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Une des qualités qui attachaient le plus à M. Turgot ceux qui avaient le bonheur de vivre dans son intimité, êtait le zéle actif et généreux avec lequel il s'occupait des travaux et de la gloire de ses amis.

Lorsque l'un ou l'autre d'entre eux avait entrepris un ouvrage digne d'estime, M. Turgot se dérobait à lui-même un tems précieux pour donner des conseils exposés avec une véritable affection, appuyés de raisons souvent très-développées, et soutenus par des exemples ordinairement plus puissans encore que les raisons.

Il aimait beaucoup l'Abbé de Lille, aussi aimable en effet par son caractère heureux, sensible et naïf, que justement célèbre par sa versification brillante et vivement frappée. Il le croyait surtout propre à traduire Pope. Mais l'Abbé a bien fait de s'opiniâtrer à Virgile, car sans cela que de beaux vers nous aurions perdas!

Tout en admirant les premiers morceaux que M. l'Abbé de Lille avait traduit de ce grand poëte, et qu'on commmençait à lire en société, M. Turgot y aurait voulu moins d'éclat, une littéralité plus habituelle et quelquefois moins re-、

cherchée, plus de simplicité, un travail moins apparent, un plus doux abandon.

C'est afin d'indiquer dans quel esprit il eut désiré que les Géorgiques, qui n'êtaient encore traduites qu'en partie, le fussent d'un bout à l'autre, qu'il avait fait et donné à Virgilius 'de Lille, sur le premier, le second et le quatrième chant, les essais que nous allons faire connaître.

L'ami auquel ils étaient destinés ne sera point fâché qu'on ait conservé ce monument de l'estime et de l'attachement qu'il inspirait dès sa jeunesse à un si grand homme. Ils n'ont êté communiqués dans le tems qu'au très-petit nombre d'autres amis pour qui M. Turgot voulait bien n'avoir rien de caché.

On verra que M. l'Abbé de Lille a cru pouvoir en adopter plusieurs vers, qui ne lui ont donc pas êté proposés inutilement; et qu'il a dans d'autres endroits donné à sa Traduction une précision, une sévérité encore plus grandes, aussi naturelles que celles qui lui êtaient recommandées.

M. Turgot ne pouvait supporter que l'on traduisit les poëtes en prose. Ces prétendues traductions lui causaient un dégoût insurmontable. Il disait que les meilleures n'êtaient, ne pouvaient

être que des interprétations, que les autres êtaient des assassinats. Mais il exigeait qu'en traduisant en vers des Poëmes, on ne composât pas un autre Poëme que celui dont on s'occupait. Il voulait qu'on fût plus fidèle à la pensée et à l'expression de l'auteur que ne l'êtaient, que ne l'avaient êté jusqu'alors, les prosateurs qui s'êtaient hasardés à translater des vers de cette manière réfrigérante.

Ces principes ont fondé une école. Les Traductions d'une scrupuleuse exactitude, et cependant en vers harmonieux, qui ont êté publiées dans ces derniers tems, en sont l'heureux fruit.

Quant aux essais que M. Turgot a offerts à M. l'Abbé de Lille, pour lui seul, ils doivent moins être regardés sous l'aspect qu'ils présentent de cinq cents vers de Virgile traduits avec élégance et pureté, que sous celui d'une anecdote assez curieuse relative à la traduction des Géorgiques.

Il nous semble que cette anecdote honore également le Poëte philosophe et Homme d'État qui donnait avec la plus grande bienveillance des conseils utiles, et l'autre Poëte, qui joignant au talent le plus distingué une modestie encore plus rare, recevait ces conseils avec reconnais

sance.

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GEORGICON.

LIBER PRIMUS.

QUID faciat lætas segetes; quo sidere terram Vertere, Mæcenas, ulmisque adjungere vites, Conveniat; quæ cura boum, qui cultus habendo Sit pecori; atque apibus quanta experientia parcis; Hinc canere incipiam. - Vos, ô clarissima mundi Lumina, labentem coelo quæ ducitis annum ; Liber, et alma Ceres, vestro si munere tellus Chaoniam pingui glandem mutavit aristâ, Poculaque inventis Acheloïa miscuit uvis; Et vos, agrestum præsentia numina, Fauni, Ferte simul Faunique pedem, Dryadesque puellæ : Munera vestra cano. Tuque ô, cui prima frementem Fudit equum magno tellus percussa tridenti, Neptune; et cultor nemorum, cui pinguia Ceæ Ter centum nivei tondent dumeta juvenci; Ipse, nemus linquens patrium saltusque Lycæi, Pan, ovium custos, tua si tibi Mænala curæ Adsis; ô Tegeæe, favens, oleæque Minerva Inventrix; uncique puer monstrator aratri; Et teneram ab radice ferens, Silvane, cupressum;

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GÉORGIQUES.

CHANT PREMIER.

II

MÉCÈNE, tu le veux, et ma muse champêtre Va chanter les moissons, et quel art les fait naître; Quel astre doit briller sur les sillons nouveaux. Elle peindra la vigne embrassant les ormeaux,] Et les troupeaux foulant les fleurs de la prairie; L'abeille enfin, ses mœurs, son utile industrie. Flambeaux majestueux, vous qui du haut des airs Conduisez les saisons, éclairez l'Univers! Secourable Cérès, Dieu joyeux de la Treille, Dont les riches épis et la grappe vermeille Ont jauni les guérêts, embelli les coteaux, Remplacé le gland vil, teint le cristal des eaux ! Vous, Nymphes, Égipans, troupe jeune et riante! Dieux champêtres ! ce sont vos bienfaits que je chante. Toi qui frappant le sol, fis d'un coup de trident, S'élancer le coursier impétueux, ardent,

Dieu des mers! Toi, Berger, qui régis les bocages,
Et dont les taureaux blancs tondent les gras herbages
De la fertile Cée! Et toi qui sous tes loix

Tiens brebis et Pasteurs, Pan, accours à ma voix !
Minerve, toi par qui l'olive fut connue !
Enfant, dont le génie inventa la charrue
Et qui nous enseignas à fendre les guérets!
Sylvain, toi dont le sceptre est un jeune cyprès!

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