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avait ouvert des concours littéraires qui avaient lieu tous les ans au mois qui porte son nom. Juvénal (sat. 111, v. 9) :

.. Et Augusto recitantes mense poetas.

Les vainqueurs dans ces concours recevaient les honneurs de la cassette de cèdre, où l'on enfermait leurs ouvrages, et du buste couronné de lierre ou de laurier. Horace (Sat., liv. 1, sat. 4, v. 21):

Beatus Fannius, ultro

Delatis capsis et imagine!.....

Voyez encore sur ces usages et ces localités, JuvĖNAL, Sat. VII, v. 29; SÉNÈQUE, de la Tranquillité de l'âme, ch. 1X; SUÉTONE, Tib., ch. LXX; PLINE L'ANCIEN, liv. xxxv, ch. 2; PLINE LE JEUNE, Lettres, liv. iv, lett. 18; liv. x, lett. 25. — Il est vraisemblable que Perse, qui se donne pour un homme de village et qui raille en homme d'opposition les mœurs littéraires que la politique de la cour s'efforce de faire prendre aux Romains, fait allus ́on ici à toutes ces institutions d'Auguste; mais il serait possible aussi que les expressions quorum imagines lambunt hederæ sequaces et ad sacra vatum ne s'appliquassent pas spécialement aux honneurs et aux concours du mont Palatin, qu'elles eussent un sens plus général et plus vague, qu'elles fussent une critique des habitudes et des prétentions littéraires des Romains quels qu'ils fussent, la plupart des riches ayant alors des bibliothèques, des cabinets avec des bustes d'auteurs, etc.

6. Et tire de lui son KAĪPE. J'ai gardé le mot grec et n'ai pas cru devoir le traduire par bonjour, pas plus que Perse ne l'avait traduit par salve. Voici pourquoi : d'abord il faut tenir compte de l'habitude où étaient les Romains, pour peu qu'ils eussent de connaissance du grec, d'employer le mot yaips aussi souvent que les mots salutem ou salve. Perse n'a garde de manquer à cet usage, Jui qui affecte les expressions et les locutions venues des Grecs. On peut voir par les Lettres de Cicéron et de Pline le Jeune comhien celle-ci était familière aux Romains. C'est ainsi que nous Français nous substituons aux mots bonjour ou adieu les expressions qui y correspondent dans les langues étrangères ou anciennes. Le mot zip était d'un usage si ordinaire en latin qu'on en avait

latinisé l'orthographe et que plusieurs manuscrits portent chære. - En second lieu, il faut remarquer que les perroquets qui se trouvaient en Italie y avaient été apportés ou par le commerce qui suivait la route de la mer Caspienne et du Phase, ou par celui qui se faisait par Alexandrie et l'Égypte. Or, sur l'une ou sur l'autre de ces routes, c'était la langue grecque qui se parlait depuis les conquêtes d'Alexandre le Grand. De plus, c'étaient des Grecs qui faisaient presque tout le commerce de l'Italie avec le Levant. Ainsi, soit à cause de la route qu'ils avaient suivie, soit à cause des vaisseaux qui les avaient apportés, les perroquets devaient, même chez les Latins, dire bonjour en grec, de même que chez nous beaucoup de ces oiseaux, venus des possessions anglaises, ou apportés sur des vaisseaux anglais, disent leur nom en anglais, parrot.: En voilà bien long sur un mot; mais je dois, autant qu'il est possible, conserver les couleurs locales et le costume antique; or cela tient à des riens.

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7. On a vu des corbeaux qu'elle avait amenés à dire un rauque bonjour. Le vers que je traduis ainsi, ce vers Corvos quis olim concavum salutare, ne se trouve pas dans plusieurs éditions, ni dans la plupart des manuscrits; je dois même convenir que je ne l'ai vu dans aucun de ceux que j'ai eu entre les mains; il se trouve cependant dans le texte et dans les gloses de plusieurs copies trèsanciennes. «On lit, dit M. Achaintre, dans une édition de Perse de Britannicus (Paris, 1505, J. Petit) cette glose interlinéaire : "Versus hic a Fonteio, non ab aliis ponitur. » Ainsi les premiers éditeurs même du texte de Perse étaient déjà partagés sur l'authenticité de ce vers; mais l'avis de Fonteius, le plus ancien commentateur moderne de Perse, et qui d'ailleurs a pu consulter les manuscrits des bibliothèques de l'Italie, est ici d'un grand poids. En lui-même d'ailleurs ce vers paraît digne d'être admis, et je ne partage point l'opinion de Casaubon, qui le rejette comme étant de mauvais goût et d'une latinité barbare. Virgile a dit horrendum stridens pour exprimer les horribles sifflemens de l'hydre : pourquoi ne dirait-on pas salutare concavum pour exprimer la belle voix du corbeau? Ce vers nous paraît tout-à-fait dans le goût du style de Perse et d'un tour heureux. Enfin l'expression corvos poetas, qui se trouve plus bas, paraît démontrer jusqu'à l'évidence que le mot

corvos s'est déjà trouvé plus haut, ainsi que picas qui se trouve aussi répété. — Les commentateurs prétendent que Perse fait ici allusion à l'anecdote du chevalier romain qui avait dressé deux corbeaux à dire, l'un: Ave, Cæsar, victor imperator, et l'autre : Ave, Antoni, victor imperator, pour être toujours en mesure dè saluer le triomphateur, quel que fut le succès de la bataille d'Actium; cette anecdote a même été mise en fort jolis vers français par M. de Rulhières. Perse y a-t-il réellement songé? je ne sais ; mais il est certain qu'en général, dans son style, il affecte les citations, les allusions érudites; et le olim paraîtrait indiquer qu'il veut rappeler un fait connu.

8. L'espérance trompeuse d'un écu. Et non pas l'éclat de l'or ou l'espoir d'un or séducteur, comme Sélis et d'autres traduisent. Il n'en faut pas tant pour faire chanter ceux qui ont faim: un écu suffit et même l'espérance trompeuse d'un écu.

9. Des poètes criards, comme la pie et les corbeaux, vont chanter à croire entendre les sons de l'Hippocrène. C'est le sens de la leçon que j'ai adoptée et dont j'ai cherché à établir l'authenticité dans ma note sur l'ensemble du Prologue. Sélis, qui a adopté la leçon de Turnèbe, cantare Pegaseium melos credas, traduit d'une manière diamétralement opposée à la mienne : Corbeaux et pies vont devenir poètes, et vous entendrez, soyez-en sûr, des chants mélodieux. Perse ne dit point et n'a pu dire que, pour un écu, corbeaux et pies vont devenir poètes, parce que cela est absurde. Perse a dit, ce qui est fort sensé, que, pour un écu, des poètes corbeaux et des poètes pies vont chanter à croire entendre, etc.— Les mots Pegaseium melos présentent un sens équivoque; ils peuvent signifier ou les sons mélodieux de la fontaine de Pégase, ou les hennissemens moins harmonieux du cheval lui-même. J'ai préféré le premier sens; mais il est bon d'observer que Perse lui-même a joué sur les mots, et il est vrai qu'il le fait souvent avec grâce, comme dans la re, la 4e et la 6e satire.

SATIRE PREMIÈRE

LA LITTÉRATURE.

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