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LES ENNÉADES

TROISIÈME ENNÉADE

LIVRE PREMIER.

DU DESTIN1.

I. Ou toutes les choses qui deviennent et toutes celles qui existent ont également une cause, les unes de leur devenir, les autres de leur existence; ou les unes et les autres n'ont également pas de cause; ou, dans les premières aussi bien que dans les secondes, quelques-unes ont une cause, et d'autres n'en ont pas ; ou les choses qui deviennent ont une cause, tandis que celles qui existent, en partie ont une cause, en partie n'en ont pas; ou aucune des choses qui existent n'a de cause; ou bien, au contraire, toutes les choses qui existent ont une cause, tandis que celles qui deviennent, en partie ont une cause, en partie n'en ont pas; ou enfin aucune des choses qui deviennent n'a de cause 2.

D'abord, dans l'ordre des choses qui existent toujours, les essences qui occupent le premier rang ne peuvent être

Pour les Remarques générales, Voy. les Éclaircissements sur ce livre, à la fin du volume. Pour cette manière d'énumérer toutes les hypothèses qu'on peut faire sur une question, Voy. les Éclaircissements du tome I, p. 410.

ramenées à d'autres causes, puisqu'elles sont premières. Quant aux essences qui dépendent des essences premières, admettons qu'elles en tiennent aussi l'existence1. Il faut en outre rapporter à chaque essence l'acte qu'elle produit: car, pour une essence, exister, c'est produire tel acte.

Ensuite, dans l'ordre des choses qui deviennent, ou qui, bien qu'elles existent toujours, ne produisent pas toujours le même acte, on peut affirmer hardiment que tout a une cause. Il ne faut pas admettre que quelque chose arrive sans cause2, ni laisser le champ libre aux déclinaisons ar– bitraires des atomes (rapeynλices), ni croire que les corps entrent en mouvement soudainement et sans raison déterminante, ni supposer que l'âme entreprenne de faire une action par une détermination aveugle (ὁρμῆ ἐμπλήκτῳ) et sans aucun motif*. C'est la soumettre à la nécessité la plus

1 Pour la hiérarchie des causes, Voy. Proclus, Éléments de Théologie, S 11, 12. 2 Τὸ δ ̓ ἀναίτιον οὐ παραδεκτέον. C'était une maxime des Stoïciens: < Concludit Chrysippus hoc modo: « Si est ⚫ motus sine causa, non omnis enuntiatio aut vera aut falsa erit. › Causas enim efficientes quod non habebit, id nec verum nec » falsum erit. Omnis autem enuntiatio aut vera aut falsa est. Motus > ergo sine causa nullus est. » (Cicéron, De Fato, 10.) Leibnitz a fait de ce principe l'une des bases de son système : ‹ Jamais rien > n'arrive sans qu'il y ait une cause ou du moins une raison déter>minante, c'est-à-dire quelque chose qui puisse servir à rendre › raison à priori pourquoi cela est existant plutôt que de toute >> autre façon. Ce grand principe (de la raison déterminante) a lieu dans tous les événements, et on ne donnera jamais un exemple contraire.» (Théodicée, I, § 44.) Leibnitz est sur ce point d'accord avec saint Augustin, qui a développé le même principe dans son traité De l'Ordre, I, 4. 3 Deinde ibidem homo acutus [Epicurus], » quum illud occurreret : si omnia deorsum e regione ferrentur et, > ut dixi, ad lineam, nunquam fore ut atomus altera alteram possit » attingere; itaque attulit rem commentitiam declinare dixit

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» atomum perpaulum, quo nihil fieri posset minus. > (Cicéron, De Finibus, I, 6.) — Epicurus, quum videret, si atomi ferrentur > in locum inferiorem suopte pondere, nihil fore in nostra potes

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