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Q. HORATII FLACCI

CARMINUM

LIBER IV.

LES ODES

D'HORACE.

LIVRE IV.

ODE PREMIÈRE.

ARGUMENT.

L'AUTORITÉ de Suétone, qui assure que ce Livre fut publié long-temps après les trois premiers (ex longo intervallo), est si formelle que personne n'a osé la contester. Les interprètes qui, malgré ce témoignage, ont voulu donner à certaines Odes une date antérieure à celle de la publication des trois premiers Livres, n'ont eu à choisir qu'entre deux partis: ou ils ont supposé que le quatrième Livre, tel qu'il nous est parvenu, ne renferme pas les mêmes Odes qu'Horace lui-même y avoit insérées; ou bien ils ont pensé qu'Horace, obligé par Auguste de publier ce quatrième Livre pour y recueillir les Odes qu'il avoit composées sur les victoires de Tibère et de Drusus, ne put donner à ce nouveau volume la grosseur requise qu'en y insérant des Odes composées plus anciennement. J'ai prouvé, à la fin de ma note sur la publication des trois premiers Livres (T. I, p. 321, 322), que la première opinion est insoutenable. La seconde est mieux fondée en raison; mais, pour lui donner toute la probabilité désirable, il faudroit trouver, pour chaque Ode que l'on croit antérieure à la publication des trois premiers Livres, les raisons qui ont pu déterminer Horace à ne les y point faire entrer. C'est ce que j'ai fait, pour les Odes du troisième Livre qu'il n'inséra point dans les deux premiers, quoiqu'il les eût déjà composées. Mais je doute qu'on en vînt à bout pour celles du quatrième Livre, dont on suppose qu'il différa aussi la publication. Elles sont, au reste, en petit nombre: on ne reproche à quelquesunes que d'être trop frivoles pour l'âge où Horace étoit parvenu; et deux seulement ( la neuvième et la douzième)

laissent quelque incertitude sur leur date. J'espère lever toutes ces difficultés dans les argumens de ces différentes Odes, et montrer qu'il est extrêmement probable qu'aucune ne fut écrite avant la publication du Livre III.

A commencer par celle qui nous occupe, la date en est très-facile à déterminer. Le sixième vers annonce évidemment qu'Horace venoit d'accomplir ou alloit accomplir son dixième lustre. On a eu tort d'incidenter sur le mot circa, et d'en conclure qu'Horace pouvoit avoir ou beaucoup plus ou beaucoup moins de cinquante ans, qu'il pouvoit être entré récemment dans son dixième lustre ou à la veille de finir le onzième. Si l'on disoit parmi nous en prose: « J'ai quelques cinquante ans,» l'expression n'auroit pas tant de latitude, et je crois qu'elle correspond à celle dont notre poète s'est servi.

C'est donc à l'an de Rome 738 qu'il convient de rapporter notre Ode; mais on ne peut savoir aussi précisément quel est le Paulus Maximus à qui le poète l'adressa. L'opinion la plus probable est que son nom de famille étoit Fabius; nom que lui donnent en effet quelques Mss.; qu'il fut consul, l'an de Rome 742', avec Q. Ælius Tuberon, et qu'on ne doit pas le confondre avec un autre Fabius Maximus, son frère, dont le prénom étoit Quintus, et qui fut consul en 743, avec Julius Antonius à qui l'Ode suivante est adressée. Il est cependant juste de dire que cette opinion est susceptible d'une objection assez spécieuse. Horace qualifie Paulus de puer (v. 15), et ce mot ne pouvoit guère convenir à un homme qui fut consul quatre ans après. M. Wetzel soutient même que, pour trouver ce nom de puer donné à un homme de plus de vingt ans, il faut descendre à Silius Italicus, dont l'autorité n'est d'aucun poids, pour décider d'un passage d'Horace. Mais, d'un autre côté, il est peut-être un peu hardi à nous autres modernes de prononcer sur l'étendue exacte d'une expression latine, surtout quand c'est un poète qui s'en sert. On s'écarta fréquemment, sous Auguste, de la loi qui ne permettoit de gérer le consulat qu'à quarante-trois ans; le fils de Cicéron fut consul à trente-quatre. Si l'on

veut supposer que Paulus fut revêtu, à trente, de cette dignité, il auroit eu vingt-six ans quand notre Ode fut écrite, et il seroit alors moins invraisemblable qu'Horace lui donnât un nom qui pouvoit s'appliquer aux hommes de vingt ans; on verra même dans l'Ode 4 Tibère et Drusus nommés pueros, l'un à vingt-six ans, et l'autre à vingt-trois.

Des deux autres personnages nommés dans cette Ode, celui du trente-troisième vers paroît être le même à qui est adressée l'Ode dixième de ce Livre; et Cinare, soit que ce nom fût réel ou supposé, me semble avoir été un personnage véritable. Il en sera encore question dans l'Ode 13, et, ce qui est plus décisif, dans l'épître 7 du Livre I adressée à Mécène, et dans la quatorzième ad Villicum. Il résulte de ces passages que Cinare étoit une courtisane très-jolie et très-avide; qu'Horace obtint cependant ses faveurs gratuitement, et qu'elle mourut à la fleur de son âge. On explique diversement l'épithète de bonne qu'il lui donne ici. Les uns disent que c'est un simple hommage que l'on rendoit aux personnes mortes; les autres, que bonne est mis là pour belle. J'aime mieux une troisième opinion qui rapporte ce mot à la bonté qu'avoit eue Cinare d'aimer Horace sans intérêt.

Le sujet et le plan de cette Ode n'ont pas besoin de commentaire. Le poète demande grâce à Vénus qui vient encore troubler son repos malgré ses dix lustres. Il la renvoie aux jeunes gens plus capables de la servir, et lui désigne en particulier Paulus Maximus, dont l'éloge se trouve ainsi amené d'une façon très - naturelle. Le poète proteste ensuite une seconde fois de son insensibilité, mais la violence qu'il s'impose ne peut durer long-temps; la passion qu'il cachoit se manifeste tout-à-coup, et cette passion nous touche, même dans un homme qui a passé l'âge des amours, parce qu'il en peint les tourmens sans se permettre la moindre espérance.

Le mètre est le même que dans l'Ode 9 du Livre III: Donec gratus eram.

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