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de l'attention, les traite de chimeriques.

THEOTIME. Il y a neanmoins une extrême difference entre ces deux chofes. Car les principes generaux plaifent à l'efprit, qu'ils éclairent par leur évidence; & les phantômes à l'imagination, qui leur donne l'être. Et quoi.

qu'il femble que c'est l'efprit qui formę. ces principes, & generalement toutes les veritez, à caufe qu'elles fe prefentent à lui en confequence de fon attention; je penfe que vous fçavez bien qu'elles font avant nous, & qu'elles ne tirent point leur réalité de l'efficace de nôtre action : car toutes ces veritez im

muables ne font que les rapports qui fe trouvent entre les idées, dont l'existence eft neceffaire & éternelle. Mais les phantômes que produit l'imagination, ou qui fe produifent dans l'imagination par une fuite naturelle des loix generales de l'union de l'ame & du corps, ils n'exiftent que pour un temps.

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ARISTE. Je conviens Theo. time, que rien n'eft plus folide que la verité, & que plus les veritez font ge-. nerales, plus ont-elles de réalité & de lumiere. Theodore m'en a convaincu.

Mais je fuis fi fenfible & fi groffier, que fouvent je n'y trouve point de goût, & que je fuis quelquefois tenté de laiffer tout-là.

THEOTIME. Voilà Theodore. THEODOR E. Vous n'en ferez rien, Arifte. La verité vaut mieux que les oignons & les choux : c'eft une excellente manne.

ARISTE. Fort excellenté, je l'avouë. Mais elle paroît quelquefois bien vuide & bien peu folide. Je n'y trouve pas grand goût : & vous voulez chaque jour qu'on en cueille de nouvelle. Cela n'eft pas trop plaisant.

THEODORE. Hé bien, Arifte, paffons cette journée, comme les Juifs leur Sabbat. Peut-être qu'hier vous travaillâtes pour deux jours.

ARISTE. Affurément, Theodore, je travaillai beaucoup, mais je ne ramaffai rien.

THEODORE. Je vous laiffai pourtant bien en train de tirer des confequences. Comme vous vous y preniez, vous devriez en avoir vos deux mefures bien pleines.

,

ARISTE. Quelles mesures dcux gomor? Donnez donc, Theodore, plus

de

corps

à vos principes, fi vous voulez que j'empliffe ces mefures. Rendezles plus fenfibles & plus palpables. Ils me gliffent entre les doigts: la moindre chaleur les fond: & aprés que j'ai bien travaillé, je trouve que je t'ai

rien.

THEODOR E. Vous vous nourriffez, Arifte, fans y prendre garde. Ces principes qui vous paffent par l'efprit, & qui s'en échappent, y laiffent toûjours quelque lumiere.

ARISTE. Il eft vrai : je le fens bien. Mais recommencer tous les jours, & laiffer là ma nourriture ordinaire ! Ne pourriez-vous point nous rendre plus fenfibles les principes de vôtre Philofophie?

THEODORE. Je crains, Arifte, qu'ils en deviennent moins intelligibles. Croyez-moi, je les rends toûjours les plus fenfibles que je puis. Mais je crains de les corrompre. Il eft permis d'in carner la verité pour l'accommoder à nôtre foibleffe naturelle, & pour foû tenir l'attention de l'efprit, qui ne trouve point de prife à ce qui n'a point de corps. Mais il faut toûjours que le fenfible nous mene à l'intelligible, que la

chair nous conduife à la Raifon, & que la verité paroiffe telle qu'elle eft fans aucun déguifement. Le fenfible n'eft pas le folide. Il n'y a que l'intelligible qui par fon évidence & fa lumiere puiffe nourrir des intelligences. Vous le fçavez. Tâchez de vous en bien fouvenir, & de me fuivre.

ARISTE. De quoi voulez-vous parler?

I. THEODORE. De la Providence generale, ou de la conduite ordinaire que Dieu tient dans le gouvernement

du monde.

Vous avez compris, Arifte, & peutêtre mêmes oublié, que l'Etre infiniment parfait, quoi que fuffifant à luimême, a pû prendre le deffein de former cet Univers: qu'il l'a creé pour lui, pour fa propre gloire: qu'il a mis Jefus-Chrift à la tête de fon ouvrage, l'entrée de fes deffeins ou de fes voyes, afin que tout fût divin: qu'il n'a pas dû entreprendre l'ouvrage le plus parfait qui fût poffible, mais feulement le plus parfait qui pût être produit par voyes les plus fages ou les plus divines; de forte que tout autre ouvrage produit par toute autre voye, ne puiffe expri

les

mer plus exactement les perfections que Dieu poffede, & qu'il fe glorifie de poffeder. Voilà donc , pour ainfi dire, le Créateur prêt à fortir hors de luimême, hors de fon Sanctuaire éternel; prêt à fe mettre en marche pour la production des créatures. Voyons quelque chofe de fa magnificence dans fon ouvrage mais fuivons-le de prés dans les démarches majeftueufes de fa conduite ordinaire.

Pour la magnificence dans fon ouvrage, elle y éclate de toutes parts. De quelque côté qu'on jette les yeux dans l'Univers, on y voit une profufion de prodiges. Et fi nous ceffons de les admirer, c'eft affurément que nous ceffons de les Fonfiderer avec l'attention qu'ils meritent. Car les Aftronomes qui mefurent la grandeur des Aftres, & qui voudroient bien fçavoir le nombre des étoiles, font d'autant plus furpris d'admiration, qu'ils deviennent plus fçavans. Autrefois le Soleil leur paroiffoit grand comme le Peloponefe: mais aujour- Aujour d'hui les plus habiles le trouvent un million de fois plus grand que la terre. Les Anciens ne comptoient que mille vingt-deux étoiles: mais perfonne au

d'hui la

Morée.

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