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nécessité, qui est l'autorité des brutes, les conserve en les unissant selon les lois particulières qui dérivent de leur nature.

Loin donc d'être surpris que notre raison reléguée en elle-même n'y trouve qu'incertitude et que doute, nous devons voir dans cette extinction de la vérité et de la vie la suite nécessaire d'un grand désordre, et l'effrayante exécution de la sentence de mort prononcée par la nature contre tout être qui, se flattant d'une totale indépendance, se sépare de la société à laquelle il doit appartenir. Mais rétablissez l'ordre, mettez les intelligences en rapport, la loi de leur existence se manifeste aussitôt ; car pour elles, vivre c'est croire, et le premier phénomène de la vie intellectuelle chez tous les peuples, le plus général, le plus -constant, est la croyance d'un Dieu, cause universelle et dernière raison de tout ce qui est.

Après cela, délibérer seulement si l'on croira qu'il existe, tenir en suspens cette haute vérité, s'en faire juge, c'est s'élever au-dessus de toutes les sociétés et de tous les siècles, c'est récuser la raison humaine, au moment même où l'on en appelle au raisonnement.

Dieu est, parce que tous les peuples attestent qu'il est; Dieu est, parce qu'il n'est pas même possible à l'homme de prononcer qu'il n'est pas, puis

qu'en refusant d'y croire sur le témoignage universel, il perd le droit de rien affirmer.

Qu'ils ne nous parlent donc plus d'objections ces esprits superbes, qui ne savent qu'arracher de ses fondemens da raison humaine, pour se faire de ses débris un rempart contre Dieu. Des objections, là où il n'existe pas, je ne dis point de vérité certaine, mais de pensée assurée d'elle-même! Des objections! et d'où les tireroient-ils? Comment les énonceroient-ils? Les insensés! à nous seuls appartient la parole, parce que nous possédons la foi à eux le silence, sous les ruines de leur intelligence écroulée.

Mais si nous sommes parvenus à cette foi sublime, comme nous parvenons à la vie même, par des voies inexplicables, et comme par une puissante nécessité d'être; tout va maintenant s'éclaircir, et nous découvrirons avec évidence la raison de l'ordre auquel la nature nous forçoit de nous conformer sans le comprendre. Et c'est ici, qu'au lieu de prostituer notre esprit à une solitaire contemplation de lui-même, qui l'énerve et le tue, il faut nous élever à cette haute philosophie qui, unissant ce qu'on ne doit jamais séparer, la première cause et ses effets, Dieu et l'homme, semble, dans sa simplicité féconde, n'être que l'expansion d'une seule idée.

Quoi que l'orgueil puisse prétendre, nous ne possédons point en nous la lumière : aussi, quiconque s'obstine à la trouver en soi, tombe aussitôt, comme nous l'avons vu, ou dans un scepticisme désespérant, ou dans les pitoyables rêveries d'une science idiote, qui détruit l'entendement afin de le connoître, et cherche dans la mort la raison de la vie. Plongé dans une vaste ignorance, dont il ne sort que par la foi, l'homme a des sensations, des pensées, et il n'est certain ni de ses sensations ni de ses pensées ; l'homme existe, et il n'est pas certain de son être: c'est qu'il n'en est pas lui-même la cause, et que chercher la certitude de notre existence, c'est en chercher la raison qui n'est pas en nous. De l'idée d'un être contingent, on ne déduira jamais son existence actuelle; et tous les êtres finis ensemble, ne pourroient, séparés de la première cause, acquérir la certitude rationnelle de leur existence, parce que la vérité est l'être, et que dès lors il n'existe de vérité nécessaire que dans l'être nécessaire. Otez Dieu de l'univers, et l'univers n'est plus qu'une grande illusion, un songe immense, et comme une vague manifestation d'un doute infini.

Mais Dieu connu, tout change, et l'univers, 'expliqué par sa volonté et sa toute-puissance,

s'attache, pour ainsi dire, à sa cause, et s'affermit sur cette base inébranlable. On aperçoit clairement la raison première de tous les effets et de toutes les existences; et les intelligences créées, remontant à leur source, se rencontrent et se reconnoissent dans l'intelligence éternelle d'où elles sont toutes émanées.

C'est là, c'est dans le principe même de la vé– rité et de la vie, que l'homme découvre la raison de la loi générale de l'autorité, fondement de la vie intellectuelle, et l'unique moyen par lequel elle puisse et commencer et se transmettre.

La vie, c'est la vérité, c'est Dieu; et il n'est pas plus possible de concevoir une intelligence sans vérité, qu'une intelligence non pensante, puisqu'on ne pense qu'à ce qui est ou à ce qui peut être. Pour les créatures intelligentes, vivre, c'est donc participer à l'être de Dieu ou à sa vérité; et elles reçoivent ensemble la vérité et l'être, puisque l'être et la vérité ne sont qu'une même chose; et si elles pouvoient se donner la vérité, elles se donneroient l'être. Purement passives lorsque la parole les féconde au sein du néant, lorsqu'elle verse en elles leurs premières pensées ou les vérités premières, elles ne peuvent ni les inventer, ni les juger, ni refuser de les recevoir, parce que la vie, à son origine, est indépendante de la volonté, et qu'il ne

sauroit même y avoir de volonté là où il n'y a pas encore de vie.

Il existe donc nécessairement pour toutes les intelligences, un ordre de vérités ou de connoissances primitivement révélées, c'est-à-dire reçues originairement de Dieu comme les conditions de la vie, ou plutôt comme la vie même; et ces vé– rités de foi sont le fonds immuable de tous les esprits, le lien de leur société, et la raison de leur existence.

De même que la vérité est la vie, l'autorité, ou la raison générale manifestée par le témoignage ou par la parole, est le moyen nécessaire pour parvenir à la connoissance de la vérité, ou à la vię de l'intelligence; et l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (1); donc de sa vérité, qu'il lui communique en se rendant réellement présent à son esprit et le nourrissant de sa substance, don prodigieux, véritable sacrifice d'amour, accompli aussi par la parole, et dans lequel nous découvrons l'origine, la base, l'indispensable condition de toute société; et Dieu en effet n'a pu parler à l'homme sans entrer en société avec lui, sans lui

(1) Non in solo pane vivit homo, sed in omni verbo quod procedit de ore Dei. Matt. IV, 4.

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