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miracles, quand ils sont contraires aux autres lois constantes de la nature.

De tels faits sont divins, en ce qu'ils ne peuvent être que l'oeuvre de Dieu, puisque celui-là seul qui a établi les lois de la nature peut y déroger; et ils sont une démonstration convaincante de la vérité d'une religion, puisqu'il répugne que Dieu agisse pour favoriser l'erreur, surtout relativement aux hommages qu'il exige de l'homme, et qui sont le premier devoir de la créature raisonnable. Ainsi, en matière de religion, un fait divin n'est qu'un syllogisme en action: une religion en preuve de laquelle Dieu opère un fait contraire aux lois constantes de la nature, est vraie et divine: or Dieu a opéré etc. donc etc.

Mais de tels faits sont ils possibles, demande l'incrédule?... « Cette question sérieusement traitéc >> répond Jean-Jacques, serait impie, si elle n'était » absurde ce serait faire trop d'honneur à celui » qui la résoudrait négativement, que de le punir; » il suffirait de l'enfermer, (Lettres écrites de la » montagne, p. 104.) ». Qu'est-ce, en effet, qu'une exception aux lois constantes de la nature, sinon un décret éternel de Dien, lié, dans l'ordre géné ral , pour une fin sage, aux lois qu'il a établies. D'où il suit que bien loin de supposer en Dieu aucun changement, aucune faiblesse, aucune inconséquence, comme a osé le dire Voltaire (Dict. philos. art. miracles.), cette exception n'est que l'accomplissement de sa volonté éternelle

et la

manifestation de sa sagesse et de sa puissance infinies. Or, n'est-il pas absurde et impie d'avancer que les décrets de Dieu n'ont pu être qu'absolus, et qu'en les portant il a été soumis à une nécessité fatale, qui ne lui a permis, même pour une fin sage, aucune exception? Non, Dieu n'a pu perdre son domaine souverain sur ses ouvrages, ni l'un des moyens les plus frappants de manifester son pouvoir et sa protection; s'il en était autrement, ce serait le monde qui asservirait Dieu, et ce ne serait plus Dieu qui gouvernerait à son gré le monde n'est-ce point là un véritable blasphême?... D'ailleurs, qu'on nous dise en quoi il répugne, par exemple, que Dieu rende la vie à un mort. Qu'estce que la mort? La cessation du mouvement vital, et la séparation de l'ame et du corps. Et pourquoi Dieu ne pourrait-il pas unir de nouveau une ame à un corps pour rendre la vie, comme il les avait unis d'abord pour la donner? En quoi l'un seraitil plus difficile que l'autre ? Pourquoi celui qui donne le mouvement ne pourrait-il pas le rendre? Quand ce serait une seconde création, où est l'obstacle? Quoi! Dieu n'aurait pu créer qu'une seule fois? Mais il crée sans cesse, disent, de concert, l'Ecriture et la Philosophie: le métaphysicien enseigne que la conservation de l'univers est une création continue, parce qu'elle suppose l'acte continu de la volonté de création, et le Psalmiste dit avec son énergie ordinaire Retirez votre esprit créateur, et tout cesse de vivre ; envoyez de nou

veau le souffle de la vie, et tout est créé de nouveau (Ps. 133. ). Sans doute, la résurrection ne peut avoir lieu que par le retour du mouvement vital et la nouvelle union de l'ame avec le corps, parce que telle est l'essence de la vie humaine; et voila ce que Dieu ne saurait changer: tandisque rien ne s'oppose à ce qu'il déroge à l'ordre ici-bas établi, d'après lequel le mouvement vital, une fois détruit, ne se ranime plus, et l'ame ne rentre plus dans le corps une fois qu'elle en est sortie.

Mais, poursuit l'incrédule, comment peut-on discerner les faits divins des faits naturels ?..... Par la raison et l'expérience qui nous donnent la connaissance certaine des lois constantes de la nature. Ne suffit-il pas de connaître une loi pour reconnaître ce qui y est opposé, de connaître la règle pour reconnaître l'exception? (1).

1) Voici comment raisonne Jean-Jacques, pour montrer qu'on ne peut pas discerner si une prophétie est un fait divin ou humain : « Fuis» que la clarté d'une prédiction faite au hasard n'en rend pas l'accom» plissement impossible, cet accomplissement, quand il a licu, ne prou» ve rien, à la rigueur, pour celui qui l'a prédit, (Emile, livre IV, » p. 23 et 24, édit. de 1793. ) ». On ne saurait douc, d'après lui, être certain qu'une prophétie est divine, que lorsque l'accomplissement en est impossible; d'où il suit évidemment, d'un côté, que, s'il y a prophétie divine, il est impossible qu'elle s'accomplisse, et de l'autre, que, si elle s'accomplit, ce n'est pas une prophétie divine, puisque l'évènement prouve que l'accomplissement était possible. Quelle logique !....

Qu'il nous soit possible, au reste, d'être certains que l'accomplissement d'une prophétie n'est pas un simple effet du hasard, Rousseau lui-même en fournit la preuve dans un autre endroit de son Emile, où il dit : « Je ne dois point être surpris qu'une chose arrive lorsqu'elle est » possible, et que la difficulté de l'évènement est compensée par la quan

Mais pour affirmer qu'un fait est une exception aux lois de la natu: e, ne faudrait-il pas les connaître toutes? «< Car une seule qu'on ne connaîtrait » pas, dit Rousseau, pourrait, en certains cas in» connus aux spectateurs, changer l'effet de celles » qu'on connaîtrait, ( Lettres écrites de la Monta» gne, p. 107. ) ». Or, qui peut se vanter de connaître toutes les lois de la nature?... S'il était possible qu'un fait contraire aux lois constantes de la nature fût produit par une loi inconnue, il faudrait dire que les phénomènes les plus contradictoires sont également conformes aux lois de la nature, que par conséquent ce monde est régi par des lois contradictoires; or, cela est impossible sous un Dieu infiniment sage. Un homme meurt, c'est une loi de la nature; on l'enterre, il tombe en dissolution; au bout de quatre jours, à la voix d'un autre homme, il ressuscite; c'est, peut-être, dira-t-on

des

« tité des jets, j'en conviens. Cependant, si l'on me venait dire que » caractères d'imprimerie, projetés au hasard, ont donné l'Ễnéïdé tout » arrangée,je ne daignerais pas faire un pas pour aller vérifier le menson» ge. Vous oubliez, me dira-t-on, la quantité des jets ; mais de ces jets-là » combien faut-il que j'en suppose pour rendre la combinaison vraisem>> blable? Four moi, qui n'en vois qu'un seul, j'ai l'infini à parier contre » un, que son produit n'est pas l'effet du hasard (Emile, liv. IV, tome » II, p. 312: ) ». De son aveu, un fait peut donc être tel, qu'il y ait l'infini à parier contre un, qu'il n'est pas le produit du hasard. Or, l'accomplissement d'une prophétie peut exiger un tel concours de circonstances, qu'il y ait aussi l'infini à parier contre un que la prudence humaine n'a pu le prévoir; donc il peut y avoir l'infini à parier contre un qu'nne prophétie est divine. Mais quand il y a l'infini à parier contre un, cela ne prouve-t-il rien, même aux yeux de Roussean, qui tire de ce principe la démonstration de l'existence du Souverain-Être ?

en

une autre loi de la nature. Etrange solution vérité! Qu'appelez-vous loi de la nature, sinon une cause permanente qui se manifeste par des effets constans dans les mêmes circonstances? Les circonstances demeurant les mêmes, arrive-t-il que l'effet change, qu'il est tout opposé à l'effet ordinaire? Il existe une cause de ce changement, sans doute; mais ce n'est pas une cause permanente, puisqu'on ne peut reconnaître la permanence d'une canse que par la constance de l'effet dans les mêmes circonstances, Ce n'est donc pas une loi de la nature qui est cause de ce changement. Donc il n'est pas nécessaire de connaître toutes les lois de la nature pour affirmer qu'un fait est surnaturel, divin: il suffit de voir que ce fait n'aurait pas eu lieu, si les lois connues avaient conservé leur cours et leur influence. ( 1 )

Mais ne peut-il pas y avoir des êtres intermé diaires entre Dieu et l'homme, qui produisent des faits contraires aux lois constantes de la nature? Nous n'avons donc jamais le droit d'affirmer qu'un fait contraire aux lois constantes de la nature est divin..... Sans entrer dans le fond de cette question,

(1) Voyez, d'ailleurs, à quelles horribles conséquences mènerait le raisonnement de Ronsseau, en le supposant exact. Si on ne peut affirmer qu'un fait est contraire aux lois de la nature physique, sans en connaitre toutes les lois, on ne peut non plus affirmer qu'un fait est contraire aux lois de la nature morale, si l'on ne connaît pas toutes les lois de l'ordre moral. Or qui peut se vanter de les connaître toutes ?.... Aucun homme p'a donc le droit d'affirmer d'aucune action qu'elle est juste ou injuste, c'est-à-dire qu'il n'existe ni crime ni vertu.

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