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CHAPITRE II.

PIEU EST CELUI QUI EST.

Je suis celui qui suis: Ego sum qui sum. ( ↑ ) C'est ainsi que Dieu s'est défini lui-même, d'après le Pentateuque. Je suis celui qui suis : c'est-à-dire, je suis l'être par excellence, l'être infini, l'être nécessaire, en un mot l'Étre; car tout ce qu'on ajoute à ce nom en altère la sublime simplicité, et semble en restreindre le sens.

Le fondement de cette admirable définition étant solidement établi dans le chapitre précédent, devons-nous ici prouver, une à une, les perfections de Dieu ? N'est-il pas évident que, créateur de toat ce qui existe hors de lui-même, il possède avec plé nitude les perfections dont il a fait quelque part

pas évident

par

à ses créatures? N'est-il que, puisqu'il a la plus grande perfection, qui est d'exister soi-même, il est impossible qu'il n'ait pas toutes les autres? La perfection, c'est l'être : ce qui n'est qu'un peu parfait n'a qu'un peu d'être; ce qui est plus parfait en a davantage; ce qui n'a aucune perfection n'a aucun être; ce qui a donc l'être par soi

(1) Dieu s'est appelé lui-même, dans l'Ecriture, Jéhova: ce nom dans sa racine sacrée, dans l'extraordinaire combinaison de ses lettres radicales, exprime et réunit l'être dans le passé, le présent et le futur qui constituent l'éternité de Dieu: Celui qui est, qui fut, qui sera.

même existe au suprême degré d'être ou de per

fection.

D'ailleurs, si Dieu n'était pas infiniment parfait, où en serait la cause? Hors de lui? Mais il est, et il est seul l'être nécessaire et éternel, nous l'avons prouvé; par conséquent il est antérieur et supérieur à toute cause extérieure de limitation. En lui ? Serait-ce sa volonté, ou sa nature? Quoi de plus absurde que de supposer que Dieu a volontaire. ment limité ses perfections? Et, quand il aurait pu le vouloir, aurait-il pu le faire? Les modifications d'un être ne sont pas des êtres à part, ayant une existence personnelle; elles ne sont autre chose que l'ètre modifié de telle manière. Les propriétés ou perfections de l'être nécessaire sont donc l'être nécessaire lui-même: elles sont donc nécessaires et il ne peut y rien changer. Quoi de plus absurde encore, que de supposer que la nature de l'être né cessaire exige que ses perfections soient bornées ? La nécessité d'existence étant le principe d'existence le plus parfait, peut-il être un principe d'im, perfection?

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De la perfection infinie de Dieu suit nécessairement cette vérité, qu'il y a une Providence, en sorte que dire que Dieu est infiniment parfait et qu'il ne gouverne pas ce monde, c'est dire à la fois qu'il est et qu'il n'est pas infiniment parfait, c'est avancer une choquante contradiction. Si, en effet, gouvernait pas ce monde, ce serait ou parce qu'il ne le pourrait pas, ou parce que, le pou

Dieu ne

vant, il ne le voudrait pas. La première hipothèse détruit sa toute-puissance. La seconde détruit son infinie sagesse: car, si Dieu est infiniment sage, il a fait toutes ses créatures pour un but, agir sans but, agir pour agir étant indigne d'un homme raisonnable, et ce qui est indigne d'un homme raisonnable ne pouvant être digne de l'Être

par excellence. Mais si Dieu a fait toutes ses créatures pour un but, il le leur fait atteindre: car il fait tout ce qu'il veut, et il veut toujours le but pour lequel il a produit ses créatures, autrement il serait muable et imparfait.

Il est vrai qu'il en a fait de libres, comme on le verra dans le chapitre suivant, et qu'en les créant pour une fin digne de lui, il leur laisse le pouvoir d'y tendre ou de s'en éloigner. Mais il leur donne les moyens d'y parvenir, sans quoi il se manquerait à lui-même; et de leur côté ces créatures libres sont nécessairement comptables à Dieu, si elles s'en écartent: Dieu, infiniment parfait, veut nécessairement l'ordre, et l'ordre veût que la créature, qui s'éloigne du but où le créateur l'appelle, en soit comptable à sa justice.

Au reste, quand nous disons que Dieu gouverne le monde, nous n'entendons pas que pour chaque fait, pour chaque circonstance, Dieu rende un décret nouveau: de toute éternité sa providence, infinie comme lui, a compris dans un seul décret tout l'ordre du monde, a porté toutes les lois physiques, ordonné toutes les causes secondes,

d'après lesquelles tout arrive; les dérogations mêmes que sa sagesse a jugé devoir apporter à ses lois sont déterminées également de toute éternité; et le gouvernement de la Providence ne diffère point de l'éternité et de l'immutabilité de la volonté divine, embrassant la totalité des êtres et réglant tout l'ensemble et tout le détail. (1)

De l'infinité des perfections de Dieu suit encore cette vérité, qu'elles ne peuvent être assimilées aux perfections bornées de l'homme, ni embrassées et comprises par la courte vue de notre intelligence.

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Par exemple, « l'homme est intelligent, quand » il raisonne, dit Rousseau, et la suprême intelligence n'a pas besoin de raisonner: il n'y a » pour elle ni prémisses, ni conséquences; il n'y a » pas même de proposition, elle est purement in>>tuitive; elle voit également tout ce qui est, et » tout ce qui peut être; toutes les vérités ne sont )) pour elle qu'une seule idée, comme tous les lieux » un seul point, et tous les temps un seul moment. >>> La puissance humaine agit par des moyens, la » puissance divine agit par elle-même Dieu

(1) Les objections contre la Providence s'évanouissent, quand on considère que les maux de ce monde peuvent être un moyen d'expiation pour le coupable, ou une condition de mérite pour le juste, et qu'alors de la part de Dieu c'est bonté ; qu'ils peuvent être un châtiment, et qu'alors de la part de Dieu c'est justice et sainteté ; qu'ils peuvent être destinés à effrayer le coupable et à le ramener au bien par la peine et par la souffrance, et qu'alors de la part de Dieu c'est sagesse pleine de miséricorde ; qu'enfin ils peuvent servir à empêcher le juste de devenir coupable, et qu'alors de la part de Dieu c'est prévenance pleine d'amour.

» peut parce qu'il veut, sa volonté fait son pou» voir. Dieu est bon, rien n'est plus manifeste; >> mais la bonté dans l'homme est l'amour de ses » semblables, et la bonté de Dieu est l'amour de » l'ordre; car c'est par l'ordre qu'il maintient ce qui » existe, et lie chaque partie avec le tout. Dieu est » juste, j'en suis convaincu, c'est une suite de sa » bonté; l'injustice des hommes est leur œuvre et » non pas la sienne; le désordre moral qui dépose » contre la Providence aux yeux des philosophes, »> ne fait que la démontrer aux miens. Mais la jus» tice de l'homme est de rendre à chacun ce qui » lui appartient; et la justice de Dieu, de deman» der compte à chacun de ce qu'il lui a donné. »

D'autre part, la raison nous la raison nous dit que la nature de Dieu doit nous être incompréhensible, car il doit y avoir l'infini entre lui et nous. Vouloir donc connaître, après la démonstration de son existence et de son infinie perfection, comment se concilient entre eux ses attributs, ou quelles sont les voies secrètes de sa Providence, c'est vouloir sonder l'infini, et par conséquent se perdre dans un aby me. N'est-il pas vrai que Dieu est infiniment parfait ? N'est-il pas vrai qu'un être infiniment parfait est dans l'impossibilité absolue de jamais agir d'une manière contraire à sa perfection infinie? N'est-il pas vrai, par conséquent, que Dieu a des raisons suffisantes de permettre ou de faire tout ce qu'il permet et tout ce qu'il fait ? Que voulez-vous savoir de plus? Le pourquoi et le comment ?.... Mais ne doit

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