre fufcité de Dieu pour réformer l'Eglife.

Cette contradiction, toujours inhérente à la réforme, a fubfifté jufqu'à nous, & fournit de temps en temps de nouvelles fcènes. La condamnation du Miniftre PetitPierre, dans le Comté de Neuf-Châtel eft récente, & ne fçauroit vous être inconnue. Quel triomphe fur nous, dit naïvement

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un de fes Juges (b), ne donnerions-nous » pas par-là à nos voifins de l'Eglife Ro» maine, qui fans cela n'ont déja que trop mauvaise opinion de notre réforme « ?

(a) Troifiéme Lettre, p. 67.

(b) Voyez l'écrit intitulé: mes Réflexions, piéces justis ficatives, page 134

Et comment les Catholiques pourroientils en avoir bonne opinion, lorfque ceux même qui ont été élevés dans fon fein, comme vous, Monfieur, conviennent qu'elle s'eft établie par la plus ridicule de toutes les comédies?

Sans l'épouvantail de l'Eglife Romaine, il y a long-temps que le grand ouvrage de la réforme feroit plus avancé. La crainte de donner aux Catholiques de nouyeaux fujets de triomphe, engage à conferver, finon l'ancienne Doctrine, du moins l'ancien langage. Si nous tolérons que l'on enfeigne la durée bornée des peines de l'enfer, que diront les Catholiques? Voilà la loi qui a dicté la condamnation de Petit Pierre. Ainfi l'Eglife Romaine, en maintenant parmi fes enfans l'unité de la foi, en conferve encore les reftes chez fes ennemis, malgré eux; elle en obtient par la honte, ce qu'ils ne veulent pas lui accorder pár respect.

Selon vous, les Catholiques prirent le change à la naiffance de la réforme ( a ). Au lieu de chicaner les preuves de leurs adverfaires, ils devoient leur dire.... vous nous faites une guerre ouverte

(a) Troifiéme Lettre, pag. 66 & fuiv. V. l'écrit intisulé mes Réflexions, piéces juftif. pag. 66 & suiv.

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vous foufflez le feu de toutes parts...... >> vous voulez abfolument convertir, contraindre même. Vous dogmatifez, vous prêchez, vous cenfurez, vous anathématifez, vous excommuniez, vous puniffez, vous mettez à mort, vous exer» cez l'autorité des Prophétes, & vous » ne vous donnez que pour des particuliers, &c. « Prenez garde, je vous prie. Ces faits que vous fuppofez certains, & qui le font en effet, font contraires à ce que vous avez foutenu ailleurs. Vous avez dit (a) que les Proteftans ne demandoient d'abord qu'à être foufferts & à vivre en paix; qu'ils n'ont ufé de violence que quand il a fallu repouffer les perfécuteurs: ici vous convenez que les Catholiques pouvoient leur reprocher d'allumer le feu de la perfécution dès leur naiffance. Le mal incurable de la réforme vous a gagné; les contradictions y font inévitables: Calvin, Luther, les Miniftres, vous-même y tombez tous, dès que vous voulez entrer dans quelque discussion théologique.

» Le Clergé Romain rit & les laifle faire (b) α. Non, Monfieur, nous ne

(a) A M. de Beaumont, pages 86 & 87.
(b) Seconde Lettre, page 2.
Partie II.

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rions point: nous pleurons fur l'aveuglement de nos freres; mais peut-être Dieu veut fe fervir de fon excès même pour le guérir.

Vous faites un autre aveu fur le perfonnage que vous avez fait jouer au Vicaire Savoyard (a). » Ce qu'on auroit »pu me reprocher, peut-être, étoit un » défaut de convenance 5 en faifant par» ler un Prêtre Catholique, comme jamais » Prêtre Catholique n'a parlé «. Effectivement, vous l'avez fait parler en vrai Proteftant; ou plutôt vous lui prêtez un langage qui n'eft d'aucune Religion exiftante ni poffible. En voulant le traveftir, vous lui avez fait contracter votre mauvaise habitude de tomber dans des contradictions fréquentes : j'en ai relevé plufieurs.

Enfin, vous convenez que les Catholiques pourront aifément réfuter vos Lettres (b), parce que vous n'avez point affaire ici aux Catholiques, & que vos principes ne font pas les leurs. Vous pouviez ajouter même que vous changez de principes, felon les occurrences, tout comme vous changez les faits. N'importe;

(a) Seconde Lettre, page 59.
b) Troisième Lettre, page 99,

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