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pute, à laquelle, au lieu où je l'ai mise, la page
qui précède ou celle qui suit ne serve de réponse,
et que je n'aie prise en un sens différent de celui
lui donnent mes accusateurs. Vous verrez,
que
avant la fin de ces lettres, des preuves de cela qui
vous surprendront.

Mais qu'il y ait des propositions fausses, répréhensibles, blâmables en elles-mêmes, cela suffit-il pour rendre un livre pernicieux? Un bon livre n'est pas celui qui ne contient rien de mauvais ou rien qu'on puisse interpréter en mal; autrement il n'y auroit point de bons livres mais un bon livre est celui qui contient plus de bonnes choses que de mauvaises; un bon livre est celui dont l'effet total est de mener au bien, malgré le mal qui peut s'y trouver. Eh! que seroit-ce, mon Dieu! si dans un grand ouvrage, plein de vérités utiles, de leçons d'humanité, de piété, de vertu, il étoit permis d'aller cherchant avec une maligne exactitude toutes les crreurs, toutes les propositions équivoques, suspectes, ou inconsidérées, toutes les inconséquences qui peuvent échapper dans le détail à un auteur surchargé de sa matière, accablé des nombreuses idées qu'elle lui suggère, distrait des unes par les autres, et qui peut à peine assembler dans sa tête toutes les parties de son vaste plan; s'il étoit permis de faire un amas de toutes ses fautes, de les aggraver les unes par les autres, en rap

prochant ce qui est épars, en liant ce qui est isolé: puis, taisant la multitude de choses bonnes et louables qui les démentent, qui les expliquent, qui les rachètent, qui montrent le vrai but de l'auteur, de donner cet affreux recueil pour celui de ses principes, d'avancer que c'est là le résumé de ses vrais sentiments, et de le juger sur un pareil extrait? Dans quel désert faudroit-il fuir, dans quel antre faudroit-il se cacher pour échapper aux poursuites de pareils hommes, qui, sous l'apparence du mal, puniroient le bien, qui compteroient pour rien le cœur, les intentions, la droiture par-tout évidente, et traiteroient la faute la plus légère et la plus involontaire comme le crime d'un scélérat? Y a-t-il un seul livre au monde, quelque vrai, quelque bon, quelque excellent qu'il puisse être, qui pût échapper à cette infame inquisition? Non, monsieur, il n'y en a pas un, pas un seul, non pas l'Évangile même; car le mal qui n'y seroit pas, ils sauroient l'y mettre par leurs extraits infidéles, par leurs fausses interpré

tations.

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« Nous vous déférons, oseroient-ils dire, un li«vre scandaleux, téméraire, impie, dont la morale est d'enrichir le riche et de dépouiller le ❝ pauvre; d'apprendre aux enfants à renier leur « mère et leurs frères, de s'emparer sans scru

· Matth., x11, 12; Luc, xx, 26.—2 Matth., x11, 48; Marc, m, 33.

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pule du bien d'autrui', de n'instruire point les « méchants, de peur qu'ils ne se corrigent et qu'ils ne soient pardonnés, de haïr père, mère, femme, enfants, tous ses proches3; un livre où « l'on souffle par-tout le feu de la discorde, où l'on « se vante d'armer le fils contre le père, les parents << l'un contre l'autre, les domestiques contre leurs << maîtres, où l'on approuve la violation des lois, « où l'on impose en devoir la persécution, où, « pour porter les peuples au brigandage, on fait << du bonheur éternel le prix de la force et la conquête des hommes violents 1o. »

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Figurez-vous une ame infernale analysant ainsi tout l'Évangile, formant de cette calomnieuse analyse, sous le nom de Profession de foi évangélique, un écrit qui feroit horreur, et les dévots pharisiens prônant cet écrit d'un air de triomphe comme l'abrégé des leçons de Jésus-Christ. Voilà pourtant jusqu'où peut mener cette indigne méthode. Quiconque aura lu mes livres, et lira les imputations de ceux qui m'accusent, qui me jugent, qui me condamnent, qui me poursuivent, verra que c'est ainsi que tous m'ont traité.

Je crois vous avoir prouvé que ces messieurs ne

'Marc., XI, 2; Luc, xix, 30.—2 Marc, IV, 12; Jean, XII, 40. —3 Luc, xiv, 26.-4 Matth., x, 34; Luc, x11, 51, 52.- Matth., x, 35; Luc, XII, 53.—6 Ibid.-7 Matth., x, 36.—8 Matth., XII, 2 et seq.- 9 23. Matth., XI, 12. Luc, XIV,

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m'ont

pas jugé selon la raison: j'ai maintenant à vous prouver qu'ils ne m'ont pas jugé selon les lois. Mais laissez-moi reprendre un instant haleine. A quels tristes essais me vois-je réduit à mon âge! Devois-je apprendre si tard à faire mon apologie? Étoit-ce la peine de commencer?

LETTRE II.

De la religion de Genève. Principes de la réformation. L'auteur entame la discussion des miracles.

J'ai supposé, monsieur, dans ma précédente lettre, , que j'avois commis en effet contre la foi les erreurs dont on m'accuse, et j'ai fait voir que ces erreurs, n'étant point nuisibles à la société, n'étoient pas punissables devant la justice humaine. Dieu s'est réservé sa propre défense et le châtiment des fautes qui n'offensent que lui. C'est un sacrilège à des hommes de se faire les vengeurs de la Divinité, comme si leur protection lui étoit nécessaire. Les magistrats, les rois, n'ont aucune autorité sur les ames; et pourvu qu'on soit fidèle aux lois de la société dans ce monde, ce n'est point à eux de se mêler de ce qu'on deviendra dans l'autre, où ils n'ont aucune inspection. Si l'on perdoit ee principe de vue, les lois faites les lois faites pour le bonheur

du genre humain en seroient bientôt le tourment; et, sous leur inquisition terrible, les hommes, jugés par leur foi plus que par leurs œuvres, seroient tous à la merci de quiconque voudroit les opprimer.

Si les lois n'ont nulle autorité sur les sentiments des hommes en ce qui tient uniquement à la religion, elles n'en ont point non plus en cette partie sur les écrits où l'on manifeste ces sentiments. Si les auteurs de ces écrits sont punissables, ce n'est jamais précisément pour avoir enseigné l'erreur, puisque la loi ni ses ministres ne jugent pas de ce qui n'est précisément qu'une erreur. L'auteur des Lettres écrites de la campagne paroît convenir de ce principe'. Peut-être même en accordant que la politique et la philosophie pourront soutenir la liberté de tout écrire, le pousseroit-il trop loin (page 50). Ce n'est pas ce que je veux examiner ici.

Mais voici comment vos messieurs et lui tournent la chose pour autoriser le jugement rendu contre mes livres et contre moi. Ils me jugent moins comme chrétien que comme citoyen; ils me regardent moins comme impie envers Dieu

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« A cet égard, dit-il, page 22, je retrouve assez mes maximes « dans celles des représentations. » Et page 29, il regarde comme « incontestable que personne ne peut être poursuivi pour ses idées « sur la religion. »

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