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d'affirmer d'aucun fait, qu'il est contraire aux lois de la nature morale, c'est-à-dire, que personne n'a le droit d'affirmer d'aucune action qu'elle est juste ou injuste, c'est-àdire, qu'il n'existe ni crime ni vertu.

Disons-le, puisqu'il est vrai: un parricide pourra sans crainte comparoître au tribunal du déiste. En vain, pėnė

< physiques, qu'il y a, même parmi nous, bien peu de gens en état « de comprendre ces principes, loin de pouvoir les trouver d'eux« mêmes. De sorte que toutes les définitions de ces savants hommes, << d'ailleurs en perpétuelle contradiction entre elles, s'accordent seule<< ment en ceci, qu'il est impossible d'entendre la loi de nature, et par « conséquent d'y obéir, sans être un très-grand raisonneur et un pro« fond métaphysicien........ Connoissant si peu la nature, et s'accordant si << mal sur le sens du mot loi, il seroit bien difficile de convenir d'une << bonne définition de la loi naturelle. Aussi toutes celles qu'on trouve << dans les livres, outre le défaut de n'être point uniformes, ont-elles << encore celui d'être tirées de plusieurs connoissances que les hommes << n'ont point naturellement, et des avantages dont ils ne peuvent con« cevoir l'idée qu'après être sortis de l'état de nature. On commence << par rechercher les règles dont, pour l'utilité commune, il seroit à « propos que les hommes convinssent entre eux, et puis on donne le <<nom de loi naturelle à la collection de ces règles, sans autre preuve « que le bien qu'on trouve qui résulteroit de leur pratique universelle. << Voilà assurément une manière très-commode de composer des défi<< nitions, et d'expliquer la nature des choses par des convenances « presque arbitraires.

<< Mais tant que nous ne connoîtrons pas l'homme naturel, c'est en <<< vain que nous voudrons déterminer la loi qu'il a reçue, ou celle qui << convient le mieux à sa constitution. Tout ce que nous pouvons voir « très-clairement au sujet de cette loi, c'est que non-seulement pour « qu'elle soit loi, il faut que la volonté de celui qu'elle oblige puisse s'y << soumettre avec connoissance; mais il faut encore, pour qu'elle soit << naturelle, qu'elle parle immédiatement par la voix de la nature. >> Rousseau, Disc. sur l'origine et le fondement de l'inégalité parmi les hommes. Préface, p. 41, 42, 43. Ed. de 1793. Notez que les déistes ne reconnoissent d'autre loi que la loi naturelle, qu'on ne connoît point, dit Rousseau. Mais, à force de chercher, ils la trouveront peutêtre. Que sait-on?

trés d'horreur, tous les hommes s'écrieront; Il a violé la -loi la plus sacrée de la nature ! S'il est fidèle à sa doctrine, le déiste répondra :

<< Pour juger sûrement que ce parricide a violé les lois « de la nature, il faudroit les connoitre toutes; car une << seule qu'on ne connoitroit pas pourroit en certains cas, <«< inconnus aux spectateurs, changer celles que l'on con«< noîtroit. Ainsi celui qui prononce qu'un tel ou tel acte « est un crime, ou une violation des lois naturelles, dé«clare qu'il connoît toutes les lois de la nature, et qu'il << sait que cet acte en est une violation. Mais quel est ce «mortel, qui connoît toutes les lois de la nature? Rousseau <«< ne se vantoit pas de les faire connoître. Un homme sage, <«< témoin d'un fait inouï, peut attester qu'il a vu ce fait, et << l'on peut le croire; mais ni cet homme sage, ni nul autre <«< homme sage sur la terre n'affirmera jamais que ce fait, «< quelque étonnant qu'il soit, soit un crime ou un acte «< contraire à la nature et à ses lois, car comment peut-il «<le savoir?

« Mon frère, vous avez trempé vos inains dans le sang « de l'auteur de vos jours; c'est un fait étonnant, inouï, «<et je crois les hommes sages qui l'attestent: mais ce fait << est-il un crime? Comment puis-je le savoir, moi qui suis << si loin de connoître toutes les lois de la nature? Qui « m'assurera que ce fait, dépendant d'une loi que j'ignore, <«< n'est pas un acte aussi naturel que les actes contraires, « n'est pas une vertu? Rien n'autorise un mortel à pro

« noncer.

« Tout ce qu'on peut dire, c'est que vous avez fait une « chose fort_extraordinaire; mais qui est-ce qui nie qu'il « se fasse des choses fort extraordinaires? J'en ai vu, « moi, de ces choses-là, et même j'en ai fait'.

4 Lettres écrites de la Montagne, p. 107. Rousseau parle des pres

<< Allez donc en paix. Quel est le sage qui oseroit vous «< condamner, lorsque la nature vous absout peut-être? « Écoutez seulement quelques conseils utiles à ceux qui se « sentent portés à faire des choses extraordinaires : prenez « garde aux mortels qui s'imaginent connoître toutes les lois de la nature, ou qui jugent et agissent comme s'ils << les connoissoient; précautionnez-vous soigneusement <«< contre l'intolérance des lois de la société civile, de cette a société de tout point contraire à la nature; et défiez-vous « de vos fils, si vous en avez. »

Pour nier que ces conséquences, aussi absurdes qu'horribles et que Rousseau lui-même auroit détestées, ne découlent pas nécessairement du principe qu'il établit, il faudroit prouver deux choses que très-certainement on ne prouvera jamais: qu'il n'existe point de lois de la nature morale, comme il existe des lois de la nature physique ; ou que, ne connoissant pas toutes les lois de la nature physique, nous connoissons toutes celles de la nature morale.

Il suit encore de ce que dit Rousseau, que personne ne peut affiriner que les miracles de Jésus-Christ ne sont pas de vrais miracles; et il l'avoue en termes formels.

<«< Remarquez-bien qu'en supposant tout au plus quel« que amplification dans les circonstances 1, je n'établis « aucun doute sur le fond des faits. Que devons-nous

tiges opérés par des charlatans, et qui offrent l'apparence d'une exception aux lois de l'ordre physique. Il s'agit, dans le discours que nous prêtons au déiste, d'exceptions aux lois de l'ordre moral. Tous ceux qui ont lu les Confessions savent qu'il s'y trouve, dans cet ordre aussi, des choses fort extraordinaires, et que Rousseau auroit pu dire avec la même vérité, j'en ai vu, et même j'en ai fait.

1 Quelque amplification dans les circonstances, par exemple, de la résurrection d'un mort.

2 Lettres écrites de la Montagne, p. 115.

<< donc penser de tant de miracles rapportés par des au«teurs véridiques (les Évangélistes)?... Faut-il rejeter tous « ces faits? Non. Faut-il tous les admettre? Je l'ignore. « Nous devons les respecter sans prononcer sur leur <<< nature1. »

Et encore: «Ne prenez pas ici le change, je vous sup«< plie; et, de ce que je n'ai pas regardé les miracles «< comme essentiels au christianisme, n'allez pas conclure « que j'ai rejeté les miracles. Non, je ne les ai rejetés ni « ne les rejette si j'ai dit des raisons pour en douter,

je n'ai point dissimulé les raisons d'y croire; il y a « une grande différence entre nier une chose et ne pas « l'admettre; et j'ai si peu décidé ce point que je défie « qu'on trouve un seul endroit dans tous mes écrits où je sois affirmatif contre les miracles. Eh! comment l'au«rois-je été malgré mes propres doutes 2? »

Puisqu'il est impossible que les œuvres de Jésus-Christ fussent réellement miraculeuses, supposons qu'elles le fussent en effet, mais que les hommes, comme Rousseau le prétend, n'eussent aucun moyen de s'en assurer; et voyons ce qui résultera de cette supposition.

Dans vingt endroits de l'Évangile, Jésus-Christ rappelle aux Juifs, en preuve de sa mission, les prodiges qu'il opéroit. « J'ai un témoignage plus grand que celui de Jean. «Car les œuvres que le Père m'a donné d'accomplir, les « œuvres que je fais, rendent témoignage que le Père m'a « envoyés. »

Un jour qu'il se promenoit dans le temple, sous le por

1 Lettres écrites de la Montagne, p. 116, 117.

2 lbid., p. 125.

5 Ego autem habeo testimonium majus Joanne. Opera enim, quæ dedit mihi Pater ut perficiam ea; ipsa opera, quæ ego facio, testimonium perhibent de me, quia Pater misit me. Joann., v, 35, 36.

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tique de Salomon, « les Juifs l'environnèrent, disant : Jus« qu'à quand nous tenez-vous en suspens? Si vous êtes «<le Christ, dites-le-nous clairement. Jésus leur répondit: « Je vous parle, et vous ne me croyez point. Les œuvres «que je fais au nom de mon Père rendent témoignage de <«< moi; mais vous, vous ne croyez point, parce que vous «.n'êtes pas de mes brebis. Si vous ne voulez pas me croire, « croyez à mes œuvres, et connoissez et croyez que le « Père est dans moi, et que je suis dans le Père1. »

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Une autre fois deux disciples de Jean vinrent le trouver, et lui dirent: « Jean-Baptiste nous a envoyés vers vous, « disant: Êtes-vous celui qui doit venir, ou devons-nous « en attendre un autre? (Or, à ce moment même, il guérit beaucoup de malades de leurs langueurs, et de leurs plaies, et il chassa des esprits malins, et il rendit la vue « à un grand nombre d'aveugles.) Jésus leur répondit: << Allez, et rapportez à Jean ce que vous avez entendu et a vu; que les aveugles voient, les boiteux marchent, les

↑ Et ambulabat Jesus in templo, in porticu Salomonis. Circumdederunt ergo eum Judæi, et dicebant ei: Quousquè animam nostram tollis? Si tu es Christus, die nobis palàm. Respondit eis Jesus: Loquor vobis, et non creditis. Opera quæ ego facio in nomine Patris mei, hæc testimonium perhibent de me: sed vos non creditis, quia non estis ex ovibus meis..... Si mihi non vultis credere, operibus credite, ut cognoscatis, et credatis, quia Pater in me est, et ego in Patre. Joann., x, 24, 25, 26. Vid. et. xiv, 12.

2 Aucune de ces guérisons merveilleuses ne satisfait entièrement Rousseau. « Tout ce qu'on en pourra dire, c'est qu'elles sont surpre<< nantes; mais.... comment prouverez-vous que ce sont des mira«cles? » C'est toujours là son embarras, et il est en vérité bien cruel que Dieu l'y laisse; « car enfin, ajoute-t-il, il y a pourtant, je l'avoue, << des choses qui m'étonneroient fort, si j'en étois le témoin ce ne « seroit pas tant de voir marcher un boiteux, qu'un homme qui n'au«roit point de jambes.... Cela me frapperoit encore plus que de voir << ressusciter un mort. » (Lettres écrites de la Montagne, p. 111.) Et moi aussi, rien ne me frapperoit autant que de voir un homme mar

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