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Copyright 1924

by Max Leclerc and H. Bourrelier, proprietors of Librairie Armand Colin.

FERDINAND BRUNOT

Doyen de la Faculté des Lettres

Professeur d'Histoire de la Langue française à l'Université de Paris

HISTOIRE

DE LA

LANGUE FRANÇAISE

DES ORIGINES A 1900

Ouvrage couronné par l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres
(Premier Grand Prix Gobert)

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Terquem
4-30-24
5.4ptz

AVERTISSEMENT

En présentant au public ce volume à peine lisible, je ne chercherai pas à m'excuser de l'avoir fait tel qu'il est. Rien n'eût été plus tentant, et j'ajoute plus facile, que de dégager de ces règles et de ces remarques quelques-unes des belles généralités où se complait le faux esprit de synthèse. Seulement c'eût été sacrifier la vérité et donner une idée absolument inexacte du travail fait alors sur la langue, et de ceux qui l'ont fait.

Sans doute, à distance, il est permis d'oublier leurs petites rancunes, les querelles de sectes, de coteries et de personnes, pour ne retenir que le désir réel que la plupart ont eu de polir la langue et de la conduire à son point de perfection pour l'y fixer. Ils l'ont aimée sincèrement, plus encore qu'ils ne détestaient leurs rivaux et leurs adversaires, et ils ont appliqué à la servir tout ce que la haine et la jalousie leur donnaient de perspicacité. C'est ainsi qu'en cherchant des fautes ils ont découvert des règles. Leur tort principal à nos yeux a été d'en trouver trop, et de trop petites, si bien qu'auprès des géants créateurs d'œuvres immortelles, leurs contemporains, ces myopes, occupés à racler le marbre, sans rien apercevoir des ensembles, font aujourd'hui pauvre figure.

Sitôt qu'on entre dans le détail, et mon lecteur, hélas! en aura l'impression comme moi, on est effrayé et comme hébété de toutes leurs prescriptions. Elles se superposent, s'entrecroisent, et forment un réseau à faire trébucher les plus sûrs. A cet embarras s'ajoute une inquiétude grave. On se demande quelle est la valeur de la plupart de ces observations, fondées sur l'absence d'observation, qui n'ont pour elles ni la tradition ni l'« usage décidé » et portent un caractère net de fantaisie personnelle. A cet arbitraire devait peutêtre aboutir nécessairement cette génération nouvelle de puristes qui n'étaient plus soumis aveuglément à l'usage du monde, comme les précédents, et se croyaient encore au-dessus de l'usage des écrivains, dont l'autorité par suite était sans contrepoids, et ne pouvait

guère manquer de tourner à la tyrannie indiscrète et intempérante. Il était fatal qu'ils en vinssent à confondre l'esprit d'ordre avec la manie de la réglementation.

Il faut bien dire que cette outrance ne révoltait personne, l'habitude de l'obéissance étant alors générale et poussée jusqu'à la sujétion volontaire. Le reproche fait aux raffineurs était même souvent de n'avoir pas raffiné assez et d'oublier encore des délicatesses. On comptait la difficulté au nombre des mérites d'une langue. Qui donc, dans ces conditions, se fût fait scrupule de hérisser le corps de notre grammaire de quelques nouvelles épines, même s'il devait finir par s'en composer?

Mon devoir principal étant de fournir à ceux qui étudient les textes et veulent confronter l'usage des auteurs, grands et petits, avec les théories admises ou proposées, d'apporter aussi des documents à ceux qui entendent suivre de près la marche de notre langue littéraire, je n'avais aucun droit de choisir dans cet

amas.

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J'aurais peut-être pu y mettre plus de clarté, en suivant un autre ordre. Quelques personnes, qui m'ont fait l'honneur d'adopter peut-être aussi celles qui ont critiqué les idées de rénovation grammaticale exposées dans La Pensée et la Langue, s'étonneront que je n'aie point appliqué ici ma méthode. Quelque labeur que cette transformation dût me coûter, j'aurais refondu tout mon volume, si j'y avais vu un avantage certain pour mes lecteurs, et pour la science. Il était assurément possible sinon facile de replacer dans la classification nouvelle les phénomènes étudiés et de les considérer d'un autre point de vue. Mais comment tenter pareil essai au cours d'un ouvrage, présenter par exemple le commentaire et le développement d'une observation de Vaugelas à une autre place, sous un autre titre, et sous une autre forme que l'observation ellemême, au tome précédent? D'autre part transposer les règles et les remarques, traduire la pensée des grammairiens du temps dans ma propre pensée, n'était-ce pas risquer de fausser leurs doc

trines?

Il m'a semblé qu'il convenait d'amasser d'abord et de présenter telles quelles les remarques éparses dans tant de recueils aujourd'hui oubliés et de les confronter avec l'usage. Le moment de les regrouper et de les interpréter viendra. Ce sera l'œuvre de mes successeurs. Dans d'autres volumes du reste, je serai plus libre, lorsqu'il ne s'agira plus de citer à chaque alinéa un Andry de BoisRegard ou un Bouhours, et que j'en viendrai à des époques où la vie n'a plus été tenue en lisière par la « doctrine ».

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