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peine à le rappeler; tantôt il veut à toute force aller s'établir à Veïes; dans l'espoir de s'y trouver mieux; Camille a beau lui dire, lui répéter que les oracles ont attaché à Rome son bonheur, sa puissance et sa gloire; peu s'en faut que le projet d'émigration ne s'exécute (20). Après la désastreuse journée de Cannes, un Questeur et je ne sais combien de Chevaliers sont dégradés pour avoir juré d'abandonner l'Italie *. Plus tard, lorsque pour fuir la tyrannie de Sylla, Sertorius s'en va planter son étendard en Espagne; il y est suivi d'un si grand nombre de Romains, que bientôt « Rome n'est plus dans Rome. » Plus tard encore, lors de l'expédition de Crassus en Asie **, beaucoup de soldats romains, et des meilleurs! des Marses, des Appuliens, préfèrent le pays Barbare à leur patrie: oubliant les Boucliers sacrés, et le feu de Vesta; oubliant l'honneur, l'insigne honneur d'être Romain et de porter la toge, les félons se marient à des femmes Barbares! Et, perversité des perversités! ils fraternisent

Voyez Rome au siècle d'Auguste, t. I, p. 290.

« Milesne Crassi conjuge barbara
Turpis maritus vixit? Et hostium,
Proh curia inversique mores!
Consenuit socerorum in arvis,
Sub rege Medo, Marsus et Appulus,

avec l'ennemi, avec les pères de ces femmes, dont ils cultivent les champs; et ils ont l'infamie de vivre et de vieillir sujets d'un roi Mède! Comme si Jupiter n'était plus au Capitole; comme si Rome n'était pas toujours la Ville par excellence ! »>

Sous la dictature de César, il est question d'émigrer en masse; et de TRANSFÉrer le siége de l'emPIRE DANS ILION OU DANS ALEXANDRIE: de nombreuses levées d'hommes achèveraient d'épuiser l'Italie, en lui enlevant tout le meilleur de sa population; Rome, dès-lors, ne serait plus qu'une province; régie au nom du chef suprême par quelques-uns de ses amis *.

L'empire romain ne pouvait échapper à une translation.

Après les désastres du Triumvirat, la fièvre d'émigration reparaît; intense, continue; et, cette fois encore, les regards se tournent vers l'Orient. L'Orient, est le pays des merveilles l'or et l'ar

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Anciliorum, et nominis, et togæ

Oblitus, æternæque Vestæ,

Incolumi Jove et urbe Roma! »

:

Horat. od. v, lib. III.

Quin etiam VALIDA FAMA percrebuit, migraturum Alexandriam vel Ilium, translatis simul opibus imperii, ex

<< haustaque Italia delectibus et procuratione Urbis amicis per<< missa. » — Sueton. Jul.-Cœs. LXXIX.

gent, l'ivoire, la soie, les pierreries, les aromates, toutes les richesses viennent de l'Orient! l'Orient est le séjour de la félicité : Antoine et les siens sont là qui mènent joyeuse vie; une vie sans pareille! pourquoi demeurer en Italie à vivre misérablement? Plutôt émigrer la patrie est où l'on se trouve bien. Il faut faire comme les Phocéens : pour mettre un terme à leurs maux, les Phocéens résolurent, et bravement ils exécutèrent leur

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résolution, d'abandonner une patrie ingrate, maudite; puis de laisser leurs terres, leurs foyers, et leurs temples, servir de retraite aux bêtes fauves *.

AD POPULUM ROMANUM.

Altera jam teritur bellis civilibus ætas,

Suis et ipsa Roma viribus ruit...

Forte, quid expediat, communiter, aut melior pars,

Malis carere quæritis laboribus.

Nulla sit hac potior sententia, Phocæorum

Velut profugit exsecrata civitas

Agros atque Lares proprios, habitandaque fana

Apris reliquit et rapacibus lupis,

Ire, pedes quocumque ferent, quocumque per undas
Notus vocabit, aut protervus Africus.

Sic placet? an melius quis habet suadere? secunda
Ratem occupare quid moramur alite?

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Hæc, et quæ poterunt reditus abscindere dulces,

Eamus omnis exsecrata civitas,

Et donc, que Rome, cité maudite, soit ainsi délaissée. Y resteront, s'ils veulent, les lâches; mais tout homme de cœur doit la fuir, il doit la fuir, et jurer de n'y revenir jamais. Loin, bien loin des bords du Tibre, il faut chercher un pays meilleur : Il est des îles fortunées où la terre produit sans culture; où la vigne fleurit sans avoir besoin d'être taillée; où l'olivier, et le figuier donnent toujours du fruit en abondance. Là, du creux des chênes distille le miel; et du sommet des montagnes jaillit une eau limpide et fraîche; qui jamais ne tarit, qui ne se corrompt jamais. Les chèvres viennent d'ellesmêmes s'offrir à la main qui les trait; les brebis rapportent des mamelles toujours pleines. Là, point de contagion parmi les troupeaux; point d'astre

Aut pars indocili melior grege; mollis et exspes
Inominata perprimat cubilia.

Vos, quibus est virtus muliebrem tollite luctum,
Etrusca præter et volate litora.

Nos manet Oceanus circumvagus; arva, beata
Petamus arva, divites et insulas,
Reddit ubi Cererem tellus inarata quotannis,
Et imputata floret usque vinea,
Germinat et nunquam fallentis termes olivæ,
Suamque pulla ficus ornat arborem,
Mella cava manant ex ilice, montibus altis

Levis crepante lympha desilit pede.

funeste qui les consume. Le soir on n'entend pas les ours gronder autour des bergeries; on n'y marche pas sur des serpens; jamais d'inondations, ni de sécheresse; mais du froid et du chaud modérément; une égale température. Ces heureuses contrées, furent, dans le temps, réservées par Jupiter aux gens de bien; quand l'âge d'or venant à finir, à céder le monde à l'âge de fer, la corruption prit le dessus.

Voilà les fables que répandaient à Rome parmi le peuple les partisans de l'émigration (21); au fort des discordes civiles, voilà l'idée que faisaient germer dans les têtes le désespoir et la misère.

Illic injussæ veniunt ad mulctra capellæ,
Refertque tenta grex amicus ubera;
Nec vespertinus circumgemit ursus ovile,
Nec intumescit alta viperis humus.
Pluraque felices mirabimur, ut neque largis
Aquosus Eurus arva radat imbribus,
Pinguia nec siccis urantur semina glebis,
Utrumque rege temperante cœlitum......
Nulla nocent pecori contagia; nullius astri
Gregem æstuosa torret impotentia.
Jupiter illa piæ secrevit litora genti,

Ut inquinavit ære tempus aureum,
Ærea dehinc ferro duravit sæcula, quorum
Piis secunda, vate me, datur fuga. »

Horat. epod. XVI.

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