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DES SELS

LES matières falines font celles qui ont de la faveur; mais d'où leur vient cette propriété qui nous eft fi sensible, & qui affecte les fens du goût, de l'odorat & même celui du toucher? quel eft ce principe falin? comment & quand a-t-il été formé il étoit certainement contenu & relégué dans l'atmosphère, avec toutes les autres matières volatiles dans le temps de l'incandefcence du Globe; mais après la chute des eaux & la dépuration de l'atmosphère, la première combinaison qui s'est faite dans cette fphère encore ardente, a été celle de l'union de l'air & du feu ; cette union a produit l'acide primitif: toutes les matières aqueuses, terreuses ou métalliques avec lesquelles cet acide primitif a pu se combiner, font devenues des fubftances falines, & comme cet acide s'eft formé par la seule union de l'air avec le feu, il me paroît que ce premier acide le plus fimple & le plus pur de tous, est l'acide aérien, auquel les Chimistes récens ont donné le nom d'acide méphitique, qui n'eft que de l'air fixe, c'est-à-dire, de l'air fixé par le feu.

Cet acide primitif eft le premier principe salin; il a produit tous les autres acides & alkalis; il n'a pu fe combiner d'abord qu'avec les verres primitifs, puisque les autres matières n'existoient pas encore; par fon union avec cette terre vitrifiée, il a pris plus de maffe & acquis Minéraux, Tome II.

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plus de puissance, & il est devenu acide vitriolique, qui étant plus fixe & plus fort s'eft incorporé avec toutes les fubftances qu'il a pu pénétrer; l'acide aérien plus volatil, fe trouve univerfellement répandu, & l'acide vitriolique réside principalement dans les argiles & autres détrimens des verres primitifs; il s'y manifefte fous la forme d'alun: ce second acide a auffi taifi dans quelques lieux, les fubftances calcaires & a formé les gypses; il a faifi la plupart des minéraux métalliques, & leur a caufé de grandes altérations; il en a pour ainfi dire converti quelques-uns dans fa propre fubftance, en leur donnant la forme du vitriol.

En fecond lieu,' l'acide primitif que je désignerai dorénavant par le nom d'acide aérien, s'eft uni avec les matières métalliques qui, comme les plus pefantes, font tombées les premières fur le globe vitrifié; & en agiffant fur ces minérais métalliques, il a formé l'acide arfenical ou l'arfenic, qui ayant encore plus de maffe que le vitriolique, a auffi plus de force, & de tous eft le plus corrosif; il se présente dans la plupart des mines dont il a minéralifé & corrompu les fubftances.

Enfuite, mais plusieurs fiècles après, cet acide primitif; en s'uniffant à la matière calcaire a formé l'acide marin, qui est moins fixe & plus léger que l'acide vitriolique, & qui par cette raison, s'est plus universellement répandu, & fe préfente fous la forme de fel gemme, dans le fein de la terre, & fous celle de fel marin, dans l'eau de

toutes les mers; cet acide marin n'a pu fe former qu'après la naiffance des coquillages, puifque la matière calcaire n'exiftoit pas auparavant.

Peu de temps après, ce même acide aérien & primitif est entré dans la compofition de tous les corps organifés, & se combinant avec leurs principes, il a formé par la fermentation, les acides animaux & végétaux, & l'acide nitreux par la putréfaction de leurs détrimens; car il est certain que cet acide aérien exifte dans toutes les fubftances animales ou végétales, puisqu'il s'y manifeste sous sa forme primitive d'air fixe; & comme on peut le retirer fous cette même forme, tant de l'acide nitreux que des acides vitriolique & marin, & même de l'arfenic, on ne peut douter qu'il ne faffe partie conftituante de tous ces acides qui ne font que fecondaires, & qui, comme l'on voit, ne font pas fimples, mais compofés de cet acide primitif différemment combiné, tant avec la matière brute qu'avec les fubftances organisées.

Cet acide primitif réfide dans l'atmosphère, & y réside en grande quantité fous fa forme active; il eft le principe & la caufe de toutes les impreffions qu'on attribue aux élémens humides; il produit la rouille du fer, le vertde-gris du cuivre, la cérufe du plomb, &c. par l'action qu'il donne à l'humidité de l'air; mêlé avec les eaux pures, il les rend acides ou acidules, il aigrit les liqueurs fermentées; avec le vin il forme le vinaigre; enfin, il me paroît être le feul & vrai principe, non-feulement

de tous les acides, mais de tous les alkalis, tant minéraux que végétaux & animaux.

On peut le retirer du natron ou alkali qu'on appelle minéral, ainfi que de l'alkali fixe végétal, & encore plus abondamment de l'alkali volatil, en forte qu'on doit réduire tous les acides & tous les alkalis à un seul principe falin, & ce principe eft l'acide aérien qui a été le premier formé, & qui est le plus fimple, le plus pur de tous, & le plus univerfellement répandu; cela me paroît d'autant plus vrai que nous pouvons par notre art, rappeler à cet acide tous les autres acides, ou du moins les rapprocher de fa nature, en les dépouillant par des opérations appropriées, de toutes les matières étrangères avec lef quelles il se trouve combiné dans ces fels; & que de même, il n'est pas impoffible de ramener les alkalis à l'état d'acide, en les féparant des substances animales & végétales avec lesquelles tout alkali fe trouve toujours uni; car quoique la Chimie ne foit pas encore parvenue à faire cette converfion ou ces réductions, elle en a affez fait pour qu'on puiffe juger par analogie de leur poffibilité: le plus ingénieux des Chimiftes, le célèbre Sthal, a regardé l'acide vitriolique comme l'acide univerfel, & comme le feul principe falin; c'est la première idée d'après laquelle il a voulu établir fa théorie des fels; il a jugé que quoique la Chimie n'ait pu jusqu'à ce jour, ramener démonftrativement les alkalis à l'acide, c'est-àdire, réfoudre ce que la Nature a combiné, il ne falloit

s'en prendre qu'à l'impuiffance de nos moyens. Rien n'eft mieux vu, ce grand Chimiste a ici confulté la fimplicité de la Nature, il a fenti qu'il n'y avoit qu'un principe falin, & comme l'acide vitriolique eft le plus puiffant des acides, il s'est cru fondé à le regarder comme l'acide primitif; c'étoit ce qu'il pouvoit penser de mieux dans un temps où l'on n'avoit que des idées confufes de l'acide aérien, qui eft non - seulement plus fimple, mais plus univerfel que l'acide vitriolique; mais lorsque cet habile homme a prétendu que fon acide universel & primitif n'est compofé que de terre d'eau, il n'a fait que mettre en avant une fuppofition dénuée de preuves & contraire à tous les phénomènes, puifque de fait, l'air & le feu entrent peut-être plus que la terre & l'eau dans la substance de tout acide, & que ces deux élémens constituent feuls l'effence de l'acide primitif.

Des quatre élémens qui font les vrais principes de tous les corps, le feu seul est actif, & lorsque l'air, la terre & l'eau exercent quelque impression, ils n'agiffent que par le feu qu'ils renferment, & qui feul peut leur donner une puissance active; l'air fur-tout dont l'effence est plus voisine de celle du feu que celle des deux derniers élémens, est auffi plus actif. L'atmosphère est le réceptacle général de toutes les matières volatiles; c'est auffi le grand magafin de l'acide primitif, & d'ailleurs tout acide confidéré en lui-même, fur-tout lorfqu'il eft concentré, c'est-à-dire, féparé autant qu'il eft poffible

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