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la terre sera aussi délié dans le ciel (Matth., XVI, 19). Je vous envoie comme mon Père m'a envoyé (Matth., XVIII, 18). Vous êtes Pierre, el sur cette pierre je bâtirai mon Eglise (Ibid., XVI, 18). Et ailleurs: Paissez mes agneaux, paissez mes brebis (Jean, XXI, 15, 17). Or, le pouvoir de paître, de lier et de délier est un pouvoir de gouvernement dans l'ordre de la religion. Le pasteur paît les brebis lorsqu'il instruit, qu'il juge, qu'il administre les choses saintes; il lie lorsqu'il commande ou qu'il défend; il délie lorsqu'il pardonne ou qu'il dispense.

Après sa résurrection, Jésus-Christ, apparaissant à ses apôtres, ratifie d'une manière plus solennelle encore la mission qu'il leur a donnée; il leur commande d'enseigner les nations et de les baptiser; il leur déclare en même temps que toute puissance lui a été donnée dans le ciel et sur la terre, et qu'il sera avec eux tous les jours jusqu'à la consommation des siècles: Data est mihi omnis polestas in cœlo et in terra. Euntes ergo docele omnes gentes, baptizantes eos in nomine Patris, et Filii, et Spiritus sancti; docentes cos servare omnia quæcumque mandavi vobis. Et ecce ego vobiscum sum omnibus diebus usque ad consummationem seculi (Matth., XVIII, 18, 19, 20). Saint Paul, dans l'énumération qu'il fait des ministres destinés à l'édification du corps mystique de Jésus-Christ, compte des apôtres, des prophètes, des évangélistes, des pasteurs, des docteurs (Ephes., IV, 11, 12); nulle part il ne fait mention des puissances du siècle. Il fait souvenir aux évêques assemblés à Milet qu'ils ont été appelés, non par l'autorité des princes, mais par la mission de l'Esprit-Saint pour gouverner l'Eglise de Dicu: Attendite vobis et universo gregi in quo vos Spiritus sanctus posuit episcopos regere Ecclesiam Dei (Act., XX, 28). Il s'annonce lui-même, non comme l'envoyé des rois de la terre, mais comme l'ambassadeur de Jésus-Christ, agissant et parlant en son nom, el revêtu de la puissance du Très-Haut Pro Christo legatione fungimur (II Cor., V, 20).

Or, si la puissance spirituelle a été donnée immédiatement par Jésus-Christ à ses apótres, si elle n'a été donnée qu'à eux, elle est indépendante, elle est distincte de la puissance des princes.

Jésus-Christ distingue lui-même expressément les deux puissances, en ordonnant de rendre à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu. S'il honore la magistrature dans la personne d'un juge même inique, s'il reconnaît que la puissance de ce juge lui a été donnée de Dieu (Matth., XXI, 7), il parle aussi avec toute l'autorité d'un maître souverain, lorsqu'il exerce les fonctions de l'apostolat. Il déclare que quiconque ne croit pas en lui est déjà jugé (Jean, HI, 18). Il dit à ses disciples, en leur donnant sa mission: Celui qui vous écoute m'écoute, et celui qui vous méprise me méprise (Luc, X, 16). Quiconque n'écoute pas l'Eglise, qu'il soit regardé comme un païen et un publicain (Matth., XVII, 17). Bien loin d'appeler les

empereurs au gouvernement de cette Eglise, il prédit qu'ils en seront les persécuteurs; il exhorte ses disciples à s'armer de courage pour souffrir la persécution et à se réjouir d'être maltraités pour l'amour de lui (Luc, VI, 22, 23).

La puissance que Jésus-Christ a donnée à ses apôtres se confirme par l'autorité que les apôtres ont exercée; ils enseignent, ils définissent les points de doctrine, ils statuent sur tout ce qui concerne la religion, ils instituent les ministres, ils punissent les pécheurs obstinés, ils transmettent à leurs successeurs la mission qu'ils ont reçue. Ceux-ci exercent le même pouvoir avec la même indépendance, sans que les empereurs interviennent jamais dans le gouvernement ecclésiastique. Or, comme l'Eglise n'a acquis aucun droit sur le temporel des rois en les recevant au nombre de ses enfants, elle n'a rien perdu non plus de sa puissance; ses pouvoirs sont inaliénables et imprescriptibles, parce qu'ils sont essentiels à son gouvernement et fondés sur l'insitution divine. Elle doit donc les exercer dans tous les temps avec la même indépendance.

Ajoutons à ces raisonnements le témoignage des Pères. Saint Athanase rapporte avec éloge ces belles paroles d'Osius de Cordoue à l'empereur Constance : « Ne vous mê«<lez pas des affaires ecclésiastiques, ne • commandez point sur ces matières, mais << apprenez plutôt de nous ce que vous devez a savoir. Dieu vous confié l'empire, et à << nous ce qui regarde l'Eglise. Comme celui « qui entreprend sur votre gouvernement « viole la loi divine, craignez aussi à volre « tour qu'en vous arrogeant la connaissance « des affaires de l'Eglise vous ne vous rena diez coupable d'un grand crime. Il est écrit: « Rendez à César ce qui est à César, et à Dies « ce qui est à Dieu. Il ne nous est pas permis « d'usurper l'empire de la terre, ni à vous, « seigneur, de vous attribuer aucun pouvoir « sur les choses saintes. » Ne te misceas ecclesiasticis, neque nobis in hoc genere præcipe, sed potius ea a nobis disce. Tibi Deus imperium commisit, nobis quæ sunt Ecclesia concredidit. Quemadmodum qui tibi imperiun subripit contradicit ordinationi divinæ, ita et tu cave ne quæ sunt Ecclesiæ ad te trakens, magno crimini obnoxius fias. Date, scriptu est, quæ sunt Cæsaris Cæsari, et quæ sunt Da Deo. Neque igitur fas est nobis in terris imperium tenere, neque tu thymiamatum el secrorum potestatem habes, imperator (Epist. ad solitar. vitam agentes).

Ecoutons parler saint Athanase lui-même: « Quel est le canon, dit-il, qui ordonne aux soldats d'envahir les Eglises, aux coules « d'administrer les affaires ecclésiastiques. a et de publier les jugements des évêques « en vertu des édits ?... Quand est-ce qu'un

décret de l'Eglise a reçu de l'empereur sou « autorité? Il y a eu jusqu'à présent pi a sieurs conciles, plusieurs definitions de a l'Eglise, et jamais les Pères n'ont rien con a seillé de pareil à l'empereur : jamais l'em« pereur ne s'est mêlé de ce qui regarda

l'Eglise. C'est un nouveau spectacle que a donne au monde l'hérésie d'Arius. Cons« lance évoque à lui dans son palais, la a connaissance des causes ecclésiastiques, a et préside lui-même au jugement... Qui est « ce qui, en le voyant commander aux évêques, et présider aux jugements de l'Eglise, << ne croira voir avec raison l'abomination de a la désolation dans le lieu saint ? » (Ibid.) Quis videns illum iis qui episcopi putantur præfici, in ecclesiasticisque judiciis præsidere, non jure dicat, abominationem desolationis ?. Point du tout, répondraient M. Dupin et les partisans de la suprématic temporelle, qui enseignent que les décrets et règlements ecclésiastiques ne peuvent et ne doivent être exécutés sans l'autorité des souverains ( Manuel du droit pub. ecclés. franç. 2 édit. p. 16). S'il en est ainsi, l'empereur ne fait qu'exercer une juridiction légitime: la puissance des évêques n'est qu'un pouvoir dépendant de l'autorité civile, qui n'accepte les règlements de la police ecclésiastique faits par les conciles qu'autant qu'ils sont convenables au bien de l'Etat ; c était par faillesse, par erreur ou par indifférence, que les princes avaient alors abandonné aux pontifes le gouvernement de l'Eglise; c'est par préjugé que les évêques ont prétendu à l'indépendance; les conciles et les Pères ont ignoré jusque-là les bornes de leur autorité, et les droits du souverain!

C'est donc ce même Athanase, que l'Eglise avait regardé comme une des colonnes de la vérité, qui foule aux pieds l'Evangile, qui insulte à l'empereur, qui tente de le dépouiller de sa couronne, et qui invite tous les évêques à la rébellion! On nous permet tra de n'en rien croire, car il n'est pas le scul à professer celle doctrine comme nous allons le voir.

Le concile de Sardique, tenu l'an 347, et dont le célèbre Osius de Cordoue était l'âme, stitue qu'on priera l'empereur d'ordonner qu'aucun juge n'entreprenne sur les affaires ecclésiastiques, parce qu'ils ne doivent connaitre que des affaires temporelles. « Saint Hilaire se plaint à Constance des entreprises de ses juges, et leur reproche de vouloir connaître des affaires ecclésiastiques, eux à qui il ne doit être permis de se mêler que des affaires civiles.

« La loi de Jésus-Christ vous a soumis à moi, disait saint Grégoire de Nazianze, en s'adressant aux empereurs et aux préfets: car nous exerçons aussi un empire beaucoup au-dessus du vôtre. » Et ailleurs : « Vous qui n'êtes que de simples brebis, ne transgressez pas les limites qui vous sont prescrites. Ce n'est pas à vous à paître les pasteurs; c'est assez qu'on vous paisse bien. Juges, ne prescrivez pas des lois aux législateurs. On risque à devancer le guide qu'on doit suivre, et on enfreint l'obéissance qui, comme une lumière salutaire, protége et conserve égale ment les choses de la terre et celles du ciel. » (Orat. XVII).

Quel est donc cet empire des évêques, cet empire auquel les empereurs sont obligés d'obéir, si les empercurs doivent juger eux

mêmes, en dernier ressort, des matières ccclésiastiques? Car alors ne sera-ce pas plutôt à l'évêque à obéir, qu'au magistrat?

Sur les affaires qui concernent la foi ou l'ordre ecclésiastique, c'est à l'évêque de juger, disait saint Ambroise, en citant le rescrit de Valentinien. L'empereur est dans l'Eglise et non pas au-dessus. » Imperator bonus intra Ecclesiam, non supra Ecclesiam est (Epist. ad Valent. 21, n. 2; in conc. contr. Aux. n. 36).

L'antiquité a toujours applaudi à cette noble fermeté d'un illustre pontife (Léonce, évêque de Tripoli, dans la Lybie) qui, dans une assemblée d'évêques où Constance se mêlait de régler la discipline de l'Eglise, rompit enfin le silence par ces paroles, rapportées par Suidas. « Je suis surpris que vous, qui êtes préposé au gouvernement de la république, vous entrepreniez de prescrire aux évêques ce qui n'est que de leur ressort. » Miror qui ul aliis curandis destinatus, alia tractes; qui cum rei militari et reipublicæ præsis, episcopis ea præscribas, quæ ad solos pertinent episcopos.

Selon saint Jean Damascène, ce n'est pas au roi à statuer sur les objets de la religion. Ilis de rebus (ecclesiasticis) statuere ac decernere non ad reges pertinet (Orat. I. de imag.), et ailleurs: «Prince, nous vous obéissons dans ce qui concerne l'ordre civil, comme nous obéissons à nos pasteurs sur les matières ccclésiastiques. » (Orat. II, n. 17).

« Comme il ne nous est pas permis de porter nos regards dans l'intérieur de votre palais, disait Grégoire Il à Léon l'Isaurien, vous n'avez pas non plus le droit de vous mêler des affaires de l'Eglise. »

Les évêques catholiques tiennent le même langage à Léon l'Arménien qui les avait assemblés en Orient, au sujet du culte des images (Baron. Tom. IX, aď‍ann. 814, n. 12, pag. 610).

Nicolas I, dans sa lettre à l'empereur Michel, marque expressément les fonctions que Dieu a prescrites aux deux puissances; aux rois, l'administration du temporel; aux évêques, l'administration des choses spirituelles: « Si l'empereur est catholique, il est l'enfant et non le prélat de l'Eglise, dit le canon: Si imperator. Qu'il ne se rende donc pas coupable d'ingratitude par ses usurpations, contre la défense de la loi divine; car c'est aux pontifes, non aux puissances du siècle, que Dieu a attribué le pouvoir de régler le gouvernement de l'Eglise » (C. Si imperator, i 2, dist. 96).

On peut encore voir dans le droit canon la distinction 10, c. Certum est, 3; c. Imperium, 6, et le chapitre Solita 6, de majorit. et obedientia, tit. 33. Nous avons rapporté sous le mot LÉGISLATION, § 2, le canon Duo sunt, dist. 96.

L'indépendance de l'Eglise quand elle ne serait pas formellement établie par la paroledivine, par les traditions apostoliques et les saints canons, serait encore un corollaire in◄ dispensable de son universalité. Les États naissent et périssent, l'Eglise est fondée pour tous les siècles; les États sont circonscrits dans des limites éventuelles et variables;

l'Eglise n'a d'autres limites que les limites mêmes du monde. Comment pourrait-elle tomber sous la dépendance d'une puissance qui, existant aujourd'hui, peut n'être plus demain, et dont les intérêts changent sans cesse, landis que la vocation de l'Eglise et les moyens que le Sauveur lui a laissés pour pouvoir la remplir sont aussi permanents l'une que les autres? De celle diversité de nature et de constitution naft essentiellement un droit d'indépendance, c'est-à-dire de souveraineté des deux puissances, en ce qui est du ressort de chacune; et si cet ordre admirable est si souvent troublé, si la souveraine indépendance de l'Eglise est aujourd'hui si vivement et si communément controversée par les champions de la souveraineté politique, c'est que, sans doute, il n'en est pas autrement de cette question que de tant d'autres qui se présentent dans la vie politique comme dans la vie individuelle: « C'est que ce qui est temporel, dit l'illustre archevêque de Cologne, est préféré à ce qui est éternel; ce qui est de la terre l'emporte sur ce qui est du ciel; «la puissance militaire, en laquelle se réa sume, en dernière analyse, le pouvoir civil, « obtient plus de respect que le droit, cette a force physique se fait plus craindre que l'autorité de la morale.» (De la paix entre 'Eglise et les Etats).

L'indépendance de l'Eglise a été reconnue par les lois de beaucoup de princes chréliens. Valentinien III enseigne qu'il n'est pas permis de porter devant les tribunaux séculiers les causes qui concernent la religion. Quelque habile que fût ce prince dans la science du gouvernement, il n'ose toucher à ces objets sacrés qu'il reconnaît être au dessus de lui. Pie admodum in Deum affectus fuit, dit Sozomène, adeo ut neque sacerdotibus quidquam imperare, neque novare aliquid in institutis Ecclesiæ quod sibi deterius videretur vel melius, omnino aggrederetur. Nam quamvis esset optimus sane imperator, et ad res agendas valde accommodatus, tamen hæc Buum judicium longe superare existimavit (Sozom., Hist. lib. VI, c. 21).

Les empereurs Honorius et Basile renvoient aux évêques les matières ecclésiastiques, et déclarent qu'étant eux-mêmes du nombre des ouailles, ils ne doivent sur cela avoir en partage que la docilité des brebis (Labbe, concil. tom. II, col. 1311). L'empereur Justinien se borne à exposer au souverain pontife ce qu'il croit utile au bien de l'Eglise et lui en laisse la décision, protestant qu'il veut conserver l'unité avec le saintsiége L. Reddentes 9; cod. de summa Trinitate). Rien de plus précis que cette loi du même empereur sur l'origine et la distinction des deux puissances. « Dieu, dit-il, a confié aux hommes le sacerdoce et l'empire; le sa«cerdoce pour administrer les choses divines, l'empire pour présider au gouvernement civil, l'un et l'autre procédant de la même source. » Maxima quidem hominibus sunt dona Dei a superna collata clementia, sacerdotium et imperium : et illud quidem divinis ministrans, hoc autem humanis præsi

dens ac diligentiam exhibens; ex uno eodemque principio utraque procedentia, humanAM exornant vitam (Authent. Quomodo oport. episcopos, in princ. col. I).

Nos rois ne se sont pas expliqués d'une manière moins précise. Quelque attentif que soit Philippe le Bel à maintenir les droits de

couronne, il les renferme dans l'ordre des choses temporelles. Il refuse le privilége que lui offre Boniface VIII de nommer aux évéchés, et il allègue pour raison qu'il ne vent point exposer son salut en se chargeant de donner des pasteurs aux Eglises. Ce soin était donc étranger aux droits de la souveraineté. Gratias agimus tibi de his quæ in periculum animarum nostrarum imperasti, videlicet ut Ecclesiis provideamus (Rebuffe, pram. in concord.). François Ier, Henri II dans l'édit de Melun, Henri IV dans celui de 1608, Louis XIII dans celui de 1610 et dans l'ordonnance de 1629, Louis XIV dans l'édit de 1695, défendent aux juges séculiers de prendre connaissance des matières spirituelles.

On trouve dans les Preuves des libertés de l'Eglise gallicane (tom. II, edit. de 1731), ouvrage peu suspect, beaucoup d'autres autorités semblables.

Domat ne cesse d'inculquer que Dieu ayant établi ses ministres dans l'ordre spirituel de la religion et les rois dans l'ordre temporel de la police, ces deux puissances doivent se protéger mutuellement et respecter les bornes que Dieu leur a prescrites, en sorte quel les rois soient soumis à la puissance spirituelle en ce qui regarde les matières de la religion, et les évêques à celle des rois dans

les matières civiles.

« Ces deux puissances, dit-il, ayant entre elles l'union essentielle qui les lie à leur origine commune, c'est-à-dire à Dieu, dont elles doivent maintenir le culte, chacune selon son usage, sont distinctes et indépendants l'une de l'autre dans les fonctions propres à chacune. Ainsi les ministres de l'Eglise ont de leur part le droit d'exercer les leurs, sans que ceux qui ont le gouvernement temporel puissent les y troubler; et ils doivent méme les y soutenir en ce qui peut dépendre de leur pouvoir. Ainsi ceux qui ont le ministère du gouvernement ont, de leur part, le droit d'exercer les fonctions qui en dépendent, sans qu'ils y puissent être troublés par les ministres de l'Eglise, qui doivent, au contraire, inspirer l'obéissance et les autres devoirs envers les puissances que Dieu a établies sur le temporel » (Lois civiles du droit public, liv. I, tit. 19, sect. 2, § 1).

Il est évident que cette protection réciproque que se doivent les deux puissances ne leur donne point le droit de s'assujettir reciproquement dans l'exercice de leur juridiction, et qu'en se protégeant il ne leur est pas permis de sortir de la subordination où elles sont sur les matières qui concernent la puissance protégée, puisque les deux puissances sont totalement distinctes et par conséquent souveraines et indépendantes dans leurs fonc tions.

Il est donc incontestable que Jésus-Christ,

parson ineffable providence, sépara le pouvoir de l'Eglise de celui de l'Etat, en pourvoyant chacun de tout ce qui lui était nécessaire à son indépendance et pour s'élever par de mutuels secours : toute tentative pour obscurcir celte vérité el tenir l'Eglise en tutelle doit donc être regardée comme une usurpation audacieuse, comme le renversement de l'ordre établi par Dieu même.

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« L'Eglise, dit à ce sujet un savant évêque d'Espagne, peut subsister sans dimes, sans propriétés, sans religieuses, sans moines el même sans temples, mais nullement sans liberté et sans indépendance. Cet élément est si indispensable à son régime moral, « qu'en accordant pour un moment l'aliénation de son indépendance, on aperçoit aussitôt la destruction, la fin et la disparition ⚫ du catholicisme; car le gouvernement de l'Eglise, depuis son établissement, ayant été entre les mains des apôtres et de leurs successeurs, si les évêques consentaient « aujourd'hui à le transférer au pouvoir civil, ce gouvernement, comme tous les gouvernements du monde, serait variable, défectible et sujet aux variations continuelles « des constitutions politiques, comme l'a déjà observé dans un autre sens le trèssavant Capellari (Grégoire XVI avant d'è tre pape, lorsqu'il écrivait contre les jansénistes). Or, l'indépendance de l'Eglise est un dogme corrélatif à la foi, son gouvernement est immuable, son pouvoir est divin; ་ et afin que jamais, sous quelque prétexte « que ce fût, on ne pût élever des doutes sur cette vérité importante, le Seigneur délégua aux évêques le même pouvoir avec lequel l'avait envoyé son Père éternel. Avec une prérogative si prodigieuse, il n'y a plus lieu à faire attention aux personnes. Comme hommes, ils pourront paraître obscurs, faibles, d'une humble naissance, et quelquefois même peut-être peu versés dans la littérature, les sciences et les arts; mais, comme évêques, ils représenteront toujours ceux que le Saint Esprit a instilues pour le gouvernement de son Eglise, avec laquelle il doit être jusqu'à la consommation des siècles.

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« Cette doctrine catholique qui, au commencement du christianisme, retentissait aux oreilles des savants du monde comme une hyperbole, devient plus intelligible à mesure que les siècles se succèdent. Dans l'espace de dix-huit siècles et demi le monde a vu la fin et le terme d'innombrables royaumes, empires et nations; on a vu des milliers de peuples, d'idiomes, de lois et d'usages disparaître les uns après les autres, sans nous laisser autre chose qu'un souvenir confus de leur ancienne renommée; mais l'Eglise de Dieu, figurée dans la parabole du grain de sénevé, a levé la tête, comme il était prédit, sur toutes les fles, mers, climats et régions, et réuni autour d'elle d'innombrables enfants sous le gouvernement de Jésus-Christ. Comment les évêques auraient-ils osé commencer, pu poursuivre et venir à bout d'une œuvre si

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<«< admirablement prodigieuse, s'ils n'étaient «< assistés du Saint-Esprit? Or, un tel prodige « étant incontestable, il est de toute évidence « que l'autorité temporelle ne saurait envaa bir le gouvernement de l'Eglise sans s'op« poser à l'ordre de Dieu. Je sais que les no«vateurs répondent que leur intention n'est « pas de soumettre l'Eglise pour ce qui tou« che au dogme, mais seulement pour ce qui « est de discipline. Mais, même en admettant «< une si insidieuse distinction, je leur ferai « observer qu'ils professent une doctrine hé« rétique mille fois anathématisée; que l'E« glise, depuis sa naissance, ayant eu besoin « de discipline pour se gouverner, elle a dû << la former, la soutenir et la varier à son «gré avec une indépendance absolue » (Indépendance constante de l'Eglise du pouvoir civil, par Monseigneur Romo, évêque des Canuries, part. I, ch. 1) (Voyez LEGISLATION).

Concluons donc par cette maxime d'un auteur gallican: « La puissance ecclésiastique est indépendante de la temporelle, et la temporelle est indépendante de la spirituelle » (Hist. du droit can., ch. 10).

INDEX.

Ce mot signifie catalogue ou table. Il s'applique à la liste des livres dont on a défendu à Rome l'usage et la lecture. Il y a à cet effet une congrégation de cardinaux, qu'on appelle la congrégation de l'index (Voyez LIVRE, CONGREGATION).

Voici en quels termes sont conçus les décrets qui mettent les livres dangereux à l'Index.

Sacra congregatio eminentissimorum ac reverendissimorum sanctæ romanæ Ecclesiæ cardinalium a sanctissimo Domino nostro Gregorio papa XVI sanctaque sede apostolica indici librorum prave doctrinæ, eorumdemque proscriptioni, expurgationi, ac permissioni in universa christiana republica præpositorum et delegatorum, habita in palatio apostolico vaticano, damnavit et damnat, proscripsit proscribitque, vel alias damnata atque proscripta in indicem librorum referri mandavit et mandat opera quæ sequuntur:

Vient ensuite la liste des ouvrages condamnés.

Itaque nemo cujuscumque gradus et conditionis prædicta opera dumnata atque proscripta, quocumque loco, et quocumque idiomate, aut in posterum edere, aut edita legere, vel retinere audeat, sed locorum ordinariis, aut hæretica pravitatis inquisitoribus ea tradere teneatur, sub pœnis in indice librorum vetitorum indictis.

Quibus sanctissimo Domino nostro Gregorio papæ XVI per me infra scriptum secretarium relatis, sanctitas sua decretum probavit et promulgari præcepit. In quorum fidem, etc.

Datum Romæ die..... 1844. Card. N. Præfectus. C'est dans la congrégation du saint office de Rome que se fait l'index expurgatorius, auquel on inscrit à mesure tous les livres qui sont censurés par le saint office. Paul IV qui avait un grand zèle pour le maintien et

l'accroissement de l'inquisition, voulant remédier aux désordres causés par la lecture des mauvais livres, chargea les inquisiteurs d'en faire un index ou catalogue, qu'il publia dans la suite. Les peines qu'il impose à ceux qui violeraient la défense de lire ces livres sont extrêmement sévères : elles consistent dans l'excommunication, la privation et l'incapacité de toutes charges et bénéfices, l'infamie perpétuelle et autres peines semblables. Il se réservait le pouvoir de lever seul de ces censures et de ces peines. On députa au concile de Trente en 1562, dans une congrégation, dix-huit Pères du concile, pour Travailler au catalogue ou index des livres défendus, à condition néanmoins que ce catalogue ne serait publié qu'à la fin du concile, pour ne pas aigrir l'esprit des protestants. Il y eut le 24 mars 1564, une bulle de Pie IV, pour l'approbation de l'index, c'est-àdire, du catalogue des livres dont la lecture fut défendue, et qui fut composé par les députés du concile de Trente. Cet index a été considérablement augmenté depuis. Ainsi lorsqu'on dit qu'un livre a été mis à l'index à Rome, on veut dire qu'il a été condamné par la congrégation de l'index, el mis au catalogue des livres défendus.

L'index est divisé en trois parties; la première contient les noms des auteurs, la seconde les livres condamnés, et la troisième les livres anonymes.

INDICTION.

L'indiction est une révolution de quinze années dont il est fait usage dans la date des bulles de Rome (Voyez CALENDES, CALENDRIER.)

INDIGNE, INDIGNITÉ.

Parmi ceux qui sont incapables de posséder des bénéfices dont nous avons parlé sous le mot INCAPABLE, on trouve compris les indignes rendus tels par leurs crimes, reconnus par un jugement, ou légitimement soupçonnés de les avoir commis.

En traitant de l'irrégularité, nous parlons de ceux qui sont indignes des ordres; et sous le mot INFAME, nous éclaircissons les principes sur celle double indignité de recevoir les ordres ou de les exercer, d'obtenir ou de posséder des bénéfices. Nous ne nous répéterons pas (Voyez INCAPABLES, IRRÉgularité, inVAMIR).

Les canons ont établi diverses peines contre ceux qui confèrent les bénéfices à des indignes.

INDULGENCES.

Indulgence vient du mot latin indulgere, qui signifie remettre ou pardonner à quelqu'un les fautes dont il s'est rendu coupable. On se servait autrefois du mot rémission pour indulgence, comme il paraît par le chapitre: Quod autem, de pænit. et remiss. Polman la définit en général dans ces termes : Indulgentia est absolutio potestate clavium a pena injuncta vel injungenda.

§ 1. INDULGENCES. Pouvoir de les accorder. L'Eglise a le pouvoir d'accorder des indul

gences, et l'usage en est très-salutaire aux fidèles; c'est ce que le concile de Trente nous défend de nier sous peine d'anathème, en ces termes : « Comme l'Eglise a reçu de Jésus-Christ le pouvoir d'accorder des indul gences, et que dès les temps les plus anciens elle a fait usage de ce pouvoir divin, le saint concile décide et enseigne que l'usage des indulgences est très-salutaire au peuple chrétien, qu'il est appuyé sur l'autorité des saints conciles, et doit être retenu dans l'Eglise. Il anathématise ceux qui disent qu'elles sont inutiles ou qui nient que l'Eglise ait le pouvoir de les accorder. » (Sess. XV, Décret sur les indulgences.)

Les théologiens et les canonistes parlent de plusieurs sortes d'indulgences, mais celles qui s'introduisirent dans le onzième siècle, en considération de quelque œuvre de piété, comme de bâtir ou de visiter certaines églises, de porter les armes contre les ennemis de la religion, etc., sont les dernières et celles qui ont fait abroger la pénitence canonique ou les canons pénitentiaux, dont plusieurs anciens conciles permettaient de modérer la rigueur, suivant les circonstances et la disposition des pénitents (Voyez PÉNITENCE, CANONS PÉNITENTIAUX).

Comme on abuse des meilleures choses, les indulgences qu'on trouva bon d'introduire pour inviter aux bonnes œuvres, et pour suppléer seulement à l'impuissance et à la faiblesse des pécheurs, furent bientôt, à ceux qui les dispensaient, une occasion de simonie et d'avarice, et à ceux qui les recevaient, le prétexte d'une impénitence d'autant plus dangereuse, qu'elle leur paraissait permise. On voit la preuve de ces désordres dans le règlement que fit sur cette matière le concile de Latran tenu en 1215, sous le pape Innocent III: Qui autem ad quærendas eleemosy nas destinantur modesti sint et discreti: nec in tabernis, aut in aliis locis incongruis hos pitentur, nec inutiles, faciant, aut sumptuosas expensas, caventes omnino ne fulsæ religionis habitum gestent.

Ad hæc, quia per indiscretas et superfluns indulgentias, quas quidem ecclesiarum prælati facere non verentur, et claves ecclesia contemnuntur, et pænitentialis satisfactio ener vatur, decernimus, ut cum dedicatur basilica, non extendatur indulgentia ultra annum, sire ab uno solo, sive a pluribus episcopis dedicetur, ac deinde in anniversario dedicationis tempore quadraginta dies de injunctis panitentiis indulta remissio non excedat; infra hunc quoque dierum numerum indulgentiaquibuslibet casibus aliquoties conceduntur cum rum litteris præcipimus moderari, quæ pro Romanus pontifex, qui plenitudinem obtinet potestatis hoc in talibus moderamen consueverit observare (C. Cum ex eo de pænit. ef remis.).

Ce décret n'a pas eu dans la suite l'exécution qu'on en devait attendre les mêmes abus et peut-être de plus grands encore de la part de ces quêteurs ont continué jusqu'au temps da concile de Trente. Les conciles de Lyon et de Vienne les avaient déjà condam

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