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propre courage, qu'ils menaçaient les persécuteurs; c'était par Jésus-Christ seul qu'ils se promettaient de triompher. On n'entendait sortir de leur bouche ni plaintes, ni imprécations, ni gémissemens: leur visage n'était ni altéré par la douleur, ni enflammé par la menace; une sérénité vraiment céleste rayonnait sur leur front et dans leurs yeux. Les spectateurs pleuraient d'attendrissement, les juges frémissaient de rage; et les martyrs, regardant le Ciel et répétaut les saintes prières, ne semblaient ni ressentir les tourmens, ni prendre part à ce qui se passait autour d'eux. Quoi done! leurs membres étaient-ils impassibles? Et cette espèce de miracle n'affaiblirait-il pas celui de leur constance? Dieu seul sait la mesure de ses dons et celle des forces humaines. Celles-ci, très-certainement, sont par elles-mêmes beaucoup au-dessous de ce qu'on voyait dans les martyrs; d'après l'invariable multitude des témoignages, la cruauté et la durée des tortures font frémir les sens et l'imagination; et si la nature seule eût pu les surmonter, c'eût été du moins en manifestant sa faiblesse, par la pâleur du visage, le renversement des traits et les cris d'angoisse, symptômes qui accusent au moins l'agonie du corps, même quand l'ame ne se rend pas. Mais rien de semblable n'a jamais paru dans les martyrs; et il ne nous est donné ni de savoir, ni même de comprendre jusqu'à quel point le maître de tout émoussait en eux les aiguillons des déchirantes douleurs, ni comment il enlevait leur ame

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jusqu'à lui, tandis que leur corps était livré aux tyrans de la terre. Ce qui est sûr et incontestable, c'est que l'effet même des scènes sanglantes prouve la fidélité des peintures; car il est de fait que се sont ces spectacles extraordinaires qui produisaient une foule de prosélytes, et qui devaient et pouvaient seuls les produire. Rien n'était plus commun que de voir sur-le-champ de nouveaux chrétiens e présenter au martyre; souvent même les ministres de la persécution étaient les premiers convertis. Or, si les martyrs n'avaient eu que la force de mourir pour leur foi, et que, d'ailleurs, ils eussent paru dans les souffrances aussi faibles que les autres hommes, il n'était guère naturel qu'on s'empressât de suivre leur exemple. Mais lorsque, au milieu des tortures, ils ne paraissent pas même s'apercevoir de ce que les autres ne peuvent pas me regarder, on entend dans l'ame des spectateurs ce cri qui fait les chrétiens: « Certes le Dieu des chrétiens est le Tout-Puissant. Eh! qui donc est semblable à lui? »

Dieu se plaisait aussi à environner leur mort de grandes merveilles. Mille fois, on les vit sortir tout déchirés des mains des bourreaux', et le lendemain sortir de la prison, guéris de leurs plaies: mille fois on vit les flammes et les bêtes féroces les respecter au lieu de les dévorer. Mais quand le Très-Haut avait assez fait voir à ses ennemis qu'il se jouait de leur impuissance, il faisait voir aussi à ses serviteurs qu'il ne voulait pas les priver du prix de leur

triomphe; et il permettait à la mort de rentrer dans

ses droits

martyrs.

pour ne pas

retarder l'immortalité de ses

Que pouvaient penser les païens, quand ils voyaient les fidèles, loin d'être effrayés de ces horribles exécutions, s'empresser publiquement de recueillir les restes de ces victimes sacrées, rechercher avec avidité ce qui leur avait appartenu, se disputer leurs vêtemens ensanglantés, et tremper les leurs dans ce sang devenu précieux, et même les tombeaux des martyrs devenir le théâtre des prodiges et l'autel des prières et des sacrifices.

que,

Que pouvaient-ils penser, lorsque, pendant 300 ans et parmi tant d'hommes si puissamment armés pour ne rien craindre, jamais on n'en vit un seul faire le plus léger effort contre une autorité oppressive; jamais un seul compromis ou cité dans ces factions qui partageaient l'empire, en sorte dans le temps même où ils étaient parvenus à remplir les villes et les campagnes, les cours et les armées, au milieu de toutes ces ambitions rivales, qui faisaient couler tant de sang pour posséder la terre, il n'y en, avait qu'une qui aspirât à verser le sien pour posséder le Ciel; et c'était celle des chrétiens! Qu'on cherche cela dans les annales du monde ; et le monde qui ne l'a vu qu'une fois, l'a vu pendant trois siècles ! Ce miracle-là n'est ni contesté ni contestable, et il en vaut bien un autre. Il n'y en a qu'un qui serait aussi grand, celui que supposent nos adversaires, qu'il n'y eût rien

que de naturel dans le dévouement des martyrs, La philosophie de nos jours, fatiguée d'entendre dire que la religion chrétienne seule a triomphé de trois siècles de persécutions, a pris enfin le parti de répondre que ces persécutions n'ont été ni aussi multipliées, ni aussi violentes qu'on le sup, pose; que le nombre des martyrs n'a pas été aussi grand qu'on le dit; et que, d'ailleurs, ce sont les persécutions qui ont fait les succès du Christianis

me.

Mais la première assertion est si évidemment contraire aux monumens historiques les plus incontestables, que nous croyons presque inutile de nous y arrêter. Nous avons déjà indiqué, sur ce sujet, dans le paragraphe quatrième, (p. 430 eic. ), plusieurs écrivains ecclésiastiques et profanes, auxquels on peut ajouter saint Justin, Athénagore, Origène, Théophile d'Antioche, Méliton de Sardes, Minutius Félix, qui, dans leurs apologies, se plaignent de ce qu'on ne cesse de persécuter des inneceus dont tout le crime est d'être chrétiens. Spartien qui, dans la vie de Sévère, nous apprend que cet empereur défendit, sous les peines les plus graves, d'embrasser le Judaïsme ou le Christianisme (Cap. XVII.); Lampride qui, dans la vie d'Alexandre Sévère, dit que cet empereur toléra les chrétiens (Cap. XXII): ce qui soppose que cette tolérance n'avait pas été ordinaire; le sophis te Libanius qui, dans l'éloge de Julien Papostat, loue son héros de ce que, persuadé que le Chris

tianisme avait pris des accroissemens par le carnage de ses sectateurs, il n'avait pas, comme ses prédécesseurs, employé contre les chrétiens les plus cruels supplices; enfin l'empereur Maximin II qui, d'abord ennemi des chrétiens, changea par politique, et écrivit aux gouverneurs des provinces de son obéissance une lettre dont le commencement suppose qu'avant lui la religion avait été horriblement persécutée, (Euseb. hist. eccles. lib. IX. c. IX. ). Sans doute, dans la longue période de temps qui sépare Néron de Constantin, l'empire avait eu des maîtres dignes de gouverner les hommes; mais ceux-là même, s'ils n'ont pas porté des édits sanglans contre les chrétiens, ont laissé subsister, exécuter ceux de leurs prédécesseurs, out tolé é avec trop de faiblesse les excès commis les gouverneurs, par les magistrats et le peuple (1). Secondement, le langage des écrivains ecclésiastiques des cinq premiers siècles, dans leurs histoileurs homélies, leurs apologies, leurs divers traités, est uniforme sur le nombre immense des martyrs. Or, de quel droit récuserait-on le témoiguage de personnages aussi graves, graves, aussi éclairés, aussi éminemment vertueux, qui parlaient ainsi en face des contemporains, et dont plusieurs, après avoir été témoins des persécutions, en furent les victimes? Et les autres, tels que saint Léon

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par

(1) Voyez la Défense du Christianisme, tome II; -- la savante disser- . tation servant de préface au recueil des Acres des martyrs par Dom Thy erri faunartz - le Dict. de Theol. par Bergier, art. Martyrs.

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