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La trop courte beauté monta sur des patins;1
La coquette tendit ses lacs tous les matins;
Et, mettant la céruse et le plâtre en usage,
Composa de sa main les fleurs de son visage.
L'ardeur de s'enrichir chassa la bonne foi:
Le courtisan n'eut plus de sentimens à soi.
Tout ne fut plus que fard, qu'erreur, que tromperie.
On vit partout régner la basse flatterie.

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Il

1 La trop courte beauté : On n'a jamais entendu dire ni vu écrire cela. Pradon, p. 84. — Vers devenu proverbe (voy. note 1, p. 105). Clairfons. paraît un modèle d'élégance poétique à M. Daunou, et il a été imité par Regnard (Épitre au marquis de ***).

Sur un patin de liège élevant sa chaussure,

Lise veut être grande en dépit de nature.

2 Vers 133 à 136. Regnier, satire ix (et non satire IV ou satire x, citées par des éditeurs), vers 184 à 194 (et non 84 à 94):

L'amant juge sa dame un chef-d'œuvre ici-bas,
Encore qu'elle n'ait sur soi rien qui soit d'elle,
Que le rouge et le blanc par art la fassent belle,
Qu'elle ante, en son palais, ses dents tous les matins ;

Qu'elle doive sa taille au bois de ses patins......

Et tout ce qui de jour la fait voir si doucette,

La nuit, comme en dépôt, soit dessous la toilette, etc.

Boileau, dit Clément, n'a pas dédaigué d'imiter ces images riantes et satiriques, en les habillant de couleurs plus élégantes et plus poétiques (dans les vers 133 à 136 de l'épît. 1x, et 197 à 200 de la sat. x). On ne saurait peindre d'aussi petites choses avec plus de noblesse et de poésie; mais je trouve qu'il y a plus de naïveté dans les vers de Regnier, surtout dans les deux derniers et dans le second (encore qu'elle, etc.) qui est d'une précision et d'une simplicité admirables. Nouv. obs., 452. — M. Amar loue aussi la grâce simple et naïve des vers de Regnier, tandis que M. Daunou paraît trouver Boileau bien supérieur; le premier rappelle à cette occasion l'épigramme si connue de Le Brun:

Chloé, belle et poète, a deux petits travers,

Elle fait son visage et ne fait pas ses vers.

-Les vers 133 à 136 sont supprimés au Boileau classique.

Le Parnasse surtout, fécond en imposteurs,
Diffama le papier1 par ses propos menteurs.
De là vint cet amas d'ouvrages mercenaires,
Stances, odes, sonnets, épîtres liminaires,2
Où toujours le héros passe pour sans pareil,
Et, fût-il louche et borgne3, est réputé soleil. *
Ne crois pas, toutefois, sur ce discours bizarre,
Que,
d'un frivole encens malignement avare,
J'en veuille sans raison frustrer tout l'univers.
La louange agréable est l'âme des beaux vers.

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1 Belle expression! le mensonge déshonore tout; jusqu'au papier. Le Brun.

- M. Amar admire aussi cette expression; M. Daunou demande si diffama n'est pas un peu forcé.

2 Liminaires ne se dit plus: on ne dit que préliminaire avec discours.... Féraud, Lévizac, M. Fontanier.

3 V. E. Texte de 1683 à 1713. On a mis mal-à-propos, louche ou borgne dans quelques éditions modernes, telles que 1821, S. S.; 1821, 1824 et 1828, Am.; 1825, Dau.; 1826, Mar.; 1828, Thi...

4 Ménage (égl., Christine, 1656) avait dit de Servien :

Le grand, l'illustre Abel, cet esprit sans pareil,
Plus clair, plus pénétrant que les traits du soleil.

Cependant Servien (surintendant des finances) était borgne, dit Brossette.— Il aurait dû ajouter que Ménage, pénétré apparemment de la beauté de son éloge, en avait déjà fait un du même genre ( Miscellanea, 1652, p. 113) pour Chapelain :

Cet homme merveilleux, dont l'esprit saus pareil
Surpassait en clarté les rayons du soleil.

Vers 117 à 146. Saint-Marc (V, 484, 485) a critiqué cette allégorie sur l'origine du faux comme peu exacte, quoiqu'il convienne qu'on ne peut pas exiger la même justesse dans une pièce de poésie que dans un traité de morale. Nous aimons mieux rappeler que Boileau a déjà traité ce sujet dans la satire XI (v. 139 et suiv.) et dans l'épître 111 (v. 55 et suiv., ci-dev. p. 32 et suiv. ), et dire avec M. Amar qu'on ne saurait trop admirer l'art avec lequel le poète sait étendre et varier les mêmes idées, par le charme toujours nouveau, jours heureux, de l'expression qu'il leur prête.

tou

Mais je tiens, comme toi, qu'il faut qu'elle soit vraie,
Et que son tour adroit n'ait rien qui nous effraie.1
Alors, comme j'ai dit, tu la sais écouter,

Et sans crainte à tes yeux on pourrait t'exalter. 2
Mais sans t'aller chercher des vertus dans les
nues,
Il faudrait peindre en toi des vérités connues;
Décrire ton esprit ami de la raison,

Ton ardeur pour ton roi, puisée en ta maison:
A servir ses desseins ta vigilance heureuse;
Ta probité sincère, utile, officieuse.

Tel, qui hait à se voir peint en de faux portraits,
Sans chagrin voit tracer ses véritables traits.
Condé même, Condé3, ce héros formidable,

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Et, non moins qu'aux Flamans, aux flatteurs redoutable,
Ne s'offenserait pas si quelque adroit pinceau
Traçait de ses exploits le fidèle tableau;

Et dans Seneffe en feu contemplant sa peinture,
Ne désavoûrait pas Malherbe ni Voiture. 6

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1 Une louange grossière révolte, dégoûte; on la craint, mais elle n'effraie pas. Saint-Marc, V, 485.

2 Exalter et exaltation sont du langage de la chaire et non pas de celui des vers. Pradon, R., 85.

5 Louis de Bourbon, prince de Condé, mort en 1686. Boil., 1713( voy. les notes suivantes).

▲ V. E. Orthographe de 1683 à 1701, que Boileau a pu employer puisque on écrit indifféremment (Encyclopéd., Géograph.) Seneffe, ou Senef... Nous avons cru devoir la maintenir parce qu'en rendant longue l'avant-dernière syllabe de ce mot, elle atténue beaucoup la consonnance qui résulte des mots Senef en feu, tandis qu'en écrivant, comme les éditeurs modernes, Senef, cette consonnance se fait beaucoup plus sentir.

5 Combat fameux de monseigneur le Prince. Boil., 1713 (11 août 1674, contre le prince d'Orange... Bross.)

6 Voici Voiture accolé à Malherbe; c'est sans doute pour la rime: car ce Voiture, ingénieux quelquefois, et plus souvent maniéré, était peu propre

Mais malheur au poète insipide, odieux,
Qui viendrait le glacer d'un éloge ennuyeux!
Il aurait beau crier : « Premier prince du monde! »
Courage sans pareil! lumière sans seconde!»>1
Ses vers, jetés d'abord sans tourner le feuillet,
Iraient dans l'antichambre amuser Pacolet. 2

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Boileau,

à chanter les exploits du grand Condé dans Senef en feu. Le Brun.quoi qu'en dise Le Brun, ne songe à rapprocher ici ni le ton ni la manière de deux écrivains aussi opposés : c'est simplement une allusion à la manière fine et délicate dont Voiture avait célébré, en 1645, les exploits du héros de Senef. M. Amar, 1824.

1 Commencement du poème de Charlemagne. Boil., 1683 à 1713 (Ce début était dans la première édition. Bross.).

2 Fameux valet de pied de monseigneur le Prince. Boil., 1683 à 1713. - Condé donna en effet le poème de Charlemagne à Pacolet. Bross.

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Je ne sais si les trois nouvelles épîtres que 2 je donne ici au public auront beaucoup d'approbateurs; mais je sais bien que mes censeurs y trouveront abondamment de quoi exercer leur critique car tout y est extrêmement hasardé. Dans le premier de ces trois ouvrages, sous prétexte de faire le procès à mes derniers vers, je fais moi-même mon éloge, et n'oublie rien de ce qui peut être dit à mon avantage; dans le second, je m'entretiens avec mon jardinier de choses très basses et très petites; et dans le troisième, je décide hautement du plus grand et du plus important point de la religion, je veux dire de l'amour de Dieu. J'ouvre donc un beau champ à ces censeurs, pour attaquer en moi, et le poète orgueilleux, et le villageois grossier, et le théologien téméraire. Quelques fortes pourtant que soient leurs attaques, je doute qu'elles ébranlent la ferme résolution que j'ai prise il y a long-temps de ne rien répondre, au moins sur le ton sérieux, à tout ce qu'ils écriront contre moi.

A quoi bon en effet perdre inutilement du papier? Si mes épîtres sont mauvaises, tout ce que je dirai ne les fera pas trouver bonnes; et si elles sont bonnes, tout ce qu'ils diront3 ne les

1 C'est la seule indication des éditions de 1698 (sép.) à 1713 : elle suffisait parce qu'elle était précédée sur un feuillet distinct (au moins dans les in-40s) du faux-titre Épîtres nouvelles. Saint-Marc et autres ajoutent au mot préface une explication pour désigner l'objet de cette préface... Elle fut composée en 1697, et publiée en 1698 (non en 1695 ou 1696), avec les épîtres x, xi et XII (tome I, Notice bibliogr., n° 79, et ses renvois).

2 V. O. les 1698 sép... les trois épîtres que...

3 F. N. R. Texte de 1698 à 1713, et non pas ce qu'ils feront, faute grossière commise à 1716, in-4° et in-12, Bross.; 1717 A, Mort. et Vest.; 1718, 1722 et 1729, Dumont.; 1721, V. et Bru.; 1726, Bill.; 1735, 1740 et 1745, Souch. ; 1746 et 1767, Dr.; 1747, Saint-M.; 1749, A; 1752, 1757, 1766, 1767, 1768 et 1769, P.; 1772, A.; 1775, A. et P.; 1777, Cas.; 1780, Lon.; 1782, 1789 et 1793, P.; 1801, Ri.; 1805, Ly.; 1810, Caill.; 1814, Ny.; 1826, Dub.; 1829, B. ch... (près de quarante éditions.)

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