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Tu pleureras! parmi cent baisers enflammés
Tes larmes baigneront mes traits inanimés:
Tu pleureras : ton cœur est né tendre et sensible,
Les Dieux ne l'ont point fait d'un acier inflexible.
Les beautés d'alentour et leurs jeunes amans
Uniront leurs sanglots à tes gémissemens.

Crains d'affliger mon ombre, et que tes mains cruelles
Epargnent cet albâtre et ces tresses si belles.

Cependant aimons-nous; il est tems d'être heureux;
Déjà la mort étend ses voiles ténébreux :
L'âge vient en silence. Avant que la tendresse
Loin de nos cheveux blancs vole avec la jeunesse,
Aimons. Aimons, tandis qu'aux portes d'un jaloux
Je sais combatre encore et briser des verroux:
J'y suis chef et soldat. Loin, trompette guerrière,
Ouvre aux ambitieux leur sanglante carrière.
Sur mes gerbes assis, sans désirs et sans soin,
J'insulte à la richesse et crains peu le besoin.

1

TRADUCTIONS DE POPE.

SUR NEWTON.

L'OBSCURE nuit couvroit l'univers ignoré;
DIEU dit; que Newton soit, et tout fut éclairé.

ESSAI SUR L'HOMME.

Commencement de la première Epitre.

CHER Saint-Jean, abandonne, aux Rois,aux Courtisans,
Leur orgueil, leur bassesse et leurs riens impôsans.
Ami, réveille-toi. — Puisque la vie humaine

Plus prompte que l'éclair, fuit et nous laisse à peine
Jetter autour de nous un regard, et mourir ;
D'un pas libre, essayons du moins de parcourir
Le champ vaste de l'homme : étonnant labyrinthe
Où d'un plan sage encore on reconnoît l'empreinte;
Désert où le chardon naît à côté des fleurs ;
Riant Eden, semé de bosquets enchanteurs,
Mais où l'arbre du mal offre son fruit perfide.
Viens, et sur l'univers portons un œil avide.
Ce qu'à perte de vue étalent les guérêts,
Ce que dérobe au jour l'épaisseur des forêts,
Voyons tout. Descendons dans les mines profondes
Gravissons sur les rocs, et planons sur les ondes.
Observons

,

Observons des talens l'essor impétueux:
Du vice démêlons les sentiers tortueux.

SECONDE ÉPITRE.

Connois-toi, sans vouloir sonder l'Etre Suprême :
L'étude qui convient à l'homme est l'homme même.
L'homme, être mitoyen, placé dans l'univers
Sur un isthme assailli par les flots de deux mers;
Informe en sa grandeur, aveugle en sa sagesse;
Étrange composé de force et de foiblesse :
Dans le doute sceptique il ne peut se fixer,
Jusqu'à l'orgueil stoïque il n'ôse s'élancer:
Il flotte entre les deux sans principe, sans guide;
Tour à tour tout l'ébranle et rien ne le décide.
Doutant s'il doit agir ou rester en repos,

Se croire au rang des Dieux ou bien des animaux,
A l'âme ou bien au corps donner la préférence;
C'est pour mourir qu'il naît, pour se tromper qu'il pense;

Ne pouvant s'arrêter dans un juste milieu,

Soit qu'il raisonne trop ou raisonne trop peu,
Il s'égare toujours. Cahos hétérogène,
La raison le retient, la passion l'entraîne !
S'abusant, s'éclairant et s'abusant encor,
Il s'élève, il retombe, il rampe et prend l'essor.
Être sublime et vil, pusillanime et brave,
Maître de tout, de tout ou la proie ou l'esclave;

Tome IX.

9

Seul créé pour chercher, pour voir la vérité,
Et d'erreurs en erreurs toujours précipité;
De contrariétés source à jamais féconde,
La gloire, le jouet et l'énigme du monde.
Être prodigieux, vas, gravis la hauteur
Où la science appelle et guide ton ardeur;
Vas mesurer le glôbe et peser l'atmosphère,
Du flux et du reflux éclaircir le mystère,
Des célestes flambeaux calculer les retours;
Montre au Soleil sa place, aux planètes leur cours,
Des siècles écoulés corrige la durée.

Sur l'aile de Platon vole dans l'Empirée

A la source du beau, de l'honnête, du bon.
Avec ses successeurs rêvant à l'union,

Vas tournoyer comme eux dans leur obscur dédale;
Et détruisant les sens crois franchir l'intervalle

De la nature humaine à la Divinité :

Tel que

le sot Bramine en sa mysticité

Au Soleil qu'il adore en tournant rend hommage, Et croit par son vertige en devenir l'image.

Fais un monde à ton gré, donne à Dieu des avis.. Insensé! rentre enfin dans toi-même et rougis.

Lorsque de l'univers devinant la structure Newton développoit les loix de la nature,. Des secrets du Très-Haut les confidens heureux Admiroient qu'un mortel vint planer si près d'eux : Un cri soudain partit des sphères éternelles Ce qu'un singe est pour nous, Newton le fut pour elles. Eh bien, lui qui soumit à des retours constàns

Ces comètes, ces feux méconnus si long-tems,

Qui les vit dans l'espace et monter et descendre,
Sut-il d'où l'homme vient, où l'homme va se rendre?
Calcula-t-il jamais un mouvement du cœur?

Déplorable mortel, ton esprit inventeur
S'élève d'art en art : ta vue et ton courage
Embrassent l'univers; mais dans son grand ouvrage
Les fils que la raison avec peine a tissus
Sont par la passion dispersés ou rompus.

Sois savant; sois surtout humble, et que ta science
Dépose de l'orgueil la pompe et l'arrogance.
Ecarte ce qui n'est que luxe, amusement,
Curiosité vaine, ingénieux tourment,
Etalage d'esprit, tour de force, systême :
Retranche tout. Abats si tu peux le tronc même,
Elague au moins l'excès et les rameaux épars
De tout ce que le vice a fait pulluler d'arts.
Déduis tout ce qui n'est que frivole ou funeste,
Et des travaux humains compte le peu qui reste.

L'homme renferme en lui deux pouvoirs éminens,
Balancés l'un par l'autre et toujours différens,
L'amour propre qui meut, la raison qui modère.
Croirons-nous l'un nuisible et l'autre salutaire,
Quand chacun tend au but par le ciel ordonné,
Et que l'essor de l'un par l'autre est gouverné?
Si chacun d'eux se tient dans sa borne prescrite,
Tous deux sont bons; mauvais s'ils passent la limite.

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