change rien à cette inclinaifon. M. le Chevalier de Lamanon m'écrit, qu'étant fur le Pic de Ténériffe, à 1900 toifes au deffus du niveau de la mer, il avoit obfervé que l'inclinaifon de l'aiguille étoit la même qu'à Sainte-Croix; ce qui femble prouver que les émanations du globe qui produisent l'électricité & le magnétisme s'élèvent à une très-grande hauteur dans les climats chauds (a); au refte, l'inclinaifon & la déclinaifon font fujettes à des trépidations prefque continuelles de jour en jour, d'heure en heure, &, pour ainfi dire, de moment à moment.

Les aiguilles des bouffeles verticales doivent être faites & placées de manière que leur centre de gravité coincide avec leur centre de mouvement, lieu que, dans les bouffoles horizontales, le centre du mouvement de l'aiguille eft un peu plus élevé que fon centre de gravité.

Lorfqu'on commence à mettre en mouvement cette aiguille placée verticalement, elle fe meut par des ofcillations qu'on a voulu comparer à celles du pendule de la gravitation; mais les effets qu'ils préfentent font très-différens; car la direction de cette aiguille, dans fon inclinaifon, varie felon les différens lieux,

(a) Lettre de M. le Chevalier de Lamanon à M. de Buffon, datée des Ifles Canaries, 178).

au lieu

au lieu que celle du pendule eft conftante dans tous les lieux de la terre, puifqu'elle est toujours perpendiculaire à la furface du globe.

Nous avons dit que les particules de la limaille de fer font autant de petites aiguilles, qui prennent des poles par le contact de l'Aimant; ces aiguilles fe dreffent perpendiculairement fur les deux poles de l'Aimant, mais la position de ces particules aimantées devient d'autant plus oblique, qu'elles font plus éloignées de ces mêmes poles, & jufqu'à l'équateur de l'Aimant, où il ne leur refte qu'une attraction fans inclinaison. Cet équateur eft le point de partage entre les deux directions & inclinaifons en fens contraire; & nous devons obferver que cette ligne de féparation des deux courans magnétiques, ne fe trouve pas précifément à la même distance des deux poles, dans les Aimans non plus que dans le globe terreftre, & qu'elle est toujours à une moindre distance du pole le plus foible. Les particules de limaille s'attachent horizontalement sur cette partie de l'équateur des Aimans, & leur inclinaifon ne fe manifefte bien fenfi-. blement, qu'à quelque distance de cette partie équatoriale; la limaille commence alors à s'incliner fenfiblement vers l'un & l'autre poles en-deçà & au-delà de cet équateur; fon inclinaifon vers le pole auftral eft donc à contre-fens de la première, qui tend au pole boréal de l'Aimant, & cette limaille fe dreffe Aimant. Ꮓ

de même perpendiculairement fur le pole austral comme fur le pole boréal. Ces phénomènes font conftans dans tous les Aimans ou fer aimanté; & comme le globe terreftre poffède en grand les mêmes puiffances que l'Aimant nous préfente en petit, l'aiguille doit être perpendiculaire par une inclinaifon de quatre-vingtdix degrés fur les poles magnétiques du globe; ainsi, les lieux où l'inclinaifon de l'aiguille fera de quatrevingt-dix degrés, feront en effet les vrais poles magnétiques fur la terre.

Nous n'avons rien négligé pour nous procurer toutes les obfervations qui ont été faites jufqu'ici fur la déclinaifon & l'inclinaifon de l'aiguille aimantée (b). Nous croyons que perfonne, avant nous, n'en avoit recueilli un auffi grand nombre; nous les avons comparées avec foin, & nous avons reconnu que c'est aux environs de l'équateur que l'inclinaison eft prefque toujours. nulle; que l'équateur magnétique eft au-deffus de l'équateur terreftre dans la partie de la mer des Indes, fituée vers le quatre-vingt-dix-feptième degré de longitude (c), & qu'il paroît, au contraire, au-deffous

(b) De tous nos voyageurs, M. Eckberg & M. le Gentil, favant Aftronome de l'Académie des Sciences, font ceux qui ont donné le plus d'attention à l'inclinaifon de l'Aimant dans les régions qu'ils ont parcourues,

(c) Nous devons remarquer que, dans les articles de la déclinaison

de la ligne dans la portion de la mer Pacifique, qui correspond au cent quatre-vingt-dix-feptième degré : on peut donc conjecturer que le pole magnétique est éloigné vers l'eft du pole de la terre, relativement aux mers des Indes & Pacifique; & par conféquent il doit être fitué dans les terres les plus feptentrionales de l'Amérique, ainsi que nous l'avons déja dit. Dans la mer atlantique, l'efpace où l'aiguille a été 201 observée fans déclinaison (d), fe prolonge jufqu'au cinquante-huitième degré de latitude auftrale, &» à l'égard de fon étendue vers le nord, on le peut fuivre jufqu'au trente-cinquième degré, ou environ, de latitude, ce qui lui donneroit en tout quatre-vingt-treize degrés de longueur, fi l'on avoit fait, jufqu'à préfent, affez d'observations pour que nous fuffions affurés qu'il n'eft interrompu par aucun endroit où l'aiguille décline de plus de deux degrés vers l'eft ou vers l'ouest. Cet espace, ou cette bande fans déclinaifon, peut fur-tout

& de l'inclinaison de l'Aimant, nous avons toujours compté les longitudes à l'eft du méridien de Paris.

M.

(d) Je dois obferver ici que j'ai regardé comme nulles toutes les déclinaifons qui ne s'étendoient pas à deux degrés au-deffus de zéro, parce que les variations diurnes, & fur-tout les accidens des aurores boréales & des tempêtes, font fouvent changer la direction de l'aiguille de plus de deux degrés.

être interrompue dans le voifinage des Continens & des Ifles. Car on ne peut douter que la proximité des terres n'influe beaucoup fur la direction de l'aiguille. Cette déviation dépend des maffes ferrugineufes qui peuvent fe trouver à la furface de ces terres, & qui agiffant fur le magnétifme général, comme autant de poles magnétiques particuliers, doivent fléchir fon cours, & en changer plus ou moins la direction: & fi le voisinage de certaines côtes a paru, au contraire, repouffer l'aiguille aimantée, la nouvelle direction de l'aiguille n'a point été dans ces cas particuliers l'effet d'une répulfion qui n'a été qu'apparente; mais elle a été produite par le magnétisme général, ou par l'attraction particulière de quelques autres terres plus ou moins éloignées, & dont l'action aura ceffé d'être troublée dans le voifinage de certaines côtes dépourvues de mines de fer ou d'Aimant. Lors donc qu'à l'approche des terres l'aiguille aimantée éprouve conftamment des changemens très-marqués dans fa déclinaifon, on peut en conclure l'existence ou le défaut de mines de fer ou d'Aimant dans ces mêmes terres, fuivant qu'elles attirent ou repouffent l'aiguille ai

mantée.

En général, les bandes fans déclinaison fe trouvent toujours plus près des côtes orientales des grands Continens, que des côtes occidentales: celle qui a été obfervée dans la mer Atlantique, eft, dans tous fes