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par exemple, ne peut pas plus me faire juger des sons que l'oreille des couleurs ; il en est de même des autres sens qui reçoivent tous des impressions différentes entre lesquelles il n'y a point d'analogie. Cependant je puis comparer ces impressions diverses, et juger si elles appartiennent à un même objet ou à des objets différens: puisque chaque sens ne peut me fournir les moyens de comparer ses impressions à celles d'un autre sens, il y a donc en moi un être intelligent, distingué des sens, qui fait cette comparaison, qui sépare ou réunit les idées ou images provenues de sources si différentes, et qui les associe pour en former des jugemens. (1)

3. Dans le système de l'organisation corporelle, à la fois pensante et agissante, la détermination de vouloir la mort, de la chercher, de se la donner, ou même de l'attendre serait impossible. Les organes corporels ne peuvent transmettre à notre centre cérébral que des impressions et des détermina

( 1 ) Une autre preuve évidente que ce qui pense et veut dans l'homme a une existence indépendante des organes, c'est qu'il commande au cerveau si le cerveau est dans son intégrité. Je puis, en effet, me porter de moi-même à la réflexion et au raisonnement sans y étre actuellement déterminé par la sensation. Je puis choisir l'objet qui doit m'occuper et le degré d'attention que je veux lui accorder ; et lors même que la sensation éveille la pensée et provoque ses recherches, je reste toujours maître d'accueillir ou de négliger la sensation; je puis, à mon gré, la généraliser ou l'analyser, la considérer d'une manière partielle ou absolue, la féconder ou n'en tenir aucun compte. Il y a donc un instant où ce qui pense et veut en moi agit par lui-même, où il est puissance élective et régulatrice. Donc il a une existence indépendante des organes cérébraux, puisqu'il leur imprime le mouvement, les modifie et s'en sert comme d'un moyen pour produire son effet.

tions conformes à leur nature; leur nature est la vie, leur pensée naturelle est de la désirer, leur détermination naturelle est de la vouloir, leur action naturelle est de la conserver. Comment se fait il donc que l'organisation se détruise elle-même lorsqu'elle ne peut avoir d'autre volonté ni faire d'autre action que la volonté et l'action de se conserver? Il y a contradiction évidente dans la volonté, par conséquent impossibilité dans l'action: l'alliance de mort et de volonté étant, dans ce système, aussi incompatible avec notre nature, que celle du cercle et du carré est contradictoire à notre raison, l'une est aussi impossible que l'autre. Dans l'hypothèse, au contraire, du moi substance distincte des organes et immatérielle, l'ame exerce alors sur les organes qui lui sont soumis l'empire naturel du fort sur le faible, du pouvoir sur le sujet. Et c'est ainsi que s'explique avec facilité, avec simplicité, avec évidence, ce grand et dernier acte de la volonté humaine, extrême de la force ou de la faiblesse de l'homme, dénouement de la tragédie du crime ou de la vertu selon que l'ame, cédant au désespoir, refuse d'atteindre le but pour lequel le créateur lui laisse la vie; ou que, jugeant le sacrifice du corps nécessaire à la société ou à un ordre général de devoirs devant lesquels disparaissent les intérêts particuliers et les sentimens personnels, sans haine contre le compas gnon de ses travaux, elle le fait servir à de grands desseins en le dévouant à une mort prématurée.

4. L'étendue, la divisibilité, sont des proprié tés connues de mon corps, et de tout ce qui est matériel. Or le moi qui sent, pense et veut, en chacun de pous, est absolument incompatible avec ces propriétés. En effet, ce moi sent tonte sorte d'affections, de sensations, de pensées, de desirs qui commencent, qui finissent, qui se renouvellent et quelquefois sont simultanés. Et c'est toujours le même moi qui persévère invariablement; et ce moi est toujours modifié tout entier même par les sensations simultanées les plus contradictoires, le froid et le chaud par exemple. Il n'y a pas un moi pour la pensée ou la sensation d'hier; un autre moi pour la pensée ou la sensation d'aujourd'hui ; il n'y en a pas un pour l'oeil qui voit le musicien, un autre pour l'oreille qui l'écoute en même temps; il n'y en a pas non plus un qui commande le mouvement de la langue, et un autre qui simultanément commande le mouvement de la main. Non évidemment, et le plus intrépide matérialiste ne saurait en disconvenir. Le moi n'est donc pas une collection, une totalité de parties, mais une unité parfaite; ce moi qui sent, qui veut et qui pense, n'est donc pas divisible; il n'est donc pas matériel. Il faut donc ou nier l'unité de personne dans l'homme, ce qui est souverainement absurde, ou reconnaître en lui une ame spirituelle.

Cette vérité paraît dans un nouveau jour en considérant que la pensée ne peut être que matière १ ou accident de la matière, ou modification d'une

substance immatérielle et indivisible.

Or la pensée n'est pas matérielle : cela parle de soi. Qui dira jamais la moitié, le quart d'une négation ou d'une affirmation, un pouce ou une ligne de perception, le dessus ou le dessous d'une volition, le côté droit ou le côté gauche d'un desir?

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La pensée n'est pas un accident de la matière. Dans cette hypothèse, elle serait repos, ou mouvement, ou effet du mouvement. Elle n'est pas repos de la matière; car elle est un acte : le jugement qui réunit plusieurs idées, le raisonnement qui réunit plusieurs jugemens, sont un travail, et tout travail est mouvement et non repos. Elle n'est pas mouvement de la matière ; car le mouvement a sa mesure et ses degrés; la pensée, au contraire, est indivisible. Le mouvement matériel a des bornes qui l'empêchent de s'étendre au-delà de certains espaces; la pensée n'a d'autre champ que l'infini. Le mouvement ne peut agir qu'au présent; le passé et l'avenir sont également du ressort de la pensée : l'espérance, par exemple, serait donc un mouvement futur; mais comment un mouvement futur matériel existerait-il au présent? La pensée n'est donc pas un mouvement de la matière. -- Elle n'est pas non plus l'effet du mouvement; car un effet ne peut pas être plus noble que sa cause, une conséquence plus puissante que son principe. Or, que la pensée soit plus noble et plus forte que le mouvement matériel, qui ne le voit au premier coup d'oeil, puisque la pensée connaît ce mouvement,

tan dis que ce mouvement ne la connaît pas; puisque la pensée parcourt, dans la plus petite fraction de temps, des espaces que ce mouvement ne pourrait franchir que dans des milliers de siècles; puisque la pensée peut être simultanément directe et réfléchie, en allant en avant revenir sur elle-même, tandis que le mouvement ne peut se replier sur luimême, ne pouvant pas avoir à la fois une direction droite et une direction rétrograde.

La pensée n'est donc ni matière, ni rèpos, ni mouvement, ni effet du mouvement de la matière. Elle est donc une modification d'une substance immatérielle.

Enfin, peut-on nier que l'homme compare ses pensées, ses sensations, qu'il préfère, par choix l'une à l'autre? Hé bien, il faut le nier, ou admettre la spiritualité de l'ame. En effet, si l'homme est tout matière, s'il n'y a pas en lui un être pensant simple et indivisible, ou son organe pensant et sentant tout entier aura les deux idées, les deux sensations, ou chaque particule de cet organe aura les deux sensations, les deux idées, ou enfin la particule A aura une sensation, une idée, et la particule B en aura une autre, L'organe pensant et sentant ne peut avoir tout entier les deux idées, les deux sensations: car c'est un axiome incontestable et incontesté de la science de la matière qu'une même partie ne saurait avoir en même temps deux modifications du même genre, par exemple, deux figures, deux étendues, etc.; et, d'ailleurs,

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