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sion aux coups qu'a reçus Néron dans ses courses nocturnes. Vivitur hoc pacto, qui est une phrase fort commune, est, à cause de la circonstance, plein de sel et d'originalité.

29. Oui, nous le savons, vous avez dans le flanc une secrète plaie; mais tout est caché par le large baudrier d'or. Langage à double entente: cela peut se prendre pour une figure, et signifiera: vous cachez vos vices sous des dehors brillans et trompeurs; » cela peut se prendre au propre, et désignera « les blessures qu'a reçues Néron, et qu'il veut cacher. » l'expression de Virgile (Buc., égl. 111, v. 8): Sic novimus est

Novimus et qui te,... transversa tuentibus hircis.

30. Non, vous ne valez rien. J'ai cherché à rendre par-là la force du mot improbe, et de ce tour brusque : Viso si palles, improbe, nummo. Comp. sat. III, v. 109: Visa est si forte pecunia. 31. Puisque vous vous escrimez bravement contre les comptoirs du Forum. C'est ainsi que j'entends le vers : Si puteal multa cautus vibice flagellas, vers très-obscur, et qui embarrasse tous les commentateurs. Puteal, de puteus, c'est proprement le parapluie ou le couvercle d'un puits, d'une échoppe, d'une boutique. Il y avait à Rome deux putealia, l'un dit d'Attius Névius, dans la place des Comices; l'autre dit de Scribonius Libon, près le portique de Julia et de l'arc de Fabius. Voyez CICERON, de la Divinat., ch. 17; TITE-LIVE, liv. I, ch. 36; FESTUS, de Verb. signif., p. 487. édit. Dacier. Comme ceux qui faisaient des affaires d'argent, les banquiers, les courtiers de commerce, les usuriers, se rassemblaient sur la place publique, auprès de ces putealia, l'usage s'établit d'appeler par extension la bourse, le marché, les comptoirs de Rome, putealia. Horace, Épît., liv. 1, ép. 19, v. 8 et suiv. : Forum putealque Libonis

liv. I,

Mandabo siccis...

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Roscius orabat sibi adesses ad puteal cras.

Ovide, Remède d'amour, v. 561 :

Qui puteal, Janumque timet, celeresque kalendas.

Cicéron, pour Sextius : « Puteali ac fœneratorum gregibus in

festatus atque percussus. » Beaucoup de commentateurs pensent donc que puteal signifie ici les usuriers, les créanciers; et, prenant multa vibice flagellas pour une expression métaphorique, ils traduisent: « si vous rouez de coups le créancier, si vous désespérez l'usurier.... » D'autres entendent puteal du Forum, du lieu où se font les affaires d'argent, et multa vibice flagellas par se presser, se pousser et se heurter, comme on fait dans la foule sur une place publique ou dans les rues très-fréquentées ; ils citent à l'appui de leur interprétation le vers de Martial :

Et libertinas arca flagellat opes.

D'autres enfin, comme Saumaise, veulent que ces mots désignent le passe-temps des gens qui se tiennent sur le Forum, des faiseurs d'affaires, qui, pour tuer le temps, donnent de leur poinçon ou de leur stylet dans les parois du puteal.

Tout cela est bien recherché: je n'adopterai aucun de ces sens, je m'en tiendrai à celui qui s'accorde le plus naturellement avec la latinité des mots de ce vers, et avec les renseignemens donnés par Tacite et Suétone sur les courses nocturnes de Néron. Voici les passages de ces historiens. Tacite, Ann., liv. xIII, ch. 25: « Q. Volusio, P. Scipione coss., otium foris, fœda domi lascivia; qua Nero itinera urbis, et lupanaria, et diverticula, veste servili in dissimulationem sui compositus, pererrabat, comitantibus, qui raperent venditioni exposita, et obviis vulnera inferrent, adversus ignaros adeo, ut ipse quoque exciperet ictus, et ore præferret.... Nero.... metuentior in posterum, milites sibi et plerosque gladiatores circumdedit, qui rixarum initia modica et quasi privata sinerent : si a læșis validius ageretur, arma inferrent. » Les récits de Dion Cassius (Néron) et de Pline le Naturaliste (liv. xIII, ch. 43) s'accordent tout-à-fait avec celui de Tàcite. Voici celui de Suétone (Néron, ch. xxvi); « Petulantiam, libidinem, luxuriam, avaritiam, crudelitatem, sensim quidem primo et occulte, et velut juvenili errore, exercuit: sed ut tunc quoque dubium nemini foret, naturæ illa vitia, non ætatis esse. Post crepusculum statim, arrepto pileo vel galero, popinas inibat; circumque vicos vagabatur ludibundus, nec sine pernicie tamen. Siquidem redeuntes a cœna verberare, ac repugnantes vulnerare,

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cloacisque demergere assueverat tabernas etiam effringere et expilare, quintana domi constituta, ubi partæ et ad licitationem dividendæ prædæ pretium absumeretur. Ac sæpe in ejusmodi rixis oculorum et vitæ periculum adiit, a quodam laticlavio, cujus uxorem attrectaverat, prope ad necem cæsus. Quare nunquam postea publico se illud horæ sine tribunis commisit, procul et occulte subsequentibus.... » Il me semble qu'après avoir lu attentivement ces deux passages, il ne doit point rester de doute sur le véritable sens du vers en question. Puteal; c'est le putcal lui-même et les comptoirs ou boutiques qui l'environnaient, et que Néron et ses satellites allaient briser et piller au milieu de la nuit. Multa vibice flagellas; ce sont leurs courses, leurs chocs et leurs batteries contre ces comptoirs et ces boutiques. Cautus, enfin, fait allusion aux précautions que prenait Néron, soit en se déguisant en esclave, soit en se faisant suivre ou accompagner par des spadassins ou par sa garde. Je conviens que ceux qui ne veulent pas que ce soit Néron qui soit personnellement attaqué dans cette satire, ne pourront admettre cette interprétation si vraisemblable et si naturelle; mais, dans leur hypothèse, ils auront peine à faire sortir des vers de Perse autre chose que des idées vagues et alambiquées. Pourquoi se refuser à l'évidence? Pour trouver non pas mieux, mais autre chose que l'explication si heureuse de Casaubon; car c'est Casaubon qui le premier a mis sur la voie pour cette explication.

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32. N'acceptez que ce qui vous est dú; que la canaille reprenne ses hommages. Le latin a plus de précision et de vigueur : respue quod non es; c'est bien la manière de penser des stoïciens. Que la canaille reprenne, etc. On sait que Néron, pendant tout le cours de son règne, fut très-bien avec la populace de Rome, à laquelle il donnait du pain et des spectacles. En général, les plus mauvais empereurs n'étaient mal qu'avec les honnêtes gens.

33. Descendez en vous-même, et voyez combien l'âme est peu meublée! Selon les stoïciens et selon la vérité, c'est nous-mêmes qui devons nous juger; c'est notre conscience qui doit, mieux que le public, nous dire ce que nous sommes. Tecum habita; belle maxime et bien écrite! c'est ainsi qu'il a dit dans la première satire, v Nec te quæsiveris extra. Sénèque, lett. Lxxx : « Si

perpendere te voles, sepone pecuniam, domum, dignitatem; te ipse consule. » Saint Augustin, in Epist. : « Habitare apud mentem suam. « Les Grecs avaient cette locution: Oixeiv map' éauτÿ.

Et noris; c'est le conseil du stoïcisme et de toute espèce de philosophie: Nosce te ipsum. Quum sit tibi curta supellex. Cette expression métaphorique, l'ameublement de l'âme, de l'esprit, est très-usitée en latin. Cicéron, de l'Amitié : « Amicos

mam et pulcherrimam vitæ supellectilem. »

parare, opti

SATIRE CINQUIÈME

LA LIBERTÉ.

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