DIDON. CHANT TROISIÈME. 97 Sous les coups qui l'accablent, Didon tremblante, épouvantée, N'invoque plus que la mort : la lumière du Ciel l'importune. Dans ses sombres desseins d'affreux augures la confirment. Un jour, offrant ses dons aux immortels, la liqueur sainte Sur l'autel s'obscurcit soudain, et son œil glacé d'horreur, Au lieu du vin, ne vit plus qu'un sang infect et dégoûtant. Seule témoin du prodige, Didon cache à tous, à sa sœur même Ses terreurs. Au fond du palais, dans un lieu retiré, Est uu temple de marbre, où souvent elle occupe sa tristesse D'un souvenir chéri. Des toisons éclatantes de blancheur, Des festons de rameaux le tapissent toujours. De cette enceinte, Dans le silence profond des nuits, son oreille croit entendre Sortir des sanglots, une voix gémissante qui lui crie: «C'est ton époux qui t'appelle. » Souvent la chouette désastreuse Traîneau haut des toîts ses chants solitaires et plaintifs. Dans ce moment mille avis négligés, mille oracles accablaus Viennent soudain frapper ses esprits et redoublent sa terreur. Dans le sommeil ses sens agités lui montrent le perfide, L'ingrat Énée ardent, furieux, qui la poursuit et l'entraîne Sans pitié. Des fantômes nouveaux succèdent : elle est seule Sur des bords lointains, cherchant les siens qui l'abandonnent Au milieu des immenses déserts. C'est ainsi que Panthée Dans son triste délire a vu les Euménides s'acharner Sur ses pas, qu'un double soleil, deux Thèbes se montrèrent Dans un même instant à sa vue égarée. Ou tel encore Tome IX. 7 Aut Agamemnonius scenis agitatus Orestes, " Quæ mihi reddat eum, vel eo me solvat amantem >>Oceani finem juxta, Solemque cadentem, >> Ultimus AEthiopum locus est: ubi maximus Atlas » Axem humero torquet stellis ardentibus aptum. >> Hinc mihi Massylæ gentis monstrata sacerdos, ע Hesperidum templi custos: epulasque draconi Quæ dabat, et sacros servabat in arbore ramos, Spargens humida mella, soporiferumque papaver. >> Hæc se carminibus promittit solvere mentes Quas velit: ast aliis duras immittere curas, >> Sistere aquam fluviis, et vertere sidera retro; >>Nocturnosque ciet manes. Mugire videbis >> Sub pedibus terram, et descendere montibus ornos. >>Testor cara Deos et te, germana, tuumque. » Dulce caput, magicas invitam accingier artes. »Tu secreta pyram tecto interiore sub auras Erige et arma viri, thalamo quæ fixa reliquit >> Impius, exuviasque omnes, lectumque jugalem >>Quo perii, super imponas. Abolere nefandi DIDON. CH. III. University Dans nos jeux l'infortuné fils du superbe Agamemnon Par sa douleur vaincue, en proie à sa rage, rassemblant L'instant, choisi le genre de mort. Pour écarter tout soupçon, » M'ouvre une voie; et je touche peut-être au jour qui me rendra >> Dans l'Océan, où du vieil Atlas le colosse inébranlable >> Porte le poids de la voûte étoilée, et sépare de nos plaines » Les confins du pays des Noirs; on trouve ce jardin >>> Fortuné, dont les arbres sacrés se couronnent de fruits d'or: » Un temple est auprès : un énorme dragon veille à l'entrée » Sur ce trésor. Prêtresse du temple, une femme de Massyle » Nourrit ce monstre ; et sait aussi, dit-on, l'endormir à son gré, » Mêlant un miel épais aux tristes pavots. Cette Prêtresse >> Est ici. Rien ne résiste à son art, qui commande à l'Amour même. >> Par ses charmes puissans les peines cruelles s'adoucissent: >> Dans les cœurs ils versent le calme, ou soulèvent la tempête. » Les torrens à sa voix, les astres retournent en arrière: >> Des tombeaux évoqués les morts apparoissent. Tu verras >> Trembler la terre, et du haut des monts les chênes ébranlés » Rouler à grand bruit. Je jure le Ciel : j'en atteste ma tendresse >> Pour toi : crois que Didon à cet art ne s'abaisse qu'avec peine. >> Dans une cour du palais fais construire un bûcher. Prends soin » D'y placer cette superbe armure et ce glaive éclatant d'or, >> Cuncta viri monumenta jubet, monstratque sacerdos. >> At Regina pyrâ penetrali in sede sub auras Et matri præreptus amor. Ipsa molâ, manibusque piis, altaria juxta, Sidera: tum, : >> Dons de ma main jadis précieux, aujourd'hui délaissés. >> Mets-y tout, armes, habits, jusqu'au lit funeste où j'ai perdu >> Gloire, innocence, repos. Il faut que la flamme anéantisse >> Tous les restes du traître ; et la Prêtresse ainsi me l'ordonne. » Elle a dit un froid soudain la pénètre, et la pâleur étendue Sans rien craindre de plus qu'à la mort de Sichée, elle accomplit Les trois noms de la triple Diane : une eau mystique épanchée Ces tégumens qu'au front du poulain, dès qu'il voit la clarté, Un pied nu, dans ses mains portant un gâteau, la Princesse Dès long-temps la nuit dans les cieux poursuivoit sa carrière: |