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Les premiers éditeurs avoient bien essayé de mettre quelque ordre dans les papiers qu'ils trouvèrent pêle-mêle après la mort de Pascal, mais la tàche fut peut-être trop forte pour eux, et leur division par chapitres ne fit qu'augmenter la confusion, en ce que, sous un même intitulé, sont souvent réunies des Pensées qui n'ont de rapport ni entre elles, ni avec le titre sous lequel elles sont classées. Condorcet, l'un des hommes les plus en état d'être éditeur de Pascal, soit qu'on le considère comme philosophe, ou commé géomètre, sut débrouiller ce chaos, et disposer son édition dans un ordre tel qu'on seroit tenté de le croire celui que Pascal eût adopté lui-même.

M. Bossut préparant, en 1779, la première et la seule édition complète qui ait jamais été faite des OEuvres de Pascal, voulut que le recueil de ses Pensées fût enfin publié avec une fidélité impartiale. Etranger aux motifs qui avoient déterminé les premiers retranchements, et à ceux qui avoient dirigé Condorcet et Voltaire dans leur choix, ce savant distingué autant qu'habile éditeur, conféra soigneusement

les manuscrits originaux sur lequels avoient été faites les précédentes éditions, et qui sont maintenant conservés à la bibliothéque impériale; il eut en outre le bonheur d'être aidé d'autres manuscrits moins étendus, mais non moins authentiques, et qui lui fournirent plusieurs excellents morceaux jusqu'alors inconnus. Le résultat de ses travaux a été un recueil beaucoup plus ample, et surtout mieux ordonné que toutes les précédentes impressions.

Ce nouvel éditeur perfectionna encore cette classification qu'avoit si bien établie Condorcet; et, grâces à ces deux hommes habiles, on n'est point fatigué dans leurs éditions par cette incohérence d'idées qui rendoit souvent si pénible la lecture des Pensées de Pascal.

Je ne pouvois suivre un meilleur guide que cette dernière édition de 1779, et c'est celle. que je reproduis ici. Je ne me suis cependant point cru dispensé de revoir aussi moi-même les manuscrits originaux ; et, indépendamment de quelques passages que cette attentive vérification m'a mis à portée de rectifier, j'ai pu recueillir encore un petit nombre de Pensées

échappées à l'attention de ceux qui m'ont précédé. On les trouvera page 198 et suivantes du second volume. Ce n'est pas que je prétende attacher trop d'importance à ces glanures de quelques pensées d'un grand homme, qui, pour ne pas être indignes de lui, ne peuvent cependant rien ajouter à sa gloire : mais elles seront au moins pour le lecteur un témoignage des soins tout particuliers que j'ai apportés à cette édition.

Une table des matières, utile dans presque tous les livres, quoique si mal à propos oubliée dans un trop grand nombre 1, est indispensable à un recueil de cette nature. Sans un pareil secours, comment se retrouver au milieu de la quantité innombrable de ces Pensées déta

1 Depuis que la quantité des livres s'est accrue d'une manière si effrayante, il semble qu'on devroit être d'autant plus soigneux à offrir aux lecteurs tout ce qui peut leur éviter d'inutiles pertes de temps, ou rappeler plus sûrement à leur mémoire de bonnes lectures antérieurement faites; cependant la plupart des réimpressions modernes de nos meilleurs livres, et surtout les éditions en petit format, sont entièrement dépourvues de tables,

chées? comment parvenir à se guider dans ses recherches. Il n'a cependant été fait jusqu'à présent qu'une table très courte, et étrangement négligée; encore ne la trouve-t-on que dans quelques éditions assez anciennes. J'ai réparé cette omission; et tout en évitant une fatigante prolixité, je me suis appliqué à donner à cette table si nécessaire, assez d'étendue

souvent même quoiqu'il en existe de très bonnes, faites par les auteurs, ou sous leurs yeux, et qui ne coûteroient que la peine de les réimprimer.

Ce qui a été exécuté, avec trop de détails peut-être, pour la presque totalité des anciens auteurs grecs et latins, pourquoi ne le feroit-on pas, en y apportant un juste discernement, pour les chefs-d'œuvre littéraires qui honoreront à jamais la France? Des tables, non- seulement des matières, mais surtout aussi des locutions (indices locutionum) usitées par Corneille, Racine, Bossuet, Fénélon, etc., ne seroient pas moins utiles pour l'étude de la littérature françoise que le sont pour la littérature latine celles qui ont été faites avec tant d'exactitude pour Virgile, Ovide, etc. etc., par des savants laborieux des seizième et dix-septième siècles, et qu'on ne peut consulter sans une vive reconnoissance pour ces hommes estimables qui ont si modestement consacré

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pour qu'en la parcourant on puisse y prendre une idée suffisante du contenu de tout le rccueil.

Ce classement par ordre alphabétique fera ressortir quelques contradictions; il rapprochera certaines propositions qui semblent peu d'accord entre elles mais on ne doit jamais perdre de vue, en lisant cet ouvrage, qu'il n'a

leurs veilles à l'utilité de tous. Pourquoi de semblables projets ne se réalisent-ils plus? Parce que nous sommes maintenant trop peu studieux, et beaucoup trop dissipés; et surtout aussi parce que, plus avides de la gloire littéraire qu'habiles à la mériter, nous ne savons pas plutôt assembler bien ou mal quelques périodes, que nous nous croyons des hommes de lettres, des auteurs : nous voulons faire des livres, souvent même sans avoir le talent d'y présenter la moindre idée nouvelle. Aussi combien de productions modernes sont faites aux dépens d'anciens ouvrages, justement par le même mécanisme qui produit les tables des matières, avec cette différence, qu'au moins celles-ci seroient utiles, tandis que de ces réminiscences et de ces larcins étendus et comme ensevelis dans une prose médiocre, ou dans des vers plus mauvais encore, il ne peut résulter que des ouvrages sans utilité comme sans intérêt, et dignes d'un prompt vubli.

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