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Madame de Maintenon écrit: ce sont des badaudes de Paris (Lett., I, 71). Richelet est repris pour avoir écrit: la gréle est l'avant-coureur de la gelée. « Coureur ayant un féminin, il faut dire La gréle est l'avant-courriere de la gelée » (Apoth. du Dict., 127; cf. Loret, 5 may 1652, v. 156, et 7 fév. 1660, v. 70)'.

Cependant, de façon générale, certains féminins servent toujours à produire des effets comiques, et cela doit nous mettre en défiance2.

Au reste Ménage a dit formellement que borgne, ivrogne étaient communs au féminin et au masculin, et que, quand on disait borgnesse, ivrognesse, c'était par mépris (O., I, 564) *.

D'autre part, quand il y a hésitation, les théoriciens sont enclins à déclarer que la forme n'existe pas, ainsi pour scélérat. On ne dit pas d'une femme, c'est une scélérate. Ce féminin ne convient comme adjectif qu'avec ame (A. de B., Refl., 631).

CONCURRENCE DES FORMES EUSE ET ERESSE. Quant à la concurrence que se font entre eux les suffixes du féminin, il y a vraiment de chose à en dire. Il est certain qu'euse gagne toujours sur peu eresse. La forme traditionnelle chasseresse est elle même remplacée dans la langue comique par chasseuse : Là, nostre chasseuse alterée (Rich., Ov. bouff., 166); Six Beautés en habits de chasseuses, comme

1. Il va sans dire qu'on trouve prieure comme supérieure : Monsieur Patru qui plaidoit pour Madame de Guenegaud Prieure de l'Hôtel-Dieu de Pontoise (Sent. crit. s. les Caract., 297).

2. J'ai cité (t. III, 280) divers textes. En voici d'autres Aux personnes de cour fâcheuses animales (Mol., III, 63, Fách., v. 372); La madame Grognac a l'humeur hérissonne (Regn., Le Distrait, act. I, sc. 5); Me voilà de retour, moutonne. et tu seras mariée dès ce soir (Dancourt, VIII, 192, Colin-Maillard, sc. 23); Le friand morceau ! J'aurai bien du plaisir d'en faire une perroquette (Regn., Hom. à b. fort.. act. III, sc 7); Je serai ton Magot, tu seras ma Guenonne, Nous choisirons ainsi cent jolis petits noms (Th. Corn., Bar. d'Alb., act. V, sc. 4); Voilà une pèlerine qui a diablement d'esprit (Regn., Desc. d'Arl., sc. 10); Tu seras mon toutou, je serai ta toutoue (Montfl., Com. Po., act. IV, sc. 3).

Ici il n'y a aucun doute. Mais on hésite parfois sur l'intention de l'auteur. Si c'est raillerie par que Regnard a écrit visageresse : je commençais à être bien las de toutes ces visageresses (Coq.. act. II, sc. 4); si au contraire adulteresse est sûrement sérieux dans Bayle (Dict., art. Alcée), que faut-il penser d'agente? Et la bonne Catos sert d'agente à tous deux (Montfl., Fille cap., act. III, sc. 6); Voilà, sur ma parole, une agente d'amour (Regn., Ménech., act. II, sc. 3).

3. Ces formes se trouvent en effet chez les burlesques Aveugles, ou du moins borgnesses (Richer, Ov. bouff.. 504). Cf. Cette fille, quoy qu'aveuglesse Se fit enlever par Jinesse (Loret, 1er nov. 1650, v. 61-62; cf. Id., lb., v. 105).

4. Procureuse donne lieu à des calembours. C'est proprement la femme d'un procureur qu'une femme de qualité me vienne voir, on ne m'en dit rien; qu'une procureuse frappe à ma porte, on vient m'en faire la honte en pleine compagnie (Regn., Coq., act III, sc. 3; cf. Vendanges, sc. 4; Fur., Rom. bourg., 98, éd. Asselineau ; Quel habit de folle avez-vous donc là ? Est-ce l'habit d'une procureuse? Procureuse, moi? Apprenez. mon ami, que je suis la femme d'un procureur, mais que je ne suis point procureuse (Regn. et Dufresn., Suite de la Foire St-Germ., sc. 9).

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elle, La suivent en dansant (Montfl., Com. Po., act. I, sc. 3)1. Pour · être fixé, on ne consultera pas La Fontaine. Le titre de la quinzième fable du livre VII est: Les Devineresses. Au vers 13, on lit Devineuse, et au vers 33, devine.

LE SUFFIXE TRICE.

Le suffixe dont le succès s'affirme peu à peu, c'est le suffixe savant trice (cf. t. III, 279). Sans doute, il ne fait que des progrès lents, cependant il en fait. Bouhours n'est pas plus favorable à ces féminins en trice que ses devanciers, et dans une remarque dirigée contre Balzac, après s'en être pris à insidiateur, il ajoute : « quand nous dirions insidiateur, il ne s'ensuivroit pas qu'on pût dire, insidiatrice, non plus qu'exterminatrice, tentatrice, dominatrice, dispensatrice, dont quelques Ecrivains se servent. On ne fait pas de ces feminins-là autant qu'on veut; et il n'est permis d'employer que ceux que l'usage a autorisez, tels que sont actrice, ambassadrice, coadjutrice, fondatrice, et quelques autres » (Rem., 116).

Mais Bérain enregistre débitrice (Nouv. Rem., 27); Alemand, accusatrice, qu'on emploie depuis longtemps au Palais, et qui a été naturalisé par Racine dans Phèdre. Richelet, dit-il, a eu raison de le mettre dans son Dictionnaire. A cette occasion l'auteur rappelle qu'on a déjà bienfactrice, actrice, consolatrice, tutrice (Guer. civ., 43-44). Toutefois la longueur même de son plaidoyer montre ce que le mot accusatrice avait encore de surprenant pour l'oreille française.

En somme on naturalise ces nouveaux féminins un à un. Marg. Buffet est pour inventrice, contre inventeuse (N. O., 42); Andry, pour introductrice (Refl., 271-272). Nulle part on ne trouve encore cette formation considérée comme une formation normale, dont l'analogie devrait s'étendre aux mots en eur2.

Le dépouillement des textes donne des résultats analogues. En dehors de ceux que j'ai déjà cités antérieurement, je donnerai ici quelques exemples: Auditrice des Comptes (Bours., Com. s. tit., act. I, sc. 5); communicatrice (Boss., Rel. s. le quiet., II, 8, dans II. D. T.). Richelet dit : « Je n'ai trouvé le mot que dans la Seconde partie des poësies de Godeau (Egl., IV), et on croit que ce mot ne

1. Il est intéressant de constater que le féminin agit sur le choix de la forme masculine, quand il s'agit de distinguer entre eur et eux, comme cela était si souvent nécessaire. Aux féminins en euse correspondent, suivant Hindret, des masculins en eux : un pescheur de poisson, mais à p cheresse correspond pécheur. On ne dit point amateur, imposteur, parce que ces mols n'ont point de féminins. Toutefois, après avoir essayé de bitir de fragiles distinctions entre chasseur et chasseux. Hindret convient que la forme en eur a quelque chose de plus fort et de plus sérieux (L'art de b. prononcer. 229-233). 2. Voici, par curiosité, la liste des féminins en trice donnée dans le Guidon de Duez: ambassadrice, electrice, imperatrice, dominatrice, protectrice, curatrice, tutrice, inventrice, destructrice (148).

se dit guere»; novatrice (Rac., IV, 391, P.-R.); les sectatrices de la Préciosité (Robinet, Panég. de l'E. des Fem., 1664, 4o entrée); A Madame Colbert, Ambassadrice à Nimégue (Bours., Lett. nouv., I, 37; cf. 84-86)1.

1. Opératrice se trouve dans une énumération bouffonne : « Ce n'est pas pour me vanter, mais en cas de chanteurs, symphonistes, violistes, téorbistes. clavecinistes, opéra, opérateurs, opératrices, madelonistes, catinistes, margotistes, si difficiles qu'elles soient, j'ai tout cela dans ma manche » (Regn., La Sérén., sc. 7).

Ailleurs on se moque de autrice: Un Homme est un Autheur, une Femme est Autrice. Appelez-donc Madame Autrice, et non Autheur (de La Thuillerie, Crisp. bel Esprit, sc. 10). Ce mot était très commun dans Loret (cf. t. III, 279, note 2).

CHAPITRE V

FÉMININ ET MASCULIN DES ADJECTIFS

FORMES SANS E ET FORMES AVEC E.

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Les règles générales de formation du féminin dans les adjectifs du type petit, petite étaient fixées. C'est à peine si désormais on discutera sur quelques cas particuliers.

Dispos paraissait embarrassant. « Si on estoit obligé de s'en servir au féminin, dit Ménage, il faudroit dire disposte et non dispose comme dans l'Ouest; il est mieux de l'éviter » (O., I, 392).

Pour natal, il ne semblait pas qu'on pût douter. Cependant, suivant Andry, natal n'a pas de féminin (Refl., 324); « natale n'est possible qu'en Poësie » (Id., Suit., 210); c'est une erreur, dit du reste S' Réal (De la crit., 69)'.

Toutefois la grosse question était de ramener au type général, non pas les adjectifs qui n'avaient pas de féminin, mais ceux qui au masculin gardaient l'e, et paraissaient avoir la forme féminine. Malheureusement, comme aucun principe général ne guidait les décisions, on donna des règles arbitraires et contradictoires. Dans presque toutes les séries, un adjectif ou plusieurs gardèrent la forme vocalique, pendant que d'autres prenaient au masculin une forme consonantique. A. Adjectifs terminés en c, que. — Pour public, Vaugelas admettait encore au masculin la forme en que. C'est un usage aujourd'hui abandonné, dit Alemand en publiant cette remarque posthume. Vaugelas lui-même dans son Quinte-Curce dit toujours public (Nouv. Rem., 56). C'est en ce sens que se prononcèrent Richelet et l'Académie. Cf. Et loin des yeux publics venir réver exprès (Th. Corn., D. Bertr. de Cig., act. II, sc. 4).

Caduc. Monet préférait encore caduque. Oudin l'admettait. Richelet écrit caduque. Cf. Il ne marche que sous l'enseigne Des gens ou caduques ou frois (Rec. de Rond., 1639, 168). L'Académie écrivit caduc.

1. Favori peut être considéré plutôt comme un nom. Il fait au féminin favorite (Vaug., II, 391; cf. Al., Nouv. Rem., 98-99).

2. Cf. t. III, 277, et Thurot, o. c., I, 187 et suiv.

Histoire de la langue française. IV. 2.

2

En revanche le même Dictionnaire continua à écrire pratique (A. de B. ne donnait que pratic, Refl., 443), véridique, brusque. B. Adjectifs terminés en t. Mat, brut: Rich., Fur., A. s'accordent sur cette orthographe (cf. t. III, 277).

Pour exact, il y a de même unanimité. Dupleix avait déjà condamné exacte (Lib., 269). Rich., Fur., A. écrivent exact (cf. A., dans Vaug., I, 377). Cette forme est la plus commune dans les textes: Je le vois fort exact; Quand on a sa parole, elle vaut un contract (Bours., Med. vol., sc. 19).

En revanche on garde compacte (A.), inculte (L. de Templ., Gen. et Pol., 203).

C. Adjectifs terminés en x. On adopte la forme en x pour perplex (Pom., Fur., A.). Cf. Je suis perplex, j'atens, j'écoute (Loret, 15 mars 1664, v. 2; cf. Id., 11 avril 1654, v. 179).

Prefix (Rich., Fur., A.). Ici l'usage était ancien et bien ferme : à jour préfis Tindrent, pareillement, le Fils (Loret, 3 may 1664, v. 67-68, et souvent; cf. Racan, II, 81, 555, 403, etc.).

En revanche on écrit circonflexe (Fur., A.). Cf. Ma poitrine est toute convexe, Enfin je suis tout circonflexe (Scarr., Euv., I, 133). D. Adjectifs terminés en 1. - Fidele garde définitivement e: fidele (Mén., O., II, 414; Rich., Fur., A.).

Pour les adjectifs en il, on accepte la règle de Vaugelas: facile, difficile, inutile, sterile (A. de B., Suit., 401; L. de Templ., Gen. et Pol., 201).

Au contraire: pueril (Bouh., Suit., 51). Sur ce dernier il y eut hésitation. Ménage avait fait consulter l'Académie par Huët. Elle se prononça pour puérile (O., II, 414 et 499). Mais on se ravisa. Le Dictionnaire donne pueril, comme Richelet'.

Ainsi, là où l'analogie eût simplifié et unifié, la règle embrouillait tout et pour toujours.

1. Ce qui est disproportionné, est... du moins, badin et puerile (Refl. s. la poet.d'Arist., 79).

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