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nifeste dans les déterminations de l'homme de bien, que sont-elles, sinon sa vérité, sa raison, sa justice? A quel autre qu'à lui l'innocence doit-elle l'heureuse paix qui l'accompagne? La bonté, cette simplicité, cet abandon, qui la font aimer? L'humanité, ses résolutions saintes, ses élans sublimes ses émotions généreuses? Qui est-ce qui rend la douleur puissante et la pitié secourable? Qui estce qui place auprès de la tristesse, la consolation; auprès du malheur, l'amitié; auprès du bienfait la reconnaissance? Quel autre que lui appelle le remords sur les pas du crime, et commande à la terreur salutaire d'en empoisonner les jouissances, et d'en tourmenter les succès? Quel autre donne à l'ausière devoir sa fidélité, sa constance; à la prospérité, sa modération; à l'adversité, son courage; à la pauvreté, sa patience; à l'infortune non méritée, cette attitude imposante, cette dignité tranquille, qui écarte la honte, déconcerte l'outrage, et commande le res pect? Quel autre, quel autre durant le cours de ses pénibles épreuves, conseille, soutient, élève la vertu? J'ai vu la vertu aux prises avec l'iniquité: elle luttait, et il était sa force; elle cédait, et il était sa douceur; elle souffrait, et il était sa résignation; elle succombait, et, tandis que les insensés applaudissaient à sa chute déplorable, j'ai vu l'immortelle espérance briller dans ses regards éteints, et son front auguste se couvrir, en tombant, de toute la majesté de celui dont elle est la plus noble et la plus touchante image.

encore,

CHAPITRE III.

DIEU NOUS A FAITS A SA RESSEMBLANCE.

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Puisque Dieu est l'être par excellence, l'être infiniment parfait, il est esprit, ce qui est matériel étant divisible et par conséquent borné; il est libre, , il est immortel, ce qui est nécessité, ce qui peut mourir étant évidemment imparfait. Sous ces trois rapports, l'homme ressemble à son créateur: car il a une ame spirituelle, libre et immortelle. ( 1 )

S. 1. SPIRITUALITÉ DE L'AME.

Pour m'assurer si ce qui pense et veut en moi est une substance totalement distincte de mon corps, et d'une nature contraire, c'est-à-dire im

( 1 ) Si Dieu n'était pas esprit, s'il était divisible, les deux moitiés, par exemple, seraient finies ou infinies; si elles étaient finies, elles ne pourraient former ensemble un-infini; et si elles étaient infinies, elles formeraient ensemble un infini plus grand que l'infini de chacune, ce qui est absurde. D'ailleurs, si Dieu n'était pas esprit, il ne serait pas intelligent, ce qui est matériel ne pouvant penser, comme on le verra dans le paragraphe premier de ce chapitre.

Dieu créateur est évidemment libre: car il implique contradiction que les créatures, effets contingens, pouvant être ou n'être pas, soient produites par une cause qui n'aurait pas elle-même le pouvoir de les faire ou de ne pas les faire, c'est-à-dire qui ne serait pas libre.

Dieu est immortel : car étant l'être nécessaire, ayant en lui-même son principe ou sa raison d'exister, il n'a jamais pu, ni ne peut jamais n'être pas.

matérielle, je dois examiner: 1. s'il a des connais sances qui lui soient personnelles, totalement différentes de celles que donnent les sens, et bien supérieures à celles que les cinq sens réunis peuvent fournir; 2. s'il peut exercer certaines opérations qui lui soient propres, indépendamment des organes; 3. s'il peut faire certains actes diamétralement opposés à leur nature; 4°. enfin, s'il a des facultés absolument incompatibles avec les qualités connues de mon corps et de tout ce qui est matériel.

1. J'aperçois un vieillard qui m'est inconnu; il marche courbé et chancelant, le visage amaigri, la bouche et les yeux enfoncés, la tête chauve : je ne trouve en lui rien qui ne me laisse indifférent, si ce n'est qu'en fixant sur lui mes regards, j'en ai pitié comme d'un pauvre malheureux qui est à charge aux autres et à lui-même. Cependant je rencontre un de mes amis qui me le nomme, et me parle de son mérite, de son éminente vertu : cet homine qui touche à la tombe a passé par toutes les dignités d'une ville considérable, où il est né; il s'y est distingué par un désintéressement, une intégrité, un zèle pour la justice et pour le bien public, dont il y a peu d'exemples; vrai dans toutes ses paroles, ennemi déclaré de l'apparence même de la fraude ou de la duplicité, généreux et bienfaisant jusqu'à sacrifier sa fortune au soulagement des pauvres dans un temps de disette, se réduisant lui-même à trois cents francs de rente, seule ressource qu'il s'est laissée. A ce récit, je me sens pénétré d'estime et de

vénération pour lui, je l'aime, je souhaite une occasion de lui témoigner mes sentimens, je me croirais heureux seulement de pouvoir jouir de sa conversation. Ah! c'est que je vois maintenant daus ce vieillard ce que je n'y voyais pas d'abord ; je vois, sous cet extérieur presque rebutant, la beauté de sa vertu qui me touche et me ravit.

pas des yeux du corps: la vérité, la jus

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Mais cet amour de la vérité, cet attachement à la justice, ce zèle pour le bien public, ce mépris des richesses, ce dévouement aux malheureux, ne les vois tice, par exemple, ne peuvent être saisies par aucun de mes sens, ni se peindre dans mon cerveau comme un arbre ou une maison. Je puis imaginer un arbre, une maison, et une infinité d'autres choses; mais je ne puis imaginer ainsi la justice et la vérité. Néanmoins je distingue l'une de l'autre ; je les préfère aux choses sensibles, telles que les richesses, les beaux habits, les avantages corporels, et j'aime celui en qui je vois qu'elles résident. Puisque je les connais toutes deux indépendamment de mes sens, puisque je les préfère à ce que mes sens me font connaître, il y a en moi d'autres yeux que ceux de mon corps qui perçoivent ces deux objets.

2o. Je me suppose, dans le silence et au milieu des ténèbres de la nuit, cherchant la différence et la somme des deux nombres 40 et 25: je trouve 15 et 65. Puis, je cherche le produit de ces deux mèmes nombres, et j'ai 1000; je cherche le quotient

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de ce produit divisé par l'un des deux, et j'ai toura-tour l'un et l'autre. Cette différence, cette somme, ce produit, ce quotient sont des idées de port qui n'ont rien de matériel; ce qui pense en moi les saisit sans le secours des sens : voilà des opérations qui lui sont propres, indépendantes des organes. Il en est de même des réflexions, des jugemens que nous faisons sur tous les objets incorporels, quels qu'ils soient,

Je considère la vérité, l'ordre, la raison, la sagesse etc.; je réfléchis long-temps sur ces objets immatériels; et pour y réfléchir avec plus d'attention, je me recueille en moi-même, je défends à l'oeil de voir, à l'oreille d'entendre; je tiens tous mes organes dans l'inaction. Je puis même me préoccuper si fortement de l'une de ces idées que je devienne insensible aux douleurs les plus aiguës, aux privations les plus pénibles, aux besoins les plus impérieux du corps. De bonne foi, est-ce le corps qui se subjugue ainsi lui-même, qui s'oublie lui-même, qui se détache de lui-même pour se concentrer dans un objet incorporel? (1)

Mais voici une opération encore plus évidem ment propre à ce qui pense en moi, plus évidemment indépendante des sens. Chaque sens a des fonctions absolument distinctes, et ne pent me communiquer qu'un seul ordre de sensations. L'oeil,

(1) Ce fut au milieu des plus vives souffrances que Pascal se livra à la pénible recherche du problème de la Cycloïde, et quelques nuits de douleur suffirent à son génie pour en surmonter toutes les difficultés.

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