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fait plus que fuivre ces loix. ARISTE. Que de fagesse dans la Providence generale du Créateur ! THEODOR E. Voulez-vous que Rous remontions un peu à nôtre point de vûë, d'où nous devons jetter les yeux fur les merveilles de la Provi dence?

ARISTE. J'y fuis, ce me femble, Theodore. J'admire & j'adore avec tout le refpect dont je fuis capable la fageffe infinie du Créateur dans la varieté & la jufteffe incomprehenfible des mouvemens divers qu'il a imprimez d'abord à cette petite portion de matiere dans laquelle il a formé tout d'un coup des abeilles pour tous les fiécles. Que dis-je, des abeilles une infinité de vers encore qu'on peut regarder comme des animaux de differente efpece: & il leur a fourni dans un fi petit efpace une nourriture infenfible mille moyens qui nous paffent. Tout cela par rapport aux loix du mouvement: loix fi fimples & fi naturelles, que quoi que Dicu faffle tout par elles dans le cours ordinaire de fa Providence, il femble qu'il ne touche à rien, qu'il ne fe mêle de rien, en un mot qu'il fe repofe.

par

THEODOR E. Vous trouvez donc, Arifte, que cette conduite eft divine, & plus excellente que celle d'un Dieu qui agiroit à tous momens par des volontez particulieres, au lieu de fuivre ces loix generales; ou qui pour se décharger du foin du gouvernement de fon ouvrage, auroit donné des ames à toutes les mouches, ou plûtôt des intelligences affez éclairées pour former leur corps, ou du moins pour les conduire felon leurs befoins, & regler tous leurs travaux ? ARISTE. Quelle comparaifon! III. THEODORE. Courage donc, Arifte, jettez les yeux plus loin. Dans l'inftant que Dieu a donné cette premiere impreffion de mouvement aux parties de cette petite portion de matiere dont il a fait des abeilles, ou tel autre infecte qu'il vous plaira pour tous les fiécles, penfez-vous qu'il ait prévû qué tel de ces petits animaux qui devoit éclore en telle année, devoit auffi à tel jour, telle heure, telles circonftances, faire tourner les yeux à quelqu'un vers l'objet d'une paffion criminelle: ou bien fe venir imprudemment placer dans les narines d'un cheval, & lui faire faire un mouvement -fatal pour le meilleur

Prince du monde, qui par là fe renverfe & fe tuë: mort funefte & qui a une infinité de fuites fâcheufes. Ou. pour ne point combiner le Phyfic avec le Moral, car cela renferme des difficultez dont la refolution dépend de certains principes que je ne vous ai point expliquez; penfez-vous que Dieu ait prévû que cet infecte, par tel de fes mouvemens, a dû produire quelque chose de monftrueux ou de déreglé dans le monde purement materiel?

ARISTE. Qui en doute, que Dieu ait prévû toutes les fuites de cette premiere impreffion de mouvement, qui a formé en un inftant dans cette portion de matiere toute l'efpece de tel infecte. Il a mêmes prévû generalement toutes les fuites des mouvemens infinis, & tous differens, qu'il pouvoit donner d'abord à cette même portion. Il a prévû de plus toutes les fuites de toutes les combinaifons de cette portion de matiere avec toutes les autres, & leurs divers mouvemens felon toutes les fuppofitions poffibles de telles ou telles loix generales.

THEODORE.

Admirez donc,

Ariste, adorez la profondeur de la fa

geffe de Dieu, qui a reglé cette premiere impreffion de mouvement à telle petite portion de matiere, aprés un nombre infini de comparaifons de rapports toutes faites par un acte éternel de fon intelligence. De cette portion de matiere paffez à une autre, & de celle-ci à une troifiéme. Parcourez tout l'Univers, & jugez enfin tout d'une vûë de la fageffe infiniment infinie qui a reglé la premiere impreffion de mouvement, par laquelle s'eft formé tout l'Univers dans toutes les parties & pour tous les temps: de telle maniere que c'eft affurément l'ouvrage le plus beau qui puiffe être produit par les voyes les plus generales & les plus fimples; de telle maniere plûtôt, que l'ouvrage & les voyes expriment mieux les perfections que Dieu poffede, & qu'il fe glorifie de poffeder, que tout autre ouvrage par toute autre voye.

fait

ARISTE. Que d'abîmes, que de profondeurs impenetrables! Que de rapports & de combinaisons de rapports il a fallu confiderer dans la premiere impreffion de la matiere, pour créer l'Univers, & l'accommoder aux loix genetales du mouvement que Dieu fuit dans

le

le cours ordinaire de fa Providence! Vous m'avez placé au veritable point de vûë d'où on découvre la fageffe infinie du Créateur.

THEODORE. Sçavez-vous, Arifte, que vous ne voyez encore rien ? ARISTE. Comment rien?

IV. THEODORE. Beaucoup, Arifte: mais comme rien par rapport au refte. Vous avez jetté la vûë fur les combinaifons infiniment infinies des mouvemens de la matiere. Mais combinez le Phyfic avec le Moral, les mouvemens des corps avec les volontez des Anges & des hommes. Combinez de plus le naturel avec le furnaturel, & rapportez tout cela à Jefus-Christ & à fon Eglife. Car puis que c'eft le principal des def feins de Dieu, il n'eft pas vrai-fembla

ble

que dans la premiere impreffion que Dieu a communiqué à la matiere, il ait negligé de regler fon action fur le rapport que les mouvemens pouvoient avoir avec fon grand & fon principal ouvrage. Comprenez donc avec quelle fagefle il a fallu regler les premiers mouvemens de la matiere, s'il eft vrai que l'Ordre de la nature cft fubordonné à celui de la grace; s'il eft vrai que

Tome II.

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