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» que

de ta tige brisée suintent des gouttes rouges! Ah! fleur mau» dite, comme elle a poussé dans mon âme! »

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Tu radotes, mon cher, lui dit Blondet, je t'accorde qu'il y avait une jolie fleur, mais elle n'était point idéale, et au lieu de chanter comme un aveugle devant une niche vide, tu devrais songer à te laver les mains pour faire ta soumission au pouvoir et te ranger. Tu es un trop grand artiste pour être un homme politique, tu as été joué par des gens qui ne te valaient pas. Pense à te faire jouer encore, mais ailleurs,

Marie ne saurait m'empêcher de l'aimer, dit Nathan. J'en ferai ma Béatrix.

Mon cher, Béatrix était une petite fille de douze ans que Dante n'a plus revue; sans cela aurait-elle été Béatrix ? Pour se faire d'une femme une divinité, nous ne devons pas la voir avec un mantelet aujourd'hui, demain avec une robe décolletée, après demain sur le boulevard, marchandant des joujoux pour son petit dernier. Quand on a Florine, qui tour à tour est duchesse de vaudeville, bourgeoise de drame, négresse, marquise, colonel, paysanne en Suisse, vierge du Soleil au Pérou, sa seule manière d'être vierge, je ne sais pas comment on s'aventure avec les femmes du monde.

Du Tillet, en terme de Bourse, exécuta Nathan, qui, faute d'argent, abandonna sa part dans le journal. L'homme célèbre n'eut pas plus de cinq voix dans le collége où le banquier fut élu.

Quand, après un long et heureux voyage en Italie, la comtesse de Vandenesse revint à Paris, l'hiver suivant, Nathan avait justifié toutes les prévisions de Félix : d'après les conseils de Blondet, il parlementait avec le pouvoir. Quant aux affaires personnelles de cet écrivain, elles étaient dans un tel désordre qu'un jour, aux ChampsÉlysées, la comtesse Marie vit son ancien adorateur à pied,dans le plus triste équipage, donnant le bras à Florine. Un homme indifférent est déjà passablement laid aux yeux d'une femme ; mais quand elle ne l'aime plus, il paraît horrible, surtout lorsqu'il ressemble à Nathan. Madame de Vandenesse eut un mouvement de honte en songeant qu'elle s'était intéressée à Raoul. Si elle n'eût pas été guérie de toute passion extra-conjugale, le contraste que présentait alors le comte, comparé à cet homme déjà moins digne de la faveur publique, eût suffi pour lui faire préférer son mari à un ange.

Aujourd'hui, cet ambitieux, si riche en encre et si pauvre en

vouloir, a fini par capituler et par se caser dans une sinécure, comme un homme médiocre. Après avoir appuyé toutes les tentatives désorganisatrices, il vit en paix à l'ombre d'une feuille ministérielle. La croix de la Légion-d'Honneur, texte fécond de ses plaisanteries, orne sa boutonnière. La paix à tout prix, sur laquelle il avait fait vivre la rédaction d'un journal révolutionnaire, est l'objet de ses articles laudatifs. L'Hérédité, tant attaquée par ses phrases saint-simoniennes, il la défend aujourd'hui avec l'autorité de la raison. Cette conduite illogique a son origine et son autorité dans le changement de front de quelques gens qui, durant nos dernières évolutions politiques, ont agi comme Raoul.

Aux Jardies, décembre 1838.

FIN.

LA FEMME ABANDONNÉE.

A MADAME LA DUCHESSE D'ABRANTÈS,

Son affectionné serviteur,

HONORÉ DE BALZAC.

Paris, août 1835.

En 1822, au commencement du printemps, les médecins de Paris envoyèrent en basse Normandie un jeune homme qui relevait alors d'une maladie inflammatoire causée par quelque excès d'étude, ou de vie peut-être. Sa convalescence exigeait un repos complet, une nourriture douce, un air froid et l'absence totale de sensations extrêmes. Les grasses campagnes du Bessin et l'existence pâle de la province parurent donc propices à son rétablissement.

Il vint à Bayeux, jolie ville situé à deux lieues de la mer, chez une de ses cousines, qui l'accueillit avec cette cordialité particulière aux gens habitués à vivre dans la retraite, et pour lesquels l'arrivée d'un parent ou d'un ami devient un bonheur.

A quelques usages près, toutes les petites villes se ressemblent. Or, après plusieurs soirées passées chez sa cousine madame de Sainte-Sevère, ou chez les personnes qui composaient sa compagnie, ce jeune Parisien, nommé monsieur le baron Gaston de Nueil, eut bientôt connu les gens que cette société exclusive regardait comme étant toute la ville. Gaston de Nueil vit en eux le personnel immuable que les observateurs retrouvent dans les nombreuses capitales de ces anciens États qui formaient la France d'autrefois.

C'était d'abord la famille dont la noblesse, inconnue à cinquante lieues plus loin, passe, dans le département, pour incontestable et

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